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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 96, novembre-décembre 2014 > DOSSIER : Moyen-Orient, « Guerre contre le terrorisme » ou guerre sans fin (...)

DOSSIER : Moyen-Orient, « Guerre contre le terrorisme » ou guerre sans fin contre les peuples ?

Aux origines de l’État Islamique(EI) : la responsabilité des grandes puissances

Mis en ligne le 20 novembre 2014 Convergences Monde

Né en 2004 dans le chaos de l’occupation américaine, Al-Qaïda en Irak s’est illustré par des attentats particulièrement meurtriers visant les Chiites. Défaits en 2008, ces djihadistes sunnites se réfugient dans l’est de la Syrie. À la faveur de la guerre civile qui fait rage dès 2011, ils prospèrent et rompent avec l’organisation de Ben Laden pour se proclamer « État Islamique ». En 2014, ils lancent une offensive sur l’Irak qui force les États-Unis et leurs alliés à intervenir.


  • Kurdes de Turquie : 18 millions sur 75 millions d’habitants.
  • Kurdes d’Iran : 10 millions sur 77.
  • Kurdes d’Irak : 8 millions sur 33.
  • Kurdes de Syrie : 2 millions sur 23.

Principaux partis du Kurdistan : – Le PKK en Turquie. – Le PYD en Syrie. – Le PDK du clan Barzani en Irak.

Bagdad est devenue une capitale à majorité chiite, les exactions des milices liées au gouvernement Maliki ayant fait fuir une partie de la population, remplacée par des Chiites du Sud.

Ces crimes, qu’Amnesty International dénonce comme du nettoyage ethnique, continuent sous le gouvernement actuel d’Abadi.


Irak : comment l’occupation américaine a créé le morcellement communautaire

  • 2003-2004 : invasion et démantèlement de l’État irakien

Au printemps 2003, Bush et ses alliés envahissent l’Irak et renversent Saddam Hussein.

Nommé Administrateur civil de l’Irak, l’américain Paul Bremer licencie des centaines de milliers d’enseignants, de personnels soignants et de travailleurs de l’industrie du pétrole, au prétexte de démanteler le parti de l’ancien dictateur auquel ces fonctionnaires étaient tenus d’adhérer. Il dissout l’armée, laissant des centaines de milliers de soldats sur le carreau. Et il repousse les élections, alors très attendues par la bourgeoisie et le clergé chiite, communauté majoritaire en Irak, qui croyaient leur heure venue avec le renversement du dictateur.

Comme la colère contre l’occupation se manifeste par la montée en puissance de groupes armés intégristes ou nationalistes (même si on note aussi des réactions populaires de travailleurs du pétrole ou des services publics), les États-Unis jouent à fond la carte de la division. Dans le projet de nouvelle Constitution, ils proposent un système de représentation communautaire : tant de places pour les Chiites, Sunnites et Kurdes dans chaque institution. Hommes d’affaires, potentats régionaux et chefs de milices redoublent de démagogie pour s’ériger en représentants de leur communauté.

  • 2005-2008 : la guerre civile fait rage

L’année 2004 a vu naître Al-Qaïda en Irak qui a trouvé le soutien d’une partie des notables et chefs de tribus des régions sunnites. La population est terrorisée par l’armée américaine qui a écrasé Falloujah la même année [1] et torturé dans la prison d’Abou Ghraïb. Loin d’affronter l’occupant, Al-Qaïda cible des civils chiites, dans un but de nettoyage ethnique. En réponse, les États-Unis organisent l’intégration de milices chiites dans l’armée irakienne reconstituée. Ces dernières, au nom du combat contre Al-Qaïda, s’en prennent aux populations civiles sunnites. Et c’est un politicien de la communauté chiite, Nouri Al-Maliki qui, avec l’appui des Américains, devient chef du gouvernement en mai 2006.

Après trois ans d’une guerre civile qui fait jusqu’à 3 000 morts par mois, les chefs tribaux sunnites se rallient au gouvernement irakien et à l’occupant américain en échange de postes dans l’appareil d’État. Privé de ces supports, Al-Qaïda est expulsé vers la Syrie.

  • 2008-2014 : un pays au bord de l’explosion

Mais le premier ministre Nouri Al-Maliki ne tient pas ses promesses vis-à-vis des notables sunnites. Il place à tous les postes importants des hommes de sa propre milice. Après le retrait des troupes américaines en 2011, il renforce encore sa politique communautaire, en même temps qu’il resserre ses liens avec l’Iran chiite.

