États-Unis. Les auditions de la commission parlementaire sur l’assaut du Capitole : quelques révélations sur la menace qui pèse sur leur prétendue démocratie

Après des semaines d’auditions télévisées et médiatisées à l’échelle nationale, la commission parlementaire sur le 6 janvier a présenté des preuves accablantes contre Donald Trump et de nombreux membres de son administration et de son cercle rapproché. Après avoir mené plus de 1 000 entretiens, examiné des milliers d’heures de séquences vidéo et recueilli des dizaines de milliers de documents, la commission a présenté une image incroyable des événements de la journée ainsi que des mois qui l’ont précédée.
L’émeute a mis en danger la vie de l’ensemble de la Chambre des représentants des États-Unis, du vice-président, de leurs assistants et d’autres personnes obligées de se cacher dans différentes parties du Capitole alors que les manifestants parcouraient les couloirs, saccageaient les bureaux et cherchaient la chef du parti démocrate et présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, et le vice-président Mike Pence. Au final, l’émeute a fait neuf morts, dont quatre par suicide, et plus de 100 blessés. Plus de 840 personnes ont été inculpées, dont au moins la moitié pour au moins un délit.
Les témoignages recueillis par le comité, composé de sept démocrates et de deux républicains, ont montré que Trump et les principaux membres de son administration ont fait tout ce qu’ils pouvaient pour renverser l’élection de 2020 afin de rester au pouvoir – et ils ont failli y parvenir.
Les audiences ont clairement montré que Trump a d’abord prévu de qualifier l’élection de fraude s’il n’était pas le vainqueur, quels que soient les faits, et qu’il a ensuite utilisé le pouvoir de son administration et de son cercle restreint pour mener à bien divers efforts visant à renverser l’élection, y compris un arrêt violent du vote de certification du Congrès au Capitole le 6 janvier avec une émeute massive, menée par des milices d’extrême droite.
Bien qu’il s’agisse des allégations les plus graves contre un président dans l’histoire des États-Unis, les conséquences sont incertaines. Il est clair que l’un des objectifs de ces auditions est de permettre aux démocrates de gagner des voix lors des prochaines élections de novembre. Ils veulent souligner la gravité de la situation et la nécessité pour ceux qui votent habituellement pour les démocrates et les indépendants concernés, ainsi que pour certains républicains, de voter démocrate. Ce que les audiences ont révélé, ce sont les divisions qui existent aux États-Unis et qui vont au-delà des partisans de Trump et des autres. Si les audiences se poursuivent, elles ont la possibilité d’exposer une division importante au sein de la classe dirigeante américaine entre une section qui veut continuer à essayer de maintenir le statu quo avec sa version de la démocratie, et une autre section d’extrême droite qui veut imposer son programme de droite, et a utilisé Trump et d’autres politiciens et juges de droite, ainsi que des groupes de milices marginaux, pour y parvenir.
Le plan visant à renverser l’élection par le biais des tribunaux
La première partie du plan consistait simplement à déclarer la victoire le soir des élections, quels que soient les résultats. C’est ce qui ressort clairement d’une fuite d’un enregistrement audio du 31 octobre 2020 d’une conversation où l’ancien conseiller et proche associé de Trump, Steve Bannon, déclare : « ce que Trump va faire, c’est simplement déclarer la victoire... Il va déclarer la victoire. Mais cela ne signifie pas qu’il est un gagnant. Il va juste dire qu’il est un gagnant. » Ce plan n’a pas seulement été discuté ouvertement par Bannon, mais Trump y a fait allusion à de nombreuses reprises au cours de la période précédant la nuit des élections, ce qui a été détaillé par la presse.Trump comptait sur le fait que davantage de votes Biden proviendraient de votes par correspondance, qui, dans de nombreux États, doivent être comptés après les votes en présence physique. Ils ne seraient donc pas complètement comptés avant le lendemain matin. Son plan était de déclarer la victoire avant que ces votes par correspondance ne soient entièrement comptés, et de déclarer la fraude si les votes par correspondance changeaient le résultat. C’est ce qu’il a fait lors d’une conférence de presse le 4 novembre 2020, en déclarant : « C’est une fraude envers le public américain... Nous nous préparions à gagner cette élection. Franchement, nous avons gagné cette élection ... C’est une fraude majeure contre notre nation. »
À ce stade, selon les témoignages de membres de l’administration de Trump, ce dernier a alors commencé à réunir une équipe hétéroclite de fidèles pour se mettre au travail, cracher des théories du complot et bombarder le ministère de la Justice ainsi que divers tribunaux de contestations juridiques inventées. Toutes sortes d’histoires inventées ont été répétées dans les médias, notamment des affirmations selon lesquelles la Chine et l’Italie avaient piraté les machines à voter américaines, que les machines à voter étaient programmées pour falsifier les votes, que des milliers de personnes décédées et de non-citoyens avaient voté pour Biden et bien d’autres choses encore. Chacune de ces affirmations a été complètement démentie ou jugée ne pas mériter d’enquête par divers comités juridiques, y compris le propre procureur général de Trump.
