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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 79, janvier-février 2012 > Russie : Poutine de capitalisme !

Russie : Poutine de capitalisme !

Oligarques késako ?

Mis en ligne le 22 janvier 2012 Convergences Monde

Deux oligarques russes vivant en Angleterre sont en ce moment en procès devant la haute cour de justice de Londres : Boris Berezovski (65 ans), jadis puissant conseiller de Boris Eltsine contre Roman Abramovitch (45 ans), propriétaire du club de football de Chelsea, dont la fortune personnelle est estimée à 14 milliards de dollars. Le premier demande 5,5 milliards de dollars à son junior en réparation pour le manque à gagner lors de la revente du trust pétrolier russe Sibneft. Faux, réplique le junior, j’ai déjà grassement rémunéré Berezovski pour ses services. Lesquels ? « Berezovski avait la capacité d’offrir deux types de protection, physique et politique. Je me suis adressé à lui parce que j’avais besoin d’une protection politique (…) Nous n’avons pas abordé (…) ma sécurité physique. Elle était offerte en prime, en quelque sorte » explique Abramovitch aux juges. Ce genre de contrat d’affaires ne laisse aucune trace écrite. « Chez nous, il nous faut remonter au xve siècle pour avoir quelque chose de comparable. Pour comprendre, lisez Shakespeare », commente un avocat. Le capitalisme britannique est plus policé, ayant quelques siècles d’avance sur le russe.

Après leur collaboration au moment du grand dépeçage de l’industrie soviétique, le sort de ces deux oligarques a bifurqué. Berezovski a paru trop encombrant à Poutine qui l’a contraint à vendre ses affaires et partir se réfugier à Londres avec sa fortune. Abramovitch, qui en 2005 a cédé à Gazprom pour 13 milliards de dollars le groupe pétrolier Sibneft qu’il avait acquis avec l’appui de Berezovski pour 100 millions, a gardé toutes ses affaires et est toujours en odeur de sainteté à Moscou. De loin, il a d’ailleurs assumé (nommé par Poutine) de 2000 à 2010 la fonction de gouverneur de la province de Tchoukotka, et en est aujourd’hui président du parlement. La façon dont les deux hommes ont bâti leur fortune est l’histoire même de la constitution de cette bourgeoisie qui domine la Russie.

Berezovski a commencé dès 1989 lorsque, expert en management dans l’entreprise d’État Avtovaz (marque Lada), il revend les voitures puis obtient le monopole des ventes dans tout le pays. Avec les privatisations, le voilà à la tête d’Aéroflot, d’une chaîne de télévision… en même temps qu’éminence grise de la présidence.

Plus jeune, Abramovitch n’en est en 1989 qu’au petit trafic et à une fabrique de jouets. Puis achète du pétrole au prix intérieur russe, pour le revendre à l’extérieur au cours mondial. Les privatisations par « Prêts contre actions » ont sonné son heure : introduit par Berezovski, il se fait rembourser fin 1995 un modeste prêt à l’État (Eltsine avait besoin d’argent) par des actions du groupe Sibneft créées sur mesure dans la vente à la découpe d’une partie du parc pétrolier national.

Leurs itinéraires résument l’ascension type des hommes de la grande bourgeoisie russe qui font la pluie et le beau temps sous le régime de Poutine. Ils ont bâti leurs fortunes comme les deux protagonistes de Londres ou en valsant d’une entreprise privée à un ministère. Les bourgeois de moindre envergure n’ont pas cheminé avec le même bonheur des petites privatisations jusqu’aux grandes, qui leur sont restées inaccessibles. Mais ils n’en ont pas moins bâti leurs fortunes des miettes tombées des tables des privatisations, de la gestion des villes ou régions, ou plus modestement de la privatisation bon marché des logements qu’ils mettent maintenant en location ou ont revendus à prix d’or une fois le parc immobilier public quasiment soldé.

O.B.

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Numéro 79, janvier-février 2012

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