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DOSSIER : Spéculation immobilière et crise du logement : la grande arnaque du « tous propriétaires »

Dans la banlieue lyonnaise : la mixité sociale en guise de cache misère

Mis en ligne le 15 juin 2011 Convergences Société

En matière de logement et, plus particulièrement autour de l’usine à gaz de la « politique de la ville », il est de bon ton d’opposer depuis une vingtaine d’années deux notions : la mixité sociale serait censée répondre tout naturellement aux affres de la ghettoïsation, inhérente à la construction de grands ensembles durant les années 1960 et 1970 qui répondait alors à une très grande crise du logement.

Ce serait d’une part dans la structure même de l’habitat (les grandes barres et/ou les grandes tours) et, d’autre part, dans l’homogénéité des populations qui y vivent qu’il faudrait trouver la source de tous les problèmes des quartiers populaires des banlieues françaises.

Il suffirait d’a­bat­tre ces grands ensembles puis de reconstruire des immeubles plus petits mais, surtout, disposant de prestations plus élevées et donc de loyer plus chers, dans le but avoué de recomposer la population des quartiers pour que, tout à coup, le très faible niveau des revenus, le manque de mo­yens dans les transports, dans l’éducation, la santé, les services publics en général, le poids écrasant du chômage, bref pour que toutes les plaies entretenues par la gestion capitaliste de la société s’envolent par magie. Voilà en somme le remède de la mixité sociale.

Mais, derrière cette vision idyllique et consensuelle des bienfaits des Grands projets de ville (GPV), dernier avatar technocratique qui sert à multiplier les partenariats et les financements, se cachent bien souvent des réalités économiques et sociales bien plus prosaïques.

À titre d’exemple, quatre de ces « Grands projets de ville » sont actuellement à l’œuvre dans l’agglomération lyonnaise : la Duchère (dans le 9e arrondissement de Lyon), Vaulx-en-Velin, Vénissieux et Rillieux-la-Pape : des quartiers ou des communes très populaires, comptant un très fort pourcentage (autour de 80 %) de logement social et connus à l’échelle locale et nationale pour des révoltes ponctuelles (de la marche des Beurs des années 1980 démarrée aux Minguettes aux émeutes du Mas-du-Taureau en 1990). Les chiffres fournis par le GPV de la Duchère sont édifiants et ne permettent guère de doute sur les objectifs réels de la municipalité : faire passer le pourcentage de logements sociaux de 80 à 55 %, avec quelque 600 millions d’euros de budget global (dont seulement 10 % accordés aux équipements publics).

Mais ces projets pharaoniques rencontrent quelque fois le scepticisme des habitants, comme ce militant associatif de la Duchère, à propos de la mixité sociale : « Si je dis que c’est un cache-misère, c’est qu’on voit bien qu’à tra­vers ce thème qui semble assez consen­suel se cache une poli­ti­que qui fait main basse sur le fon­cier. C’est-à-dire que le loge­ment social a beau­coup de mal à trou­ver des ter­rains pour se cons­truire. Or qu’est-ce qui se passe aujour­d’hui ? On brade le ter­rain sur lequel il y avait du loge­ment social pour des créa­tions de rési­den­ces de pro­mo­teurs privés en vue de faire de la copro­priété pour des gens de reve­nus somme toute moyens, mais « moyen-plus » plutôt. Ce qui veut dire qu’on homo­gé­néise sans doute la popu­la­tion par rap­port à l’envi­ron­ne­ment mais, ce fai­sant, on éjecte de ce quar­tier un cer­tain nombre de loca­tai­res qui ne retrou­ve­ront véri­ta­ble­ment d’autres loge­ments que dans des péri­phé­ries un peu plus éloignées. »

Il arrive également que les locataires, trop attachés à leur quartier, trop installés et depuis trop longtemps, refusent les solutions de relogement soumises par les pouvoirs publics. Car même délabré, et surtout quand il est déserté par les services publics, c’est finalement ce quartier qui fournit les réseaux d’entraide minimum. Le relogement est synonyme de pertes de relations sociales avec des voisins, des amis. C’est alors tout un éventail de pressions qu’ils doivent se préparer à subir (menaces sur le titre de séjour, proposition de relogement inacceptable).

On comprend pourquoi le degré d’organisation des habitants devient déterminant pour s’immiscer dans les objectifs des GPV ou pour obtenir de meilleures conditions de relogement (dans le quartier ou ailleurs).

Philippe CAVÉGLIA

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Numéro 76, juin-juillet 2011