Mais cela n’a pas empêché l’entourage de Trump de répandre ces mensonges pendant des semaines dans tout le pays, et d’engager des dizaines de procès dans les États du champ de bataille. Une équipe de législateurs appartenant au groupe conservateur House Freedom Caucus, des républicains du Congrès et, bien sûr, le cercle restreint de Trump composé de Mark Meadows, Stephen Miller, Rudy Giuliani, Steve Bannon, Roger Stone, Kayleigh McEnany et bien d’autres ont contribué à cet effort.
Même l’épouse du juge de la Cour suprême Clarence Thomas, Virginia (Ginni) Thomas, a joué un rôle. Le comité a publié 29 textos de Ginni Thomas au chef de cabinet de Trump, Mark Meadows, dans lesquels elle exprime son soutien total et sa volonté de contribuer aux efforts visant à renverser les résultats de l’élection, ce qui incluait à l’époque l’idée de porter leurs revendications inventées devant la Cour suprême, où son mari est juge. À l’approche du 6 janvier, alors que ses poursuites judiciaires ont toutes échoué, Trump a fait pression sur les hauts fonctionnaires du ministère de la Justice pour qu’ils « disent simplement que l’élection était falsifiée [et] me laissent le reste à faire », selon le témoignage de Richard Donoghue, fonctionnaire du ministère de la Justice à l’époque.
En outre, dans des dizaines de courriels obtenus par la commission, Trump et son cercle restreint ont discuté d’un autre plan à moitié fictif visant à créer une liste de personnes qui prétendraient faussement être des électeurs du collège électoral dans les États fédérés constituant le terrain d’affrontement que Trump avait perdu. Ils annonceraient simplement lors du vote de certification du 6 janvier au Congrès avoir voté pour Trump et la nécessité de comptabiliser leurs votes. Jack Wilenchik, un avocat qui a aidé à organiser les faux électeurs en Arizona, écrivait dans un courriel du 8 décembre 2020 à Boris Epshteyn, autre avocat et conseiller de Trump : « Nous ne ferions qu’envoyer de ‘faux’ votes électoraux à Pence pour que ‘quelqu’un’ au Congrès puisse faire une objection quand ils commenceront à compter les votes, et commencer à argumenter que les ‘faux’ votes devraient être comptés. »
En fin de compte, toutes ces stratégies ont échoué, et toutes les accusations venant de Trump se sont révélées complètement mensongères. La commission du 6 janvier a entendu le témoignage de l’ancien procureur général de Trump, Bill Barr, expliquant qu’il avait dit directement à Trump que toutes ses accusations de fraude électorale étaient des « conneries » et qu’il ne donnerait aucune suite.
6 janvier 2021 : le plan visant à bloquer la certification
Lorsque leurs contestations juridiques fabriquées de toutes pièces ont continué d’échouer, Trump et son cercle proche se sont concentrés sur un effort de la dernière chance pour empêcher le vote de certification d’avoir lieu au Capitole le 6 janvier. Selon le témoignage de plusieurs membres de l’administration de Trump, y compris le conseiller de Trump à la Maison Blanche de l’époque, Pat Cipollone, il y a eu une réunion clé le 18 décembre 2020, où l’accent a été mis sur le blocage du vote de certification du 6 janvier.
Lors de cette réunion, certains des avocats officiels de la Maison Blanche de Trump se sont opposés à ses stratèges officieux notamment les avocats Rudy Giuliani et Sidney Powell ou l’ancien PDG d’Overstock Patrick Byrne et l’ancien conseiller à la sécurité nationale Michael Flynn. Ils ont exposé les options encore possibles pour Trump, notamment ordonner à l’armée de saisir toutes les machines à voter afin de procéder à un recomptage complet de tous les votes, et déclarer la loi martiale au plus tard le 6 janvier afin d’arrêter la certification. Cela a donné lieu à une vive dispute entre les conseillers officiels et les conseillers officieux, les avocats officiels de Trump disant aux autres que leurs idées étaient folles et qu’ils devraient « fermer leur putain de gueule ».
