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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 56, mars-avril 2008

États-Unis : Barack Obama ou Hillary Clinton ? Une simple question de style

Mis en ligne le 21 mars 2008 Convergences Monde

Ces élections primaires, tant disputées, avant les présidentielles de novembre 2008, permettent simplement au Parti démocrate de sélectionner le candidat dont la rhétorique séduira le plus d’électeurs. Hillary Clinton évoque les années 1990 et passe pour la candidate de l’expérience. Obama, plus jeune, se présente comme le nouveau venu, celui qui désire rompre avec le climat « affairiste habituel » du monde politicien. Il en appelle au « changement » et invoque les Droits civiques et autres mouvements des années 1960.

En fait il n’existe aucune différence politique réelle entre les deux candidats. Pas de désaccord sur la question de la guerre. Clinton comme Obama sont pour la poursuite de l’occupation militaire de l’Irak et de l’Afghanistan, et même pour augmenter les effectifs militaires. Obama va jusqu’à exiger le renforcement de l’intervention américaine en Afghanistan avec intervention éventuelle au Pakistan. Les deux soutiennent la politique d’occupation de la Palestine par Israël.

Peu de différence également sur les problèmes intérieurs. Tous deux proposent un programme de santé garantissant d’énormes profits aux compagnies d’assurance. Tous deux préconisent une réduction insignifiante de 1,6 milliard de dollars des exonérations fiscales accordées aux riches au cours de l’administration Bush. Tous deux ont fait porter la responsabilité des licenciements frappant les travailleurs américains sur la Chine et autres pays qui « volent les emplois américains ». Tous deux proposent des réductions d’impôts aux entreprises, sous couvert de les inciter à rester aux États-Unis.

Derrière les deux candidats : les mêmes grandes entreprises et la bureaucratie syndicale

La campagne d’Hillary Clinton est financée par de grands groupes financiers. Celle de Barack Obama l’est essentiellement par les mêmes groupes. La seule petite différence entre les deux candidats tient à un montant supérieur en provenance des sociétés immobilières ou de télécommunication pour la campagne d’Obama.

Il existe deux fédérations syndicales aux États-Unis : l’AFL-CIO et la confédération dissidente de 2005, la Change to Win Federation (fédération Changer pour gagner ). Les deux sont étroitement liées à l’appareil du parti démocrate. Les syndicats ont commencé par apporter leur soutien à Clinton. C’est en train de changer. Au mois de février, Change to Win a rendu public son appui à Obama. Ce qui a son importance dans la mesure où cette fédération comprend deux des plus grands syndicats des États-Unis, celui des camionneurs et l’Union internationale des employés des services ( Service Employees International Union ).

Deux stratégies électorales

Hillary Clinton représente la continuité du parti démocrate de la période récente. Le Democratic Leadership Council (le Conseil des dirigeants démocrates ), un organisme fondé au lendemain de la victoire de Ronald Reagan en 1984, explique que les démocrates doivent renoncer à leurs discours en faveur des pauvres et des minorités et à l’encontre des entreprises, afin de battre les Républicains. C’est cette stratégie qui avait assuré l’élection de l’administration Clinton dans les années 1990, laquelle s’en est prise au programme d’aide sociale et a renforcé la législation pénale. Clinton a maintenu les sanctions économiques et les bombardements contre l’Irak et a plus augmenté les dépenses militaires que Reagan et Bush père réunis.

Dans les années 1980, Hillary Clinton a obtenu un poste d’avocat d’affaires au service des grandes entreprises de l’Arkansas (dont son mari était gouverneur). En 2000, elle se fait élire sénatrice de New York. Lors de son mandat, elle se situe à l’aile droite du parti démocrate en appuyant les exigences militaires de l’administration Bush ainsi que les restrictions des libertés civiles dont le Patriot Act [1].

