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DOSSIER : À propos des vaccins contre le Covid-19

L’innovation des vaccins à ARN messager

Mis en ligne le 17 janvier 2021 Convergences

Remarque : ceci est la version raccourcie pour publication dans le numéro 135 de Convergences révolutionnaires imprimé. On peut consulter la version complète sur cette page

L’ARN messager (ARNm) : une molécule au cœur du fonctionnement du virus SARS-Cov2

Le virus SARS-Cov2 appartient à la famille des coronavirus, qui sont des virus à acide ribonucléique, ou ARN. La fameuse protéine S présente à sa surface agit comme un crochet qui lui sert à s’arrimer à un récepteur de la cellule humaine à l’intérieur de laquelle il libère son ARN, qui détournera alors la machinerie cellulaire : au lieu de fabriquer les protéines de la cellule, ses milliers de ribosomes – les usines de production cellulaire – se mettront alors à produire en masse des millions de nouvelles particules virales. Celles-ci s’échapperont ensuite de la cellule à la recherche d’autres cellules à infecter.

Dans le cadre du vaccin à ARN, un fragment d’ARN messager codant pour la protéine S est injecté dans les cellules qui vont donc les traduire en protéine S. Les protéines S produites s’échappent ensuite de la cellule et rencontrent les cellules immunitaires qui patrouillent dans notre organisme. De ce contact naîtront, au bout de quelques jours à peine, les anticorps circulants qui permettront de bloquer à l’avenir le vrai microbe. C’est l’immunité dite humorale.

Mais ce n’est pas tout. Quelques protéines S restent dans la cellule, et un échantillon d’entre elles sera présenté à la surface de la cellule, comme une « mémoire moléculaire » de l’infection. Ce mécanisme permet aux cellules immunitaires appelées lymphocytes T, ou cellules tueuses, de s’attaquer aux antigènes multiples de la protéine S dès qu’ils se présenteront à nouveau dans l’organisme. C’est ce qu’on appelle l’immunité cellulaire.

En activant ces deux formes d’immunité, l’immunité humorale et cellulaire, ces vaccins pourraient se révéler plus efficaces et plus durables que les autres types de vaccins.

C’est la première fois qu’on utilise la technologie à ARNm pour un vaccin destiné à être utilisé massivement, mais cela fait des années que des chercheurs, notamment issus du monde de la recherche universitaire, ont travaillé sur le développement de telles méthodes de vaccination [1]. En l’absence de maladie menaçant l’économie des puissances capitalistes, ni les gouvernements, ni les grands laboratoires pharmaceutiques ne voyaient l’intérêt d’investir là-dedans, malgré les nombreuses alertes des épidémiologistes depuis l’émergence des virus SARS en 2003 [2].

Les essais cliniques des vaccins à ARNm

Les essais cliniques sont une méthode scientifique mise au point afin de déterminer l’efficacité réelle d’une molécule sur un organisme. Ils visent à éliminer au maximum les biais dus à l’effet placebo, et à identifier les effets secondaires dus à cette molécule.

Les essais cliniques actuellement utilisés sont constitués de trois phases [3] et réalisés par une méthode que l’on appelle « randomisée en double-aveugle ». L’étude clinique est menée sur deux groupes dont les membres ont été répartis aléatoirement (« randomisée »), dont l’un reçoit la molécule dont on cherche à tester l’efficacité et l’autre un placebo. Ni les personnes qui administrent le traitement, ni celles qui le reçoivent ne savent si elles ont la molécule ou le placebo (« double-aveugle »).

Les résultats en apparence encourageants des vaccins à ARNm

Moderna et BioNTech ont tous les deux annoncé que leurs vaccins présentaient une efficacité d’environ 95 %, ce qui correspond au fait que le nombre de patients tombés malades dans le groupe traité représentait 5 % du nombre de patients tombés malades dans le groupe placebo. Par ailleurs, non seulement le nombre de patients infectés était notablement plus faible, mais, de plus, le nombre de formes graves parmi les 5 % de malades infectés a été diminué dans le groupe traité.

Les effets secondaires notés sur le groupe traité ont été fièvre, fatigue, douleur locale, maux de tête, etc., soit le même type que ceux du groupe placebo. Ils étaient en revanche un peu plus nombreux dans le groupe traité, mais moins nombreux que dans le cas du vaccin contre la grippe.

Des zones d’ombre encore présentes

On observe d’une part assez peu d’apparitions de formes graves de la maladie dans les deux groupes, il est donc difficile de conclure sur une diminution significative des formes sévères de la maladie au sein du groupe traité.