Mais peu après cette longue réunion, aux premières heures du 19 décembre 2020, Trump a envoyé son infâme tweet : « Statistiquement impossible d’avoir perdu l’élection de 2020. Grande manifestation à D.C. le 6 janvier. Soyez-y, ce sera sauvage ! »
Le rôle de l’extrême droite
C’est après ce tweet que les milices d’extrême droite ont commencé à s’organiser et à se coordonner pour mobiliser leurs membres afin qu’ils viennent au Capitole le 6 janvier avec des armes. Ces leaders entretenaient des liens avec des membres du cercle restreint de Trump.
Le comité a fourni des preuves directes de la préparation des événements du 6 janvier par les membres des Oath Keepers, des Proud Boys et des Three-Percenters (groupes d’extrême droite organisés en milices – certains ouvertement fascistes). Cela comprenait la création d’unités armées à réaction rapide, le stockage de valises d’armes dans un hôtel voisin, et un plan pour avoir un bateau prêt à livrer des armes aux membres des milices au Capitole. Selon les enquêtes de la commission, Thomas Caldwell, un membre des Oath Keepers, a envoyé un message le 2 janvier 2021 à un tchat du groupe, écrivant : « Si nous avions quelqu’un qui se tenait prêt à une rampe de quai (une près du Pentagone bien sûr), nous pourrions avoir notre équipe d’intervention rapide avec les armes lourdes en attente, les charger rapidement et les faire traverser le fleuve manuellement en attente. »
D’autres preuves incluent la transcription d’une réunion des Oath Keepers où son leader Stewart Rhodes met en garde les membres contre les lois sur les armes à feu à D.C. (District de Colombia) pendant les manifestations, en disant : « Le spray au poivre est légal. Les tasers sont légaux, et les pistolets paralysants sont légaux. Et ça ne fait pas de mal d’avoir un tuyau de plomb avec un drapeau dessus » – tous ces objets étaient présents le 6 janvier.
Bien que le comité n’ait pas fourni de preuves concluantes montrant une collaboration directe entre les membres du cercle intime de Trump et les groupes extrémistes dans la planification de l’attaque du Capitole, il a décrit des connexions claires entre eux. Le comité a fourni des preuves montrant que l’ancien conseiller à la sécurité nationale de Trump, Michael Flynn, et l’associé de longue date de Trump, Roger Stone – qui ont tous deux bénéficié d’une grâce totale de la part de Trump avant le 6 janvier 2021 – avaient des liens avec les dirigeants des Oath Keepers et des Proud Boys, dont les membres leur ont servi de gardes du corps personnels les jours précédant l’émeute.
Michael Flynn, un ancien général trois étoiles, qui perçoit toujours une pension militaire, a refusé à plusieurs reprises de témoigner, plaidant le cinquième amendement, qui donne la possibilité de ne pas témoigner contre soi-même, lorsqu’on lui a demandé s’il pensait que les violences du 6 janvier 2021 étaient justifiées et s’il croyait à la transition pacifique du pouvoir.
Une vidéo a également été partagée montrant Stone citant un engagement des Proud Boys - leur soi-disant « Fraternity Creed » – où il dit : « Salut, je suis Roger Stone. Je suis un nationaliste occidental, et je refuse de m’excuser au nom de la création du monde moderne. » Stone a aussi invoqué le cinquième amendement lors de son interrogatoire par la commission.
La commission a également recueilli le témoignage de Cassidy Hutchinson, le principal assistant du chef de cabinet de Trump, Mark Meadows. Et ce dernier affirme que le 5 janvier 2021, la veille de l’émeute, que Trump avait demandé à Meadows de contacter Roger Stone et Michael Flynn. Compte tenu des liens de Stone et de Flynn avec des groupes d’extrême droite, ce témoignage suggère que Trump et des membres proches de son administration auraient pu avoir directement connaissance d’une attaque planifiée.