Barack Obama, de son côté, revient à la rhétorique antérieure des Démocrates, illustrée par John Kennedy et son « Alliance pour progrès », un programme de promesses grandiose visant à mener la guerre aux «  ennemis habituels de l’homme : la tyrannie, la pauvreté, la maladie et la guerre elle-même  ». Certains dirigeants démocrates, dont le sénateur Ted Kennedy, l’ex-candidat à la présidentielle, le sénateur John Kerry et l’ancien chef de la majorité sénatoriale Tom Daschle, préconisent de renoncer à la stratégie du Democratic Leadership Council. C’est ce groupe qui parraine Barack Obama aux présidentielles. Obama insiste sur son affinité avec Kennedy et s’approprie l’image des mouvements sociaux des années 1960. Pendant le Super Bowl [2], l’événement télévisé majeur regardé par 131,7 millions de gens, l’équipe de campagne d’Obama a fait passer une publicité regorgeant d’images et de discours de Martin Luther King et de Kennedy.

Barack Obama a commencé sa carrière politique en tant que sénateur de l’Illinois (l’État de Chicago) en 2004. C’est un politicien habile, plaidant la bonne cause en public tout en se mettant au service des entreprises. En 2006, par exemple, il a traîné devant les tribunaux de l’Illinois le dirigeant d’Exelon, la plus grande compagnie d’électricité nucléaire du pays, tout en s’entendant avec la firme pour adapter la législation de l’État aux besoins d’Exelon. Et Exelon a déjà versé 227 000 $ pour la campagne d’Obama. Aujourd’hui, Obama insiste sur son opposition à la guerre d’Irak en 2003. Mais il n’était pas membre du Congrès à l’époque et ne pouvait voter ni pour ni contre la guerre. En tant que sénateur, il a voté chacun des crédits militaires exigés par l’administration Bush. Il a voté contre le Patriot Act après son expiration en 2005… pour voter sa prorogation en 2006. Étant moins connu, il peut prétendre plus facilement qu’Hillary Clinton s’être opposé à la politique de Bush.

Les aléas de « l’Obama-mania »

On a assisté à un engouement médiatique croissant en faveur d’Obama, puis à des rassemblements de dizaines de milliers de personnes venues entendre son « message pour le changement », dans tout le pays. Avant le début des primaires, presque tous les commentateurs misaient sur une facile victoire de Clinton, avec sa machine électorale bien huilée et ses réseaux politiques. Mais la donne a changé. Obama a d’abord gagné onze primaires d’affilée, et les médias se sont extasiés en parlant « d’Obama-mania ». Puis sa veine gagnante s’est heurtée à une victoire de Clinton le 4 mars. Elle a gagné l’Ohio, le Texas et Rhode Island en brisant quelque peu l’élan d’Obama, qui a toutefois, la semaine suivante, le 11 mars, remporté les primaires du Mississipi. Pour l’heure, Obama reste en tête pour le nombre de délégués.

La poursuite de la course ne fait pas que des heureux au sein du parti démocrate. Certains envisagent mal plusieurs mois supplémentaires de rivalité entre Démocrates ne pouvant que bénéficier aux Républicains, lesquels ont déjà choisi leur candidat, John McCain. En outre, d’aucuns s’inquiètent d’un choix laissé à la convention démocrate en août prochain (Clinton aura alors de meilleures chances de l’emporter car elle bénéficie des meilleurs réseaux et de l’appareil du parti). Dans ce cas tout le processus des primaires risquerait d’apparaître fort peu « démocratique » et les Démocrates pourraient perdre le soutien, donc le vote, des jeunes électeurs qui ont été séduits par la campagne d’Obama.

Certes, cette campagne a quelque chose d’inédit, puisque l’un des candidats est une femme et l’autre un Noir. Cela dit, on ne se sent guère concerné par ces primaires au sein de la classe ouvrière, durement touchée par les licenciements, le gel des salaires, la remise en cause de tous les acquis et désormais la crise du crédit immobilier. Les salariés n’ont pas entendu grand-chose susceptible de soulager leurs difficultés. On entend toutefois certains exprimer une certaine nostalgie pleine d’illusions sur la « belle époque » des années Clinton 1990. Mais l’un dans l’autre, il semble qu’on ne discute guère des élections sur les lieux de travail.

