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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 67, janvier-février 2010

La Poste : 17 jours de grève des facteurs à Paris 15

Mis en ligne le 16 février 2010 Convergences Entreprises

Après 17 jours de grève, les facteurs du centre de distribution du quinzième arrondissement de Paris ont arrêté leur mouvement le 30 janvier.

25 suppressions d’emplois

Le personnel exprimait sa colère face à une énième réorganisation de la distribution. Celle-ci, annoncée pour le 15 février, prévoyait 25 suppressions d’emplois et l’instauration de la « sécabilité », c’est-à-dire le remplacement des facteurs entre eux en cas d’absence. La même réorganisation, déjà mise en place dans plusieurs arrondissements parisiens, doit toucher l’ensemble des centres dans les prochains mois. Elle se traduit par 10 % de suppressions des effectifs.

Une grève active

Jusqu’à présent Paris 15 avait la réputation d’un centre « qui ne bouge pas » et, pour beaucoup de jeunes factrices et facteurs, il s’agissait de leur première grève. Cette grève a été marquée par un réel dynamisme des grévistes. Tous les jours, dès 6 heures du matin, malgré la pluie et le froid, de 50 à 60 grévistes se réunissaient à l’entrée (la direction ayant interdit l’accès au centre) devant une table avec café, thé et gâteaux. La discussion avec les non-grévistes a permis d’en gagner certains à la lutte. Car, si la grève a été suivie en permanence par un « noyau dur » de 70 à 80 personnes, au total ce sont près de 150 facteurs (soit plus de la moitié) qui ont fait grève au moins une journée, malgré les pressions de la direction. Tous les matins avait lieu une AG bruyante et joyeuse où chaque gréviste avait la possibilité de s’exprimer et où étaient décidées les actions de la journée.

Des tentatives d’extension

Le 13 janvier, pour les mêmes motifs, à l’appel de Sud, des grèves ont été déclenchées à Paris 11 et Paris 7 mais n’ont pas duré. Le 14 janvier, le centre de distribution de Paris 20 démarrait à son tour à l’appel de la CGT, Sud et la CFDT, pour reprendre le travail au bout de huit jours de grève en ayant obtenu deux emplois et l’arrêt de la sécabilité « inopinée » (le remplacement des absences non prévues) jusqu’à la fin de l’année.

Le 18 janvier, le centre de Paris 6 partait en grève mais les grévistes, minoritaires, décidaient de reprendre le travail au bout de trois jours.

Des jonctions ont eu lieu à plusieurs reprises entre les grévistes des différents centres, soit devant Paris 15 soit devant la DOTC (Direction Opérationnelle de Traitement du Courrier).

Quand ils sont restés seuls dans l’action, les grévistes de Paris 15 ont continué à s’adresser à leurs collègues, en organisant des visites surprises, avec distributions de tracts et prises de parole, accompagnées de collectes, dans différents bureaux de postes du 15e arrondissement et aux centres de distribution de Paris 14 et Paris 16. Même si leurs collègues n’osaient pas toujours cesser le travail pour venir écouter les prises de parole car, à chaque fois, directeurs, cadres et huissiers étaient présents, nombreux sont ceux qui ont manifesté leur soutien dans les discussions individuelles ou en donnant à la collecte.

Recul de la direction

La direction avait systématiquement refusé de négocier depuis le début du conflit, affirmant dans la presse que le courrier était distribué normalement, alors que le courrier en souffrance s’accumulait, malgré le fait que des cadres, déguisés en facteurs, partaient faire les tournées et que l’on avait fait appel au « Centre d’entraide » (surtout utile en cas de grève).

Cependant, après une quinzaine de jours, devant la détermination des grévistes, la direction a été contrainte de commencer à reculer. Dans un premier temps, elle a proposé des « aménagements » de la réorganisation, tout en refusant de revenir sur les suppressions d’emplois. À la quasi-unanimité, les grévistes ont rejeté ces propositions. La directrice de la DOTC a alors fait parvenir, par coursier (preuve que la distribution était bien perturbée !) à chaque gréviste un courrier affirmant : « Sachez que ceux qui vous disent que la DOTC reviendra sur les positions de travail supprimées dans le cadre de la réorganisation se trompent ». Et, compatissante, elle ajoutait : « La poursuite du conflit se fait désormais uniquement à votre détriment étant donné la perte lourde de salaire qui est déjà la vôtre aujourd’hui et qui correspond maintenant à un demi-mois. J’en appelle donc à votre raison pour reprendre le chemin du travail ».

Cette lettre provocatrice eut pour résultat de doper la colère des grévistes qui ont voté la continuation de la grève. Dès le lendemain, le directeur du centre proposait de nouvelles négociations en annonçant : la « réinjection » de cinq emplois (quatre tournées piétonnes et une ligne motorisée) sur les 25 suppressions prévues ; le maintien du volontariat compensé, à raison d’une heure de repos compensateur par jour pour la sécabilité inopinée ; la limitation à cinq semaines (au lieu de six prévues au départ) de la sécabilité imposée en juillet-août ; le paiement de quatre jours de grève ; l’étalement des retenues de grève à raison de deux jours par mois ; deux jours de congés, pour compenser la réorganisation, à l’ensemble du personnel.

Une fin de grève… tous unis pour la prochaine

Le lendemain, samedi 13 janvier, après débats sur ces propositions que tous considéraient comme insuffisantes, un vote donnait une courte majorité en faveur de la poursuite de la grève. Cependant, le personnel pensant ne pas pouvoir continuer le mouvement sans perspectives d’élargissement aux autres centres dans l’immédiat, a fini par décider de reprendre le travail. Les grévistes n’ont certes pas obtenu une victoire complète mais ont contraint, finalement, la direction à reculer. Beaucoup ont fait à cette occasion l’apprentissage de la lutte, de la solidarité et c’est sans doute le principal acquis de ce conflit.

31 janvier 2010 Thierry FLAMAND


La « sécabilité », c’est quoi ?

Il s’agit d’une véritable machine de guerre contre les conditions de travail.

Pour pallier les absences (congés, maladie, etc.), chaque établissement courrier dispose en principe d’un volant de remplacement. Ce volant étant de plus en plus réduit du fait des suppressions d’emplois, la Poste veut donc couvrir les absences inopinées ou prévues (par exemple congés en juillet-août) en coupant en trois les tournées et en répartissant la charge de travail entre les autres facteurs du secteur, ce qui se traduit par un allongement des tournées.

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