La commission a, de surcroit, fourni des preuves visant à démontrer que, bien qu’il n’ait partagé cette information qu’avec quelques privilégiés jusqu’au jour de son discours, Trump avait prévu à l’avance de dire aux participants au rassemblement du 6 janvier de marcher sur le Capitole. Le comité a partagé un brouillon de tweet de Trump qui n’a pas été envoyé et dans lequel il écrivait : « Je ferai un grand discours à 10 heures le 6 janvier à l’Ellipse (au sud de la Maison Blanche). Veuillez arriver tôt, des foules massives sont attendues. Ensuite, marchez jusqu’au Capitole. Arrêtez le vol ! »
Le comité a également partagé des textos du 4 janvier entre l’organisatrice du rassemblement du 6 janvier à l’Ellipse de la Maison Blanche, Kylie Kremer, et le PDG de MyPillow, Mike Lindell, dans lesquels ils discutaient de plans secrets pour que Trump appelle les manifestants à marcher vers le Capitole le 6 janvier. Kremer a écrit : « Cela reste entre nous, nous allons avoir une deuxième scène à la Cour suprême encore après l’Ellipse. POTUS va nous demander de marcher là-bas/au Capitole. Il ne faut pas que la deuxième étape soit connue parce que les gens vont essayer d’en organiser une autre et de la saboter. Il ne faut pas non plus que la marche soit connue parce que j’aurai des problèmes avec le Service des parcs nationaux et toutes les agences, mais POTUS va simplement l’appeler à l’improviste. » Un texto de l’activiste d’extrême droite Ali Alexander, envoyé le 5 janvier à 7h19, affirmait : « Demain : Ellipse puis Capitole. Trump est censé nous ordonner de nous rendre au Capitole à la fin de son discours, mais nous verrons bien. »
La cible Mike Pence
Dans son discours du 6 janvier au rassemblement, Trump répétait les mensonges des mois précédents, en déclarant : « Aujourd’hui, je vais exposer juste quelques-unes des preuves qui prouvent que nous avons gagné cette élection et que nous l’avons gagnée par une victoire écrasante. Ce n’était pas une élection serrée. » Il appelait les personnes présentes au rassemblement à marcher vers le Capitole, et ciblait Mike Pence [le vice-président] qui avait le pouvoir d’empêcher le vote de certification. Le rédacteur du discours de Trump, Stephen Miller affirme que l’avocat de la Maison Blanche, Eric Herschmann, lui avait dit qu’il voulait retirer du discours les lignes désignant le vice-président Pence comme un lâche s’il n’empêchait pas le vote de certification, mais Trump leur a ensuite ordonné de « réinsérer les lignes sur Pence. »
Après le discours, selon les témoignages, Trump a voulu rejoindre les manifestants au Capitole, et était furieux que le chauffeur des services secrets ne le laisse pas partir. Trump aurait alors essayé de s’emparer du volant et aurait tendu la main vers la gorge du chauffeur.
Des centaines de Proud Boys s’étaient déjà rassemblés près du Capitole le matin du 6 janvier – quelques heures avant le discours de Donald Trump à l’Ellipse – pour effectuer une reconnaissance du Capitole avant l’attaque qu’ils allaient aider à mener plus tard dans la journée. Une fois le rassemblement terminé et après la de demande de Trump de se rendre au Capitole adressée à des dizaines de milliers de personnes, des militants Proud Boys et Oath Keepers ont dirigé les assauts pour déborder la police du Capitole, franchir les barrières et pénétrer dans le Capitole.
Une fois que les émeutiers rentrés dans le Capitole, le vice-président Pence est averti que sa vie est en danger. Un haut responsable de la sécurité de la Maison-Blanche témoigne que « les membres de l’équipe [de sécurité] du vice-président commençaient à craindre pour leur propre vie... il y avait des appels pour dire au revoir aux membres de leur famille, etc... l’équipe du vice-président pensait que la situation allait devenir très grave. »
Certains journalistes ont affirmé que Pence n’a pas seulement craint pour sa vie, mais qu’il soupçonnait peut-être que certains agents des services secrets pourraient essayer de l’extraire du Capitole contre sa volonté afin d’arrêter la certification. Selon les journalistes du Washington Post, lorsqu’un membre des services secrets lui a demandé de monter dans la voiture, Pence dit à son agent de sécurité principal, Tim Giebels, « Je te fais confiance, Tim, mais tu ne conduis pas la voiture. Si je monte dans ce véhicule, vous allez partir. Je ne monte pas dans la voiture. »
De nombreuses questions sans réponse
Les témoignages, ainsi que la crainte de Pence à l’égard des services secrets, ont peut-être commencé à révéler plus de choses sur le fonctionnement du gouvernement que ne le souhaitait la commission. Cela est devenu évident lorsque l’inspecteur général du département de la sécurité intérieure, qui supervise les services secrets, a déclaré au comité du 6 janvier que les textos des services secrets des 5 et 6 janvier avaient été accidentellement effacés. Devons nous croire que tous ces SMS discutant des plans de sécurité la veille de l’attentat ainsi que le jour où les forces de sécurité du Capitole ont été débordées, des policiers tués et des élus menacés ont été « accidentellement » effacés ?! La commission a depuis émis une assignation à comparaître pour tenter de récupérer ces messages. Nous pouvons spéculer sur le contenu de ces messages, mais il est peu probable que les services secrets et le ministère de la Sécurité intérieure aient accidentellement effacé des documents aussi importants.
La commission n’a, de plus, pas entièrement exploré les raisons pour lesquelles la Garde nationale a été déployée si tard. Il s’est écoulé plus de quatre heures entre le moment où le chef de la police du Capitole a appelé des renforts et celui où les troupes de la Garde nationale sont arrivées. Un ancien responsable de la Garde nationale de Washington, le colonel Earl Matthews, qui a occupé des fonctions de premier plan au sein du Conseil de sécurité nationale et du Pentagone sous l’administration Trump, a rédigé un mémo public désignant deux généraux de l’armée de terre de l’administration Trump – le général Charles Flynn, chef d’état-major adjoint chargé des opérations le 6 janvier, et le général de corps d’armée Walter Piatt, directeur d’état-major de l’armée de terre – en les qualifiant de « menteurs invétérés et irréductibles » pour leur témoignage sur le retard de l’envoi de la Garde nationale. Matthews affirme que « tous les dirigeants de la Garde nationale voulaient réagir et savaient qu’ils pouvaient riposter à l’émeute au siège du gouvernement », mais ils ont été retardés pendant des heures par ces hommes. À un moment donné, Matthews écrit que les généraux ont publié un faux rapport sur les événements du 6 janvier « digne du meilleur propagandiste stalinien ou nord-coréen. »
Il y a aussi beaucoup d’autres signes de destruction évidente de preuves qui impliquent des personnes au-delà du seul Trump. Il y a un trou de près de sept heures dans le journal des appels de la Maison Blanche le 6 janvier, y compris au moment de l’émeute, où il montre que pas un seul appel n’a été passé. C’est une période pendant laquelle d’autres personnes ont rapporté que Trump appelait des gens constamment. Il est donc important de savoir si les registres ont été modifiés ou détruits, qui en est responsable et, bien sûr, si possible, d’essayer de retrouver qui a été appelé et ce qui a été dit, ou de trouver l’enregistrement des appels téléphoniques privés qui ont été passés. Il a également été rapporté que Trump a détruit à plusieurs reprises des documents et a volé des boîtes de matériel classifié lorsqu’il a finalement quitté la Maison Blanche et s’est retiré en Floride. Et il a été signalé que le chef de cabinet Mark Meadows a brûlé des documents après avoir rencontré le membre du Congrès Scott Perry – un républicain de Pennsylvanie, qui a joué un rôle majeur en essayant d’aider Trump à renverser l’élection.
Si le Comité se réunit à nouveau après les vacances d’été, nous verrons s’il est prêt à faire quelque chose de plus que simplement exposer l’implication de Trump.
Ce que les auditions ont vraiment montré
Les auditions du 6 janvier ont exposé de façon certaine une tentative planifiée et coordonnée de rejeter les résultats de l’élection par Trump, les membres de son administration, et certains membres du gouvernement. Les démocrates et les opposants républicains à Trump veulent utiliser ces auditions pour maintenir l’illusion qu’ils défendent la démocratie et représentent les intérêts de la plupart des gens. Cette stratégie pourrait faire élire davantage de démocrates lors des prochaines élections et réduire le soutien accordé à Trump au sein du parti républicain. Elle a déjà eu un certain impact. Le Wall Street Journal et le New York Post – propriété de Rupert Murdoch, partisan de longue date des républicains et dont la famille possède également Fox News – ont publié des éditoriaux très critiques sur les actions de Trump le 6 janvier.
Quelles qu’ont été ces auditions, la réalité de la vie quotidienne d’une bonne partie de la population, partisans de Trump ou non, ne changera pas. Il faudra faire face à l’insécurité perpétuelle créée par ce système, une insécurité exploitée par tous les politiciens à des fins électoralistes, et que l’extrême droite utilise pour promouvoir ses vues extrémistes.
On peut constater le cynisme des manœuvres électoralistes du parti démocrate et de certaines organisations à but non lucratif alliées aux démocrates qui ont dépensé près de 44 millions de dollars pour promouvoir les candidats républicains d’extrême droite lors des primaires en Californie, au Colorado, en Pennsylvanie, dans l’Illinois et dans le Maryland. Leur stratégie repose sur l’idée que ces candidats ouvertement racistes et d’extrême droite – dont beaucoup affirment que la course présidentielle de 2020 a été volée à Trump – seront plