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Arkema : l’ébullition plus efficace que le ruissellement

Mis en ligne le 8 février 2018 Convergences Entreprises

L’année 2017 aura été faste pour le groupe Arkema, l’un des leaders mondiaux de la chimie. Dans la continuité des années précédentes, ses résultats ont battu des records. Les travailleurs étaient donc en attente de retombées significatives. Il faut dire qu’il y a encore quelques mois, Emmanuel Macron lui-même vantait l’idée selon laquelle les profits finissent automatiquement par ruisseler. Mais, chez Arkema, la grand-messe de la NAO (négociation annuelle obligatoire) qui s’est déroulée au mois de décembre en a été un parfait démenti. C’était sans compter sur la réactivité des travailleurs.

Mépris de classe et coup de poker : la direction veut garder la main

Le groupe Arkema a enregistré sur l’ensemble des deux seuls premiers trimestres de 2017 un résultat net de plus de 172 millions d’euros et chaque année les résultats battent des records historiques. Dans un tel contexte, l’ouverture de la NAO était attendue par une grande partie des travailleurs.

Les mesures Macron, dont la réforme fiscale et les ordonnances réformant le code du travail, ont offert de nouvelles opportunités au patronat pour tenter de mettre au pas les bastions revendicatifs. Une opportunité clairement intégrée par les dirigeants d’Arkema quand, le jeudi 14 décembre, s’est ouvert la NAO. Avant cela, la CGT du groupe avait fait campagne sur la question de la répartition des richesses. Une de ses revendications principales était une augmentation générale des salaires de 200 euros. La coordination des syndicats CGT Arkema appelait donc à la grève sur la majorité des sites de production en France le 14 décembre. C’en était trop pour le DRH du groupe, Michel Delaborde. Lors de la réunion, il a traité les travailleurs en grève de « racailles de banlieue » et a repoussé au jeudi suivant, à trois jours de Noël, la NAO, arguant qu’il ne « négociait » pas sous la pression.

Les travailleurs ne s’en sont pas laissé conter et les quelques usines en attente des propositions du patron (Jarrie, Mont et La Chambre) ont réagi en rejoignant le mouvement de grève. Le 14 au soir, treize sites sur quinze étaient mobilisés. Le lendemain, deux assemblées générales de grévistes, à Pierre-Bénite (Rhône) et à Marseille, ont décidé de reconduire la grève jusqu’au lundi.

Les maîtres du calendrier

Dans les heures et les jours qui ont suivi, via plusieurs communiqués, la direction d’Arkema a tenté de mettre face à face grévistes et non-grévistes, mais aussi syndicats « raisonnables » et ceux qui ne le seraient pas… Dans le même temps, les directeurs et DRH des usines ont été mobilisés pour aller faire du chantage sur l’annulation de futurs investissements en cas de poursuite de la mobilisation. La bonne vieille menace si souvent brandie depuis la grève de 2012 ! Enfin, voulant couper la dynamique du mouvement qui se mettait en place, la direction générale a rapidement fait miroiter l’idée selon laquelle les résultats exceptionnels seraient pris en compte dans la NAO.

Pari à demi réussi puisque, le lundi 18, une seule usine, celle de Marseille, poursuivait la grève. À Pierre-Bénite, après de nombreuses discussions, les travailleurs ont décidé de suspendre le mouvement en attendant les propositions du jeudi 21. Tous les sites – hormis Marseille – étaient en position d’attente. Sans surprise, les propositions finales – 1,2 % d’augmentation et 30 euros de talon – étaient très en deçà des revendications initiales. À Pierre-Bénite, l’AG du 21 décembre, qui a rassemblé plus d’une quarantaine de salariés, a voté la reprise de la grève pour une journée, sans illusion sur la poursuite du mouvement durant la trêve de fin d’année.

La direction pouvait pousser plus loin son offensive au début du mois de janvier. Elle a donc réclamé la signature de la moitié des syndicats pour valider la NAO. D’abord rétive, la CFDT a fini par plier le 9 janvier, entérinant la proposition de 1,2 % d’augmentation.

Un état d’esprit nouveau chez les salariés

Certes, cette grève de décembre ne peut être qualifiée de victorieuse tant les résultats sont loin des revendications portées par les grévistes. Cependant, avec cette mobilisation même minoritaire, l’état d’esprit des travailleurs d’Arkema a changé : depuis 2008, l’idée selon laquelle il fallait se serrer la ceinture filait bon train dans les usines. Aujourd’hui que la reprise est plus qu’annoncée, cette NAO leur a permis de voir qu’on ne leur demande pas de la desserrer. Les suppressions de postes et la stagnation des salaires se poursuivent. Fi du « ruissellement » à présent, même une partie de ceux qui étaient restés à l’écart de la mobilisation expriment de plus en plus ouvertement leur dégoût et se sentent en accord avec la nécessité de la répartition des richesses.

Par sa manière d’attaquer un syndicat combatif, de se jouer du calendrier et de ne rien concéder aux travailleurs, la direction a permis au plus grand nombre de voir les enjeux de la période. Le mécontentement n’est pas retombé et la question des salaires est toujours porteuse de colère. Pas sûr que les travailleurs d’Arkema attendent la grand-messe des NAO de 2018 pour revendiquer leur dû. Les mois à venir nous le diront.

25 janvier 2018, Maya PALENKE & Elias BARAGAN


En France, Arkema possède 15 sites de production :

Honfleur (Calvados) – Serquigny (Eure) – Villers-Saint-Paul (Oise) – Feuchy (Pas-de-Calais) – Carling (Moselle) – Châteauroux (Indre) – Pierre-Bénite (Rhône) – Balan (Ain) – La Chambre (Savoie) –Jarrie (Isère) – Saint-Auban (Alpes-de-Haute-Provence) – Marseille (Bouches-du-Rhône) – Lannemezan (Hautes-Pyrénées) – Mont (Pyrénées Atlantiques) – Lacq/Mourenx (Pyrénées Atlantiques)

Auxquels il faut rajouter 11 sites de ses filiales dont Bostik.

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