D’autre part, les populations les plus à risque de contracter une forme grave de la maladie ne sont pas fortement représentées dans les deux groupes, par exemple les patients de plus de 75 ans, alors qu’ils représentent l’immense majorité des décès dus à la Covid-19.

Enfin, le seul facteur de comorbidité, c’est-à-dire les maladies associées qui peuvent engendrer une réaction plus sévère à la Covid-19, présenté dans ces études est l’obésité ou le surpoids. Il n’y a donc aucune donnée non plus sur les populations avec d’autres facteurs de comorbidité, notamment les personnes avec des problèmes respiratoires, ou avec des allergies pré-existantes. Pourtant, ce sont toutes ces populations qui sont les cibles prioritaires de la stratégie de vaccination du gouvernement.

Les effets secondaires présentés sont les effets « classiques » des vaccins injectés, généralement bénins et de courte durée – il n’y a bien entendu aucun recul sur les effets secondaires à long terme. Précisons néanmoins que les craintes liées à une modification du génome par l’ARN du vaccin sont infondées, car l’ARN est une molécule instable qui est détruite avant de pouvoir interagir avec notre ADN. En revanche, on n’est pas à l’abri d’éventuels effets secondaires « à retardement » d’une autre nature, par définition impossibles à prévoir.

Il reste qu’on ne sait pas quelle est la durée de l’immunité conférée par ce vaccin et donc s’il faudra se faire vacciner régulièrement, comme pour la grippe. Ensuite, on ne sait pas si les personnes vaccinées par ce nouveau traitement seront toujours contagieuses pour les autres et donc s’il faudrait toujours appliquer les gestes barrières et la distanciation physique.

Enfin, l’arrivée des variants apparus en Angleterre et en Afrique du Sud est une source d’inquiétude sur l’efficacité des vaccins devant ces nouvelles formes du virus.

Un développement exceptionnellement rapide

Ce vaccin a pu être développé en moins d’un an : un temps de développement sans commune mesure avec les décennies nécessaires à celui d’autres vaccins, qui s’explique à la fois par le progrès technique majeur qu’est la technologie des vaccins à ARNm et par l’accélération des démarches par les différentes autorités de santé.

Par ailleurs, rappelons que la phase de recherche et développement de ces nouveaux vaccins avait déjà été anticipée par la recherche publique, universitaire. Il ne « restait plus » qu’à passer à une dimension de production industrielle. Par comparaison, le vaccin en cours de développement par Sanofi, qui repose sur une stratégie thérapeutique « classique » et non sur la méthode ARNm, est annoncé pour fin 2021, une date bien plus cohérente avec les délais évoqués initialement.

De plus, ces vaccins sont passés « en priorité » devant tous les autres traitements en attente de validation par les différentes agences de surveillance pharmaceutique. De longs mois ont également pu être économisés à ce niveau-là.

En tout état de cause, si cette nouvelle forme de vaccination parvient à éradiquer le Covid-19 – et, au vu des résultats scientifiques, il y a de réelles raisons objectives à le croire –, la pandémie serait terminée seulement un an après sa propagation à l’ensemble de la planète. Force serait alors de constater que, quand les capitalistes décident de mettre en ordre de marche leur société pour un but commun, les moyens humains déployés sont capables d’accomplir des choses difficilement imaginables. De quoi laisser songeur sur les capacités d’une société qui serait débarrassée des parasites qui la dirigent et du carcan de la recherche déraisonnée de profit.


[1Katalin Kariko, par exemple, travaille sur l’utilisation thérapeutique de l’ARN à l’Université de Pennsylvanie depuis 1995. Voir à ce sujet « Covid-19 : la saga du vaccin à ARN messager désormais dans le sprint final », lemonde.fr, 30/11/2020.

[2En 2009, il y a bien eu une campagne de vaccination massive contre la grippe H1N1, mais l’échec de celle-ci, faute d’épidémie effective, et les retombées politiques qui s’en sont suivi ont d’autant plus refroidi les gouvernements de miser sur ce genre de stratégies, par souci électoraliste.

[3 La phase I a lieu sur un petit nombre de volontaires afin de voir s’il y a vraiment une action de la molécule. La phase II a lieu sur quelques centaines de volontaires afin de déterminer la dose utile du traitement nécessaire. La phase III a lieu sur plusieurs milliers de volontaires afin de valider l’efficacité du traitement et d’identifier les potentiels effets secondaires.

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Numéro 135, janvier 2021