C’est de cette situation qu’a profité l’EI pour revenir de Syrie en Irak en juin 2014, où il a vite reçu le soutien d’un certains nombres de notables de la région. L’armée irakienne qui, dans l’Ouest sunnite, est en fait presque une force d’occupation chiite, s’est désintégrée à son approche. Venu sur place le 8 septembre, le secrétaire d’État américain, John Kerry, impose le remplacement du gouvernement Maliki par un gouvernement « d’union nationale » pour combattre l’EI. Mais les différentes factions irakiennes représentées dans ce gouvernement, dont chacune dispose maintenant de ses propres milices armées et de ses propres champs de pétrole, sont autant en guerre contre l’EI que les unes contre les autres.

R.P.


Syrie : plutôt la guerre civile que la révolution

  • Mars 2011 : La vague révolutionnaire du « printemps arabe » touche la Syrie. Toutes appartenances ethniques ou religieuses confondues, jeunesse et classes populaires se mobilisent. Le régime syrien joue la carte de la division religieuse combinée à une atroce répression pour préserver son pouvoir.
  • Mai 2011 : Bachar Al-Assad libère des centaines de djihadistes retenus dans les geôles syriennes. Prenant la première place dans la contestation, les islamistes enterrent les revendications sociales et divisent les classes populaires syriennes. Le dictateur syrien préfère cette opposition, même armée. Plutôt la guerre que la révolution.
  • Septembre 2011 : Création du CNS (Conseil National Syrien), qui se veut un gouvernement de rechange, dominé par les Frères Musulmans. Formé à Istanbul de concert avec la France et les États-Unis, il est largement financé par le Qatar. Il n’apparaîtra cependant pas comme une alternative crédible aux yeux des grandes puissances, qui le soutiennent assez pour qu’il tienne tête au régime, mais pas suffisamment pour qu’il le renverse. Un équilibre militaire s’instaure entre le régime et diverses bandes armées islamistes rivales. La révolte sociale est étouffée par la guerre.
  • 19 mai 2013 : Le Hezbollah libanais, mouvement chiite appuyé financièrement par l’Iran, intervient en Syrie pour aider les troupes du régime à reprendre la ville de Qoussair. En face, la Turquie, le Qatar et l’Arabie Saoudite financent chacun leur groupe d’opposition armé. Parmi eux, l’État islamique. La guerre civile syrienne prend une dimension régionale.
  • Septembre 2013 : L’utilisation d’armes chimiques par l’armée syrienne est mise en avant pour brandir la menace d’une intervention militaire occidentale. Mais les États-Unis renoncent, faute d’un remplaçant à Assad. Le chef de l’état-major américain Martin Dempsey déclare : « Le camp que nous devrions choisir doit être prêt à promouvoir ses intérêts, mais aussi les nôtres, lorsque le rapport de force évoluera en sa faveur. Aujourd’hui, il n’y en a pas. ».
  •  Août-septembre 2014 : Tant qu’il se contentait d’opprimer les populations des régions qu’il contrôlait en Syrie, l’EI était, aux yeux des grandes puissances, l’un des éléments de cet équilibre de forces qui contribuait à étouffer la population syrienne. Mais quand il a pénétré en Irak sans demander la permission, il est devenu l’ennemi numéro un.

Assad, même s’il est persona non grata dans la coalition contre l’EI, n’en est pas moins un allié officieux : les bombardements aériens en territoire syrien se font avec son accord. Il en a profité ces dernières semaines pour intensifier sa répression, notamment sur Alep.

L’ONU décompte près de 200 000 morts en Syrie depuis le début du conflit. Dans ce pays de 22 millions d’habitants, 6,5 millions ont été déplacés à l’intérieur du pays et 3 millions vivent dans des camps de réfugiés au Liban, en Turquie ou en Jordanie. Une génération y est élevée dans le dénuement le plus total, ballottée de pays en pays pour fuir aussi bien le régime que ses rivaux qui imposent dans leurs « zones libérées » leur dictature à eux.

Dans les années 1970, les réfugiés palestiniens au Liban avaient su trouver l’oreille d’une partie de la population pauvre du pays et l’entraîner dans une révolte contre la pauvreté. Seul ce genre de sursaut pourrait mettre fin aux guerres de clans dans la région.

Annick HAUSMANN


[1Voir le numéro précédent de Convergences révolutionnaires.

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Numéro 96, novembre-décembre 2014