L’imprimerie face aux restructurations
Mis en ligne le 1er février 2001 Convergences Entreprises
Comme beaucoup de branches, le secteur de l’imprimerie de labeur – déjà très concentré puisqu’environ 1 % des imprimeries regroupe 1/3 des salariés – connaît un mouvement de fusions. Récemment, le numéro un mondial, Québécor, un groupe canadien qui comptait déjà 115 sites répartis sur 14 pays avec 26 000 salariés, a dépensé 2,7 milliards de dollars pour racheter le groupe World Color Press. Pour être rentable, le matériel qui vaut des dizaines de millions de francs doit être utilisé non-stop. Les grosses imprimeries de labeur (c’est-à-dire tout ce qui n’est pas l’impression des quotidiens) tournent donc 24 h sur 24.
L’accord 35 H signé par la CGT (le principal syndicat) n’a pas amélioré la situation pour les salariés. Comme dans beaucoup de secteurs, la RTT s’est posée dans des conditions défavorables pour les salariés. Rappelons que l’accord de branche posait problème dès le départ puisqu’il se contentait de fixer quelques grands principes et laissait l’essentiel des négociations se faire entreprise par entreprise. Sur la question des embauches, le texte n’était pas très contraignant pour les patrons puisque les entreprises étaient « invitées (!) à privilégier le recours aux CDI ».
La grève à l’Imprimerie Nationale au mois de novembre 2000 a néanmoins montré que les salariés n’étaient pas prêts à se laisser faire. Alors qu’il n’y avait pas eu d’augmentation de salaires depuis 4 ans, la direction du groupe proposait 0,75 %, soit environ 60 F sur un salaire de 8000 F. Parti d’un seul site, le mouvement s’est étendu aux autres usines de l’Imprimerie Nationale. Les ouvriers du site d’Evry (Essonne) réclamaient aussi des embauches pour faire face à l’augmentation du temps de fonctionnement des machines. Ainsi les machines qui tournent déjà 24h sur 24 mais seulement en semaine fonctionneront le samedi.
Après deux semaines de grève, les salariés ont obtenu 2,2 %, soit moins que les 500 F brut réclamés mais évidemment plus que ce que la direction proposait au départ. Par ailleurs le mouvement a permis de modifier un point important de l’accord concernant le paiement du temps de chevauchement (passage des consignes entre deux équipes). C’est un recul de la direction mais qui ne change pas grand-chose sur le fond dans le sens où le chevauchement permet aux rotatives de ne pas s’arrêter et donc représente un gain de productivité énorme. Cette grève, la plus dure qu’aient connu les salariés depuis 1968, a permis de faire reculer la direction par rapport au cadre d’un accord qu’elle tenait pour acquis.
Le 27 Décembre 2000, Luciano MALDINI
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