San Francisco, 13 mars 2008

Victor JOHNSON


Une démocratie en effet… très primaire

Les élections présidentielles se déroulent en deux étapes. La première consiste en élections primaires, celles qui se déroulent en ce moment. Il s’agit pour les partis de sélectionner leurs candidats. L’essentiel se joue entre Démocrates et Républicains. Ceux qui, dans chaque parti, posent leur candidature, reçoivent le soutien d’autres politiciens et le parrainage d’entreprises. C’est ensuite une affaire de campagne médiatique, entre ceux qui disposent de fonds suffisants pour prendre part à la compétition. Pour ce premier round, Clinton et Obama ont levé chacun plus de 100 millions de dollars, alors que la véritable campagne contre les Républicains n’a pas encore commencé.

Qui vote aux primaires ?

Les règles générales des primaires sont fixées par chaque grand parti national, agrémentées d’autres règles instituées par les partis de chaque État. Républicains comme Démocrates doivent avoir un candidat qui obtient la majorité des votes des délégués à leur convention nationale. Mais la façon dont les candidats obtiennent les votes des délégués peut parfois rester mystérieuse. C’est aux partis de décider qui vote pour leurs candidats. Habituellement cela se limite aux personnes qui se sont inscrites comme membres de l’un des deux partis – ce qui peut se résumer à cocher une case. Bien des gens ne se déclarent pas ou se déclarent « indépendants ». En cette année électorale, en Californie par exemple, les Démocrates ont ouvert leurs primaires aux « indépendants » afin d’obtenir plus de votants.

Les Républicains se méfient de la proportionnelle…

Pour être désigné par le parti républicain, un candidat doit obtenir la majorité des 2380 délégués du parti à sa convention de septembre 2008. Chaque État détient un nombre donné de délégués, fixé par le parti national. Dans certains États, on se base sur les pourcentages – ainsi, par exemple, le candidat qui obtient 50 % des votes dans une primaire, obtient 50 % de ses délégués. D’autres États ont une primaire fonctionnant selon le principe du « gagnant-prend-tout », de sorte que le candidat qui obtient le plus de votes récupérera tous les délégués de l’État. Le parti de chaque État décide de sa façon de faire – au pourcentage ou au « gagnant-prend-tout ». C’est John McCain qui a raflé la mise.

… et les Démocrates des délégués !

La procédure du parti démocrate est nettement plus compliquée. Les Démocrates n’ont pas de primaires selon le principe du gagnant-prend-tout. Mais à la différence du parti républicain, en plus des 3249 délégués de la Convention démocrate, il y a 796 « super-délégués ».

À la Convention, le simple délégué vote pour tel ou tel candidat selon les résultats de la primaire, du moins au premier tour. Les super-délégués, en revanche, peuvent voter pour qui ils veulent. Bon nombre des super-délégués font partie de l’élite du parti – sénateurs, membres du Congrès, gouverneurs – toute la crème. Le parti veut avoir la possibilité de bloquer un candidat populaire au cas où l’aristocratie du parti pourrait lui être hostile. Car les 796 super-délégués constituant près de 20 % de la convention, ils peuvent faire très facilement pencher la balance.

Dans cette élection, le partage entre les 3249 délégués ordinaires se fera de façon très serrée et il semble bien que ce sera aux super-délégués de prendre la décision lors de la Convention. C’est pourquoi Hillary Clinton et Barack Obama tentent chacun de gagner les faveurs du plus grand nombre de super-délégués possibles. Lors de leur campagne, l’un et l’autre ont contribué au financement des nombreux super-délégués qui cherchent à se faire réélire, en tentant de conclure le plus de marchés possibles dans les coulisses.

Craig HUNT


[11 La version finale de la loi anti-terroriste adoptée par une écrasante majorité du congrès le 25 octobre 2001, un mois et demi après le 11 septembre.

[22 La finale annuelle de la ligue nationale de football américain

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