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Après les élections

Fin de péripéties électorales, et maintenant ?

Mis en ligne le 8 juillet 2022 Convergences Politique

Bilan des législatives

Les résultats des législatives ont mis en lumière le désaveu de Macron puisque les formations qui le soutiennent ont perdu 1,4 million de voix par rapport à 2017. D’où un certain embarras du pouvoir : Macron devra sans doute composer avec des députés LR, voire marchander avec ceux de son propre camp, les Bayrou ou Édouard Philippe rendus plus gourmands par l’affaiblissement du parti présidentiel. Pour avoir les coudées franches, il a fait appel au sens des responsabilités des dirigeants des partis d’opposition. Sans succès jusqu’à aujourd’hui. Mais tout le monde a noté la disponibilité affichée, pour plus tard et sous condition disent-ils, aussi bien de Jadot, que du PS et de Fabien Roussel qui rappelle que le PCF, parti responsable, a gouverné avec de Gaulle. Et il n’a pas fallu quinze jours pour que la Nupes s’affiche ouvertement pour ce qu’elle est : une alliance électorale dont chacun reprend vite ses billes.

Les institutions de la Ve République, taillées pour assurer une majorité stable au président élu, ont joué cette fois à l’envers. Mais les spéculations sur la « crise de la démocratie » ou de ses institutions sont sans intérêt : le système (que les constitutionnalistes chercheront peut-être à améliorer pour la prochaine fois) a bien des cordes à son arc. Entre gouvernement de coalition, d’union nationale, ou simples alliances au coup par coup, voguera la galère. Le fait de ne disposer que d’une majorité relative, ne va pas empêcher Macron – président des riches et des patrons – de développer dans leur intérêt une politique anti-ouvrière.

Une chose est certaine, c’est que s’ils reculent demain sur les retraites, ce sera par crainte des réactions dans la population. Certainement pas sous pression de « batailles » parlementaires : pour s’en prendre aux travailleurs, Macron trouvera toujours à droite et à l’extrême droite, voire « à gauche », l’appui des quelques dizaines de députés qui lui manquent. D’autant que cet appui peut se faire discret… La seule absence d’une partie des députés de l’opposition, en abaissant le seuil majoritaire, peut permettre aux macronistes de faire passer leurs lois. Bref, ce n’est pas le fait d’avoir été « mal élu », ou de ne disposer que d’une majorité relative, qui empêchera Macron de développer une politique anti-ouvrière. Il faut le dire et le répéter, seules les mobilisations, les luttes grévistes seront capables de le faire reculer.

Progression de l’extrême droite

Elle est spectaculaire mais ne focalisons pas sur le nombre de ses députés (qui lui donne entre autres de plus grands moyens humains et financiers). Le résultat du RN est cette fois plus proportionnel au nombre de ses voix, et c’est là le fait marquant : le FN/RN obtient au premier tour 4 250 000 voix, soit près d’une fois et demie ses voix de 2017. Et, si l’on ajoute les voix de Debout la France et de Reconquête, l’extrême droite fait plus que doubler son score entre 2017 et 2022. Le RN réalise d’excellents scores dans les quartiers populaires, y compris en Seine-Saint-Denis, confirmant un ancrage dans les grandes villes, autrement dit dans le prolétariat au sens large.

Si nous n’en sommes pas à la constitution d’un parti de type fasciste, c’est que la bourgeoisie n’en a pas manifesté le besoin jusqu’à maintenant. Même si, à l’ombre des discours policés qu’ont choisis les chefs du RN (sans jamais abandonner leurs crachats et venin anti-immigration), des groupes d’activistes prolifèrent et vont sans doute chercher à souder et former leurs recrues. Il faut savoir que si la situation sociale se durcit (et elle en prend le chemin), le risque est grand que des nervis d’extrême droite s’attaquent aux activités publiques de militants et courants politiques et syndicaux, de gauche comme d’extrême gauche, et viennent faire le coup de poing devant des entreprises en grève (même si nous n’en sommes pas là pour le moment).

La Nupes, à gauche, simple somme de ses parties

Malgré les rodomontades des leaders des partis regroupés dans la Nupes, ce regroupement passe de 6,2 millions de voix en 2017 (si on fait le total des voix recueillies alors par ses composantes) à 5,8 millions pour la Nupes, ou 6,5 millions si on ajoute à la Nupes les résultats des candidats « divers gauche » qui sont essentiellement ces socialistes qui se sont présentés hors Nupes voire contre elle. Vu l’imbroglio à gauche, la comparaison n’est pas facile à faire, mais elle indique une stagnation plutôt qu’une progression.

Les leaders de la Nupes se plaignent d’avoir été davantage victimes de l’abstention que la droite, pointant le fait que, dans le département le plus pauvre du pays, la Seine-Saint-Denis, le taux d’abstention dépasse 60 % – considérant les abstentionnistes des quartiers populaires comme des électeurs en quelque sorte naturels de la Nupes… Mais les plus anciens de ces électeurs populaires n’ont peut-être pas oublié les reniements et la politique anti-ouvrière des Mitterrand, Jospin ou Hollande. Quant aux jeunes de ces quartiers, force est de constater que l’innovation Nupes ne les a pas motivés.

La gauche n’a que peu mobilisé l’électorat populaire, indépendamment d’un certain regain de vigueur des milieux militants qui en espéraient un succès. Le seul changement notable à gauche réside donc dans les rapports de force en son sein. Mélenchon a réussi son pari d’en devenir la principale force. Même si déjà sa proposition de former un groupe parlementaire unique a essuyé un refus, chacun préférant garder ses propres billes.

Du côté du monde du travail et des directions syndicales ?

Sur le terrain social la colère est là et s’exprime dès qu’elle le peut, entre autres dans des grèves pour des augmentations de salaire face à l’inflation. Nous n’en sommes pas à une explosion, du style des Gilets jaunes de 2019-2020. Ni à une colère explosive qui verrait les grèves se répandre, se coordonner et devenir, de ce fait, politiques. Mais il sera indispensable que les révolutionnaires soient en mesure d’intervenir dans une telle situation, d’y impulser une coordination des luttes, leur organisation par les travailleurs eux-mêmes. Car les confédérations syndicales se sont mises aux abonnés absents. Quand elles n’appellent pas, comme Laurent Berger de la CFDT, Macron à convoquer avec elles un « grand rendez-vous social ». Pour préparer leurs prochaines mesures anti-ouvrières, patronat et gouvernement veulent des syndicats « de concertation » et les directions syndicales ne demandent pas mieux que de l’être.

Les militants qui souhaitent construire un parti révolutionnaire n’ont donc rien à gagner à se lier à une gauche politique et syndicale qui, même si elle tente de se présenter sous de nouveaux oripeaux, est toute prête à obéir aux injonctions de la bourgeoisie dans une situation qui se tend et où les exigences vont s’intensifier. Sans parler de la situation mondiale de plus en plus tendue par la guerre, et où Mélenchon est tout autant soucieux que Macron des intérêts impérialistes de la France.

Dans les périodes de soubresauts économiques et sociaux, l’extrême droite n’est pas la seule à pouvoir se renforcer. Les révolutionnaires, de leur côté, aussi. À condition d’apparaître comme un pôle ouvrant des perspectives aux luttes, dont des perspectives de renversement du système capitaliste à la différence de la gauche qui ne leur offre que l’illusion mortifère de changements purement institutionnels.

29 juin 2022 – Fraction l’Étincelle du NPA

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Numéro 146, juillet-août 2022