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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 13, janvier-février 2001

Poutine : offensive contre les travailleurs russes

Mis en ligne le 1er février 2001 Convergences Monde

Vladimir Poutine veut porter un nouveau coup aux travailleurs russes par l’instauration d’un nouveau Code du Travail... Ce projet avait déjà été présenté il y a deux ans devant la Douma mais repoussé, l’opposition y étant alors majoritaire. L’actuelle Douma est beaucoup plus docile aux projets de Poutine, cela dit, le projet a, une fois de plus, dû être reporté après de fortes mobilisations des travailleurs russes dans tout le pays le 17 mai et surtout le 1er décembre 2000.

Jusqu’ici, c’est le Code du Travail hérité de la période soviétique qui est officiellement en vigueur même s’il n’est pas souvent appliqué (le non-paiement des salaires en est la violation la plus flagrante).

Le nouveau Code vise à priver les travailleurs de tous leurs droits face aux patrons. Il a pour objectif déclaré de mettre en accord la législation du travail « avec les exigences de l’économie de marché », ce qui revient à donner tous les droits aux employeurs qu’il s’agisse des salaires, des licenciements, des conditions de travail. La durée d’une journée de travail peut passer de 8 à 12 heures. Sont autorisés sans limitation de durée et sans précision de rémunération : les réductions unilatérales du temps de travail, les mutations, les remplacements, les emplois temporaires. La législation concernant le travail des femmes (très contraignante dans le Code actuel) est remise en cause. Les employeurs obtiennent le droit de ficher leurs salariés. Enfin, le rôle des syndicats et leur protection légale sont presque réduits à néant.

Dix ans de régression sociale

Cette réforme apparaît dans une situation où les conditions de vie de la classe ouvrière n’ont cessé de se dégrader depuis dix ans. Les réformes brutales entreprises l’ont été de pair avec une crise économique et sociale sans précédent : fermeture massive des entreprises, hausse des prix, salaires non payés (en mars 2000, la dette salariale s’élevait à 44 milliards de roubles, soit 9 milliards de francs), dégradation des systèmes de santé et d’éducation. L’immense majorité de la population a basculé dans la misère (au moins 35 % de la population vit aujourd’hui au dessous du seuil de pauvreté, fixé à 200 francs par mois !) et est condamnée à des logiques de survie au quotidien. A la fin de l’URSS, le salaire moyen représentait à peu près 20 % du salaire moyen en Europe de l’ouest, aujourd’hui... 1,5 %

Le mouvement syndical

Celui-ci est essentiellement composé de la Fédération des syndicats indépendants (FNPR), héritière directe des syndicats officiels de la période soviétique. Plus de 80 % des travailleurs syndiqués (40 millions d’adhérents). Rallié totalement à l’économie de marché, son appareil se pose en partenaire responsable des autorités et a apporté son soutien électoral à Poutine.

A côté existent de nouveaux syndicats de deux sortes :

– des syndicats apparus dans le sillage de la grande grève des mineurs de 1989, en rupture avec la pratique des anciens syndicats. Ils sont regroupés dans deux confédérations en voie de rapprochement, la Confédération du Travail de Russie et la Confédération Russe du Travail. Liés à l’AFL-CIO, syndicats de branches ou de grosses entreprises, ils développent des pratiques le plus souvent corporatistes.

– la fédération Zachita Truda (« Défense du Travail »), revendique 20 000 membres, et est surtout implantée dans la région d’Astrakhan, Moscou et Iaroslav. Elle défend l’idée d’un syndicat de combat et d’une opposition intransigeante au pouvoir en place comme le font les Comités Ouvriers de Russie, une organisation moins importante qui regroupe des soviets ouvriers dans plusieurs régions de Russie. Ce sont les premières structures à avoir dénoncé le nouveau Code du Travail.

Les informations ci-dessus sont extraites du « Messager syndical », bulletin d’information diffusé en France, donnant régulièrement des informations sur la situation des travailleurs et du mouvement syndical russe.

Quelques extraits comparatifs des modifications touchant le code du travail.

Code du travail actuel Projet gouvernemental
Emploi Contrats précaires Limités à 3 cas. Portés à 10 cas, dont « l’augmentation temporaire de la production ou des services ».
Réduction de personnel Priorité d’emploi garantie pour 9 catégories de travailleurs. Ramenée à 4 catégories. Les exclus : les très anciens, les reclassés de Tchernobyl, les épouses d’anciens combattants...
Licenciement L’employeur peut licencier dans 7 cas. Dans 17 cas, dont « la divulgation de secret commercial ».
Rémunération Travail de nuit Majoré de 100 % Majoré de 20 %
Horaires de travail Heures supplémentaires Dans 5 cas, avec l’accord des syndicats. Limitées à 4 h tous les deux jours, 120 h par an. Portées à 4 h par jour, 12 h par semaine, 120 h par an, sans accord syndical. Si « accord du travailleur » 16 h par semaine, 832 h par an.
Travail des femmes Travail de nuit interdit aux femmes enceintes et mères de jeunes enfants. Equipes de nuit réglementées pour les femmes. Congé maternité payé jusqu’à 18 mois, sans solde jusqu’à 3 ans. Autorisés : le travail de nuit et l’envoi en mission des mères de jeunes enfants, le travail de nuit des femmes enceintes. Congé maternité ramené à 18 mois.
Droit syndical Avis décisif sur les licenciements collectifs, ceux des militants syndicaux, sur les planning de travail en équipes, les heures supplémentaires, les grilles de salaires. Existence d’une commission des conflits du travail élue par le personnel. L’avis décisif devient consultatif, le licenciement des élus est soumis à l’inspection du travail. Instauration d’amendes aux syndicats refusant de transmettre certaines informations. 50 % des membres de la commission des conflits sont nommés par la direction.
Listes noires L’employeur peut réunir les informations sur les salariés, y compris sur leur vie privée, syndicale et politique.

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