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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 21, mai-juin 2002

Fermeture de Grande Paroisse (AZF) Toulouse

Solidarité syndicats-Total, impasse pour les travailleurs

Mis en ligne le 16 mai 2002 Convergences Entreprises

Le 11 avril, presque 7 mois après l’explosion du 21 septembre, était annoncée la décision de fermer l’usine Grande Paroisse de Toulouse connue aussi sous le nom d’AZF. Le lendemain, Desmarest, le PDG du groupe Total, dont Grande Paroisse est une filiale, expliquait dans le quotidien La Dépêche les raisons de la fermeture. Il prétextait la prise en compte « de l’émotion créée par l’explosion ».

Comme si les dirigeants du groupe étaient à l’écoute des populations avant de décider d’une fermeture ! Personne n’avait réclamé celle de l’usine Grande Paroisse de Waziers, dans le Nord, qui vient elle aussi d’être fermée !

Ainsi l’accident et les morts dont ils portent la responsabilité leur auront servi à avancer leurs plans contre les travailleurs. On ne fait plus cynique. Un comble qui n’a d’égal que le fait qu’ils aient été aidés dans leur œuvre par les syndicats de l’entreprise eux-mêmes.

La colère des travailleurs détournée

Très vite à la suite de l’explosion, le porte-parole de Total sur Toulouse répétait que personne ne serait abandonné, que tout le monde serait recasé dans le groupe. Mais rapidement les travailleurs ont été invités à envisager une mutation, pouvant être qualifiée de mission « temporaire », tant que la décision de fermeture n’avait pas été annoncée. Et les départs en pré-retraite à partir de 52 ans, concernant 174 employés de l’entreprise sur un effectif de 450, ont bien été préalablement réalisés dans la perspective de la fermeture.

Pourtant les dirigeants syndicaux de l’entreprise loin de mettre en garde contre l’opération qui se tramait, affirmaient leur solidarité avec la direction de Total, appelaient les travailleurs à lui faire confiance... et s’en prenaient à ceux qui émettaient des doutes sur cette politique qui aujourd’hui se révèle catastrophique.

Le 11 avril même, à l’annonce de la fermeture, l’intersyndicale du pôle chimique faisait une déclaration à la presse. Total était dédouané : « Elle (la décision de fermeture) résulte de la campagne démagogique menée par les élus et les responsables politiques relayés par les nombreux médias. Certaines associations piégées par l’émotion ont contribué à cette prise de position ».

Même maintenant, toujours pas question de s’en prendre à Total donc. Au contraire toutes celles et ceux qui ne se sont pas prononcés pour le redémarrage du pôle chimique sont désignés par l’intersyndicale comme étant des adversaires, y compris ceux qui affirment que les travailleurs ne doivent pas faire les frais des choix industriels de Total. Ainsi la première action suivant l’annonce de la décision de fermeture à laquelle l’intersyndicale appelait les salariés du pôle chimique aura été de se rendre au meeting électoral tenu par Arlette Laguiller le soir même à Toulouse dans l’intention de le perturber. Peu importe à l’intersyndicale qu’Arlette Laguiller demande à Total de payer, à ses actionnaires de se passer de leurs dividendes cette année pour dédommager les sinistrés, maintenir les salaires et payer des formations nécessaires au reclassement à Toulouse, jusqu’à ce que tous les salariés retrouvent un emploi.

Les alliés des syndicats

L’intersyndicale du pôle chimique continue donc sur sa lancée. Elle a dès le début prétendu défendre l’emploi des salariés de la chimie en revendiquant la reprise d’activité des usines du pôle, sans tenir compte des sentiments des habitants des quartiers environnants. Il s’agissait pour elle de défendre la « chimie » et d’enrôler les travailleurs des entreprises du pôle et ceux dont l’entreprise dépend de cette activité dans ce combat.

Tous les appuis étaient bons, même ceux dont les travailleurs ne pouvaient attendre que des coups bas. Dans le numéro de l’hebdomadaire Tout Toulouse de la première semaine d’avril, un porte-parole de l’intersyndicale a été jusqu’à déclarer : « Nos alliés sont effectivement à la Chambre de commerce et d’industrie et au Medef ». Notons que lorsque Total à annoncé la fermeture d’AZF, ces alliés-là n’ont eu aucun reproche à faire à Total.

Que peut-on attendre d’autre de soutiens trouvés dans l’entourage du patronat ? Quelle satisfaction ont dû éprouver les responsables de l’usine lorsqu’ils ont pu lire dans un tract intersyndical daté du 8 avril distribué dans les jours qui précèdent l’annonce de la fermeture d’AZF : « Face à la provocation constante d’élus locaux, de certains leaders d’associations relayés par les médias locaux et nationaux, l’exaspération des salariés est encore montée d’un cran  » ! Orienter ainsi la colère des salariés, c’est bien laisser les mains libres à l’employeur.

La dramatique coupure entre les ouvriers et la population

La prmfondeur du fossé qui avait été creusé avait pu être mesuré le mois précédant la fermeture d’AZFà l’occasion des manifestations commémorant les six mois de la catastrophe du 21 septembre.

Le 21 mars, 1 500 à 2 000 manifestants se sont retrouvés derrière la banderole « la chimie un besoin, la sécurité une nécessité ». Des délégations venues d’usine chimique de la France entière se sont retrouvées aux côtés de nombreux travailleurs des entreprises du pôle chimique. Par contre, les travailleurs des entreprises de Toulouse n’appartenant pas au pôle chimique n’étaient pas présents. Quant aux sinistrés, quelques uns ont tenu à apparaître sur le passage de la manifestation, mais pour protester du peu de cas qui était fait de ce qu’ils avaient vécu.

Le 23 mars, 5 000 à 10 000 manifestants défilèrent derrière la banderole « Plus jamais ça, ni ici, ni ailleurs ». Des sinistrés, mais aussi de nombreux habitants de Toulouse épargnés par l’explosion, de nombreux militants politiques et syndicaux et politiques. La coupure avec les ouvriers de la chimie a symétriquement pesé sur cette manifestation. A la demande du redémarrage de l’activité des usines du pôle chimique exprimée à la manifestation précédente répondait la revendication de la fermeture des usines du pôle chimique.

Du coup, l’exigence que Total répare et paye pour tous les dégâts est passée au second plan lors de ces manifestations commémoratives au sixième mois après l’explosion. Il s’est tout de même trouvé quelques ouvriers d’AZF pour porter dans les deux manifestations une même banderole signée « des salariés d’AZF » sur laquelle on pouvait lire : « Tous ensemble, exigeons de Total salaire et emploi à Toulouse ».

Maintenant que la fermeture de l’usine AZF a été annoncée, il est d’autant plus urgent que cette exigence d’un garantie de salaire et d’emploi sur Toulouse soit affirmée par les travailleurs de Grande Paroisse-AZF. Il y a urgence à défendre, non pas l’avenir de la chimie, mais l’avenir des travailleurs qui doit être assuré quels que soient les choix industriels qui sont faits. C’est ce combat là, qui est la défense des propres intérêts des travailleurs, qui peut leur valoir la solidarité des sinistrés et plus largement de la population de Toulouse.

Le 6 mai 2002

Vincent TIVOLI

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