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Le patronat à l’offensive !

Renault Oran : un Bridgestone à la française

Mis en ligne le 4 octobre 2020 Convergences Monde

On les a tous vus ces politiciens français, de la droite franchouillarde à la France insoumise (tout aussi patriote) faisant mine de prendre le parti des travailleurs menacés de licenciement par un trust japonais du pneumatique. Que Renault fasse la même chose en Algérie, doit paraître par contre normal à tous nos « relocalisateurs » de l’industrie française.

C’est dans le cadre général de son plan de suppression de 15 000 emplois annoncé au printemps dernier, que Renault a l’intention de fermer son usine d’Oran, laissant 1 200 salariés sur le carreau.

Sous Bouteflika, Hollande et Montebourg, les promesses

En décembre 2012, François Hollande avait assisté en personne à Alger à la signature solennelle du contrat entre le groupe français et le gouvernement algérien pour l’implantation de cette usine. Un contrat à l’élaboration duquel avait contribué le ministre socialiste du « Redressement productif », Arnaud Montebourg, puis l’émissaire spécial du président Hollande pour « renforcer les liens économiques » avec Alger, le dénommé Jean-Pierre Raffarin, ancien Premier ministre de droite. Que de beau monde !

Tout ça pour que Renault obtienne une place privilégiée pour l’importation de voitures en Algérie, en s’engageant à installer une chaîne de montage à Oran et promettant ensuite toute une chaîne de sous-traitants algériens produisant des pièces détachées. Ça ne lui coûtait pas cher puisque plus de la moitié des investissements étaient fournis par l’État algérien, plus tous les travaux d’aménagement du site de l’usine et du port d’Oran, aux frais du contribuable algérien. En prime, l’importation des pièces détachée était détaxée : un sacré avantage par rapport aux droits de douane sur l’importation de véhicules neufs !

2020, la Covid a bon dos

L’usine est entrée en fonction en 2014. Aucun sous-traitant local n’a été sollicité par le constructeur français, contrairement aux promesses et, à l’hiver 2020, la production a été suspendue, sous prétexte d’impossibilité d’importer les pièces détachées. La Covid avait bon dos. En août, Renault annonçait l’ouverture d’un « plan social » pour en finir avec son usine d’Oran après moins de six ans d’activité.

Ajoutons que, cette année, les règles de douane ont changé avec le gouvernement du nouveau président Abdelmadjid Tebboune, élu en décembre 2019. Pour satisfaire tous les hommes d’affaires, notamment les grands affairistes algériens de l’import-export qui, au nom de la liberté d’entreprendre et de la démocratie, demandaient moins d’État, le nouveau président a assoupli depuis mai dernier toutes les règles sur les importations, dont celle des véhicule neufs, en même temps qu’il re-taxait l’importation des pièces détachées. D’un régime de faveur à un régime encore plus favorable, le trust français gagne encore au change. Ses usines de Tanger et Casablanca au Maroc, qui produisent autour de 400 000 véhicules par an, lui suffiront amplement, alors que sa chaine de montage d’Oran n’a sorti la meilleure année que 40 000 voitures.

Grèves contre les licenciements, manifestation à Bejaia le 21 septembre

Au lendemain de l’annonce officielle du plan Renault, le mardi 1er septembre, les ouvriers de Renault à Oran ont organisé un sit-in dans l’usine.

Pour l’instant, au moins à notre connaissance, la mobilisation semble rester limitée à l’usine Renault même. Mais, dans bien d’autres endroits en Algérie, des luttes ouvrières ont marqué ces derniers mois : protestations contre les licenciements d’une centaine d’ouvriers (23 en février, 72 en août) au complexe agro-alimentaires d’El-Kseur près de Bejaia, grève des employés de plusieurs APC (les « assemblées populaires communales », l’équivalent des mairies) pour réclamer leurs salaires impayés, par exemple. La lutte la plus marquante à ce jour est celle, à Bejaia, des travailleurs de Numilog, une entreprise de logistique appartenant au plus riche des patrons d’Algérie, Issad Rebrab. C’est pour avoir tenté de créer un syndicat que des travailleurs ont été licenciés de Numilog par ce patron qui se prétend « démocrate ». Mal lui en a pris, car il a déclenché le conflit le plus marquant de cette période avec non seulement la mobilisation des travailleurs de l’entreprise, mais des manifestations, dont la dernière, lundi 21 septembre, a rassemblé dans les rues de Bejaia des travailleurs venus de différentes entreprises de la région, ainsi que des centaines de jeunes.

Les grèves ouvrières sont-elles en train de prendre d’une certaine façon le relais du Hirak dont les manifestations du vendredi se sont pour l’instant éteintes ? On ne peut que le souhaiter.

27 septembre 2020, Olivier Belin

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