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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 113, juin-juillet-août 2017

Dépannage 7 jours sur 7 à bioMérieux : l’envers du décor

Mis en ligne le 9 juin 2017 Convergences Entreprises

BioMérieux, « leader mondial du diagnostic » qui fabrique des équipements, machines, logiciels pour les labos et les structures hospitalières, a une manière très simple d’être concurrentiel sur le marché : la boîte exploite plus ses salariés !

Des semaines qui s’allongent

Pour gagner des appels d’offres, la direction a commencé à proposer des contrats de maintenance qui garantissent des interventions 7 jours sur 7. C’est très pratique pour les clients, mais pour nous cela signifie que les techniciens qui effectuent ces dépannages peuvent maintenant être sollicités à tout moment : même le samedi, même le dimanche !

La mise en place de ces astreintes constitue donc une sacrée dégradation de nos conditions de vie. Cette dégradation s’est faite progressivement.

En 2016, l’organisation du travail dans le cadre du dépannage par téléphone avait déjà été modifiée. Elle était passée à une organisation sur 6 jours (au lieu de 5). La direction nous avait bien sûr garanti que cela ne devrait pas trop impacter nos week-ends : le travail du samedi devait se restreindre à une réponse téléphonique, pas plus de 2 fois dans l’année, moyennant 75 euros bruts par samedi travaillé pour les techniciens terrain et 50 euros bruts pour les techniciens qui ne font que de la réponse téléphonique (les techniciens hotliners). Ce qui pour eux implique de travailler un samedi par mois.

Des contrats juteux...

Puis, la réponse téléphonique ne suffisant pas, bioMérieux a décidé de vendre à ses clients des contrats avec dépannage physique, même le week-end. Les HCL (Hospices civils de Lyon) bénéficient ainsi d’un contrat dit « premium ». Pour un coût de 110 000 euros l’année, bioMérieux leur promet un dépannage dans les 8 heures suivant l’appel. Cinq autres sites en France seront dépannés le jour suivant l’appel d’ici 2018. En parallèle il existera une réponse téléphonique assurée par le technicien d’astreinte de 8 à 20 h, jours fériés compris.

… qui nous pressent comme des citrons

Le problème, c’est que les techniciens qui doivent effectuer ces dépannages rapides sont extrêmement peu nombreux. Et bien sûr les astreintes ne les dispensent pas du reste de leur travail. Elles se surajoutent au reste sans possibilité de récupérer les heures de travail fournies. Le plus beau, c’est que nos responsables ont décidé de ne former au dépannage que les collègues les « plus méritants » (dixit le responsable du service) en essayant que chaque site soit entouré par 4 techniciens, lesdits « méritants », à l’image d’une marguerite (nos chefs sont de grands poètes !!) Le problème est que la marguerite n’a pas de pétales, mais des tentacules : certains de nos collègues habitent à 4 heures de route de leur lieu d’intervention. Comptez l’aller et retour, le dépannage (dont on ne peut chiffrer à l’avance la durée), et votre samedi devient vite un enfer ! Comme la DRH pense à tout, elle leur propose de s’y rendre en train (avec des mallettes qui font plus de 20 kg, on voit qu’ils connaissent le métier). Ils peuvent même (quelle attention !) rester à l’hôtel la nuit du vendredi au samedi ou du samedi au dimanche. Super la vie de famille, surtout quand on sait qu’il n’y aura aucune récupération. Tout cela pour 75 euros bruts le samedi d’astreinte.

Cerise sur le gâteau, le collègue qui sera d’astreinte le week-end le sera aussi la semaine où il aura à gérer les appels téléphoniques : même s’il a la tête dans la machine quand il sera sur le terrain en train de dépanner il devra dépanner par téléphone un autre site qui en aura besoin.

Des salariés décidés à ne pas se laisser faire !

Après avoir appris la nouvelle, les techniciens itinérants ont décidé de s’organiser pour ne pas laisser passer ces attaques. La chose n’est pas aisée. D’abord parce que c’est un milieu professionnel dispersé où les traditions syndicales et les réflexes d’organisation sont faibles. Mais aussi car les itinérants sont par définition toujours en déplacement et ne se réunissent que très rarement au même endroit.

Mais avec un peu d’imagination et beaucoup de volonté, tout se fait. Une réunion téléphonique a donc été organisée : 34 salariés sur les 50 se sont connectés en même temps pour discuter de la situation et se mettre d’accord sur des revendications. :

  • le périmètre d’action de chaque itinérant ne doit pas dépasser 200 km ;
  • le jour d’astreinte effectué en dépannage doit pouvoir être récupéré dans la semaine qui suit ;
  • le week-end d’astreinte doit être payé 250 € bruts ;
  • la réponse téléphonique doit être assurée par des techniciens spécialistes de ce type de réponse et non par les techniciens terrain.

Une réunion inédite dans cette profession ! Il s’agit maintenant de voir comment nous allons pouvoir imposer ces revendications à la direction. D’autant plus qu’elle semble vouloir repousser les négociations sur cette réorganisation à l’automne. Une manière de laisser retomber la colère et de commencer les astreintes hors les clous pour qu’il n’y ait plus qu’à acter un fonctionnement déjà installé.

Mais les salariés sont bien décidés à ne pas se laisser faire ! Certains parlent de grève. Il va falloir redoubler de combativité et d’organisation pour se faire entendre. Pas question de sacrifier notre vie personnelle pour les profits de la direction !

22 mai 2017, Aurélie Talline

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Numéro 113, juin-juillet-août 2017