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Espagne : Après la poussée de colère contre l’austérité, le somnifère électoral

Mis en ligne le 9 décembre 2015 Convergences Monde

Le 20 décembre, auront lieu en Espagne les élections « générales », législatives, qui décideront de la couleur du prochain gouvernement. Depuis 1982, ce sont deux grands partis qui se succèdent au pouvoir : à gauche, le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) et à droite, le Parti populaire (PP). Le panorama politique est aujourd’hui bien différent.

En 2011, la crise économique et ses graves conséquences sociales avaient suscité le mouvement des Indignés. La détermination des jeunes qui occupaient les places avait changé l’ambiance et des mobilisations importantes ont marqué les années suivantes (mouvements contre les expulsions, de défense de l’éducation ou de la santé publique, importante manifestation des « marches de la dignité » en 2014, etc.).

Depuis, il y a eu l’émergence de Podemos, un nouveau parti mené par Pablo Iglesias, se plaçant dans le sillage des Indignés et des mobilisations sociales, et qui a créé la surprise en obtenant 8 % aux élections européennes en 2014. Ainsi les échéances électorales se sont mises au devant de la scène pour ceux qui s’étaient mobilisés dans la rue. La politique de Podemos n’y était pas pour rien, puisque Pablo Iglesias se donnait comme objectif unique la victoire aux élections générales de décembre 2015. Une perspective qui semblait confirmée par certains sondages qui donnaient, début 2015, Podemos en tête. En janvier dernier, à quelques jours de la victoire électorale de Tsipras en Grèce, Podemos parvenait à réunir des centaines de milliers de personnes à Madrid pour annoncer que le « changement » serait aussi pour bientôt en Espagne.

Mais après l’euphorie le chemin de Podemos vers le pouvoir s’est avéré plus difficile. Les élections municipales et régionales de juin dernier ont été en demi-teinte. Dans de nombreuses villes et pas des moindres (Madrid, Barcelone, Saragosse, Cadix, etc), les listes soutenues par Podemos remportaient les mairies. Mais aux régionales, Podemos réalisait des scores entre 10 et 20 %, loin des espoirs de ses dirigeants. PP et PSOE apparaissaient très affaiblis, mais ne s’effondraient pas.

Un autre parti « nouveau », né en 2006, le parti Ciudadanos (Citoyens) émergeait. Clairement à droite, il se présente comme un parti immaculé, pas touché par la corruption, mais raisonnable et réaliste, à la différence de Podemos, explique-t-il. Il a bénéficié d’une large couverture médiatique, dans ce qui tient d’une opération pour contrer la montée de Podemos.

Aux élections catalanes de septembre 2015, marquées par les débats autour de l’indépendance (voir notre article plus loin), la liste soutenue par Podemos a obtenu 9 % seulement, alors que Ciudadanos faisait près de 18 %.

La campagne électorale bat aujourd’hui son plein. Au lieu de la classique course entre deux rivaux il y aura cette fois un quarté de tête (PP, PSOE, Ciudadanos, Podemos), au sein duquel l’ordre d’arrivée n’est pas donné d’avance ! Et après les élections, il y aura sûrement un jeu compliqué pour constituer des alliances qui permettraient à un gouvernement de disposer d’une majorité au congrès des députés. Pour l’heure, l’ambiance de la campagne donne le champ libre aux partis conservateurs, avec le thème catalan omniprésent, sur la musique de la patrie espagnole menacée par l’ennemi intérieur, et, depuis les attentats de Paris, celui de la lutte contre le terrorisme djihadiste. L’expérience Tsipras, que Pablo Iglesias a soutenu, y compris après qu’il ait cédé aux injonctions de l’Union européenne, ainsi qu’un recul certain des mobilisations sociales, ne jouent pas non plus en faveur de Podemos.

Il est certainement trop tôt pour pronostiquer les résultats. Mais ce qui est surtout remarquable, c’est que la campagne de Podemos, placée sous le slogan général de « Un pays avec toi », est marquée par son recentrage, pour se donner une image de parti de gouvernement. Parmi ses candidats mis en avant, Julio Rodriguez, général à la retraite, ancien pilote de chasse, qui était chef d’état-major entre 2008 et 2011 (auprès du chef de gouvernement socialiste Zapatero). Tout un symbole ! Le programme de Podemos prévoit juste de monter le salaire minimum à 800 €, au bout de deux ans de mandat. La précarité des emplois est dénoncée, mais seuls des plans progressifs de résorption sont proposés. Et aux oubliettes, l’interdiction des licenciements qui était à son programme en 2014 ! La seule promesse sociale tangible est la mise en place d’un revenu de base, sorte de RSA, de 600 € pour une personne seule, qui serait financé par un impôt sur le revenu plus progressif, qui ferait davantage payer les plus riches. Est-il dit.

26 novembre 2015, Michel CHARVET

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Numéro 102, novembre-décembre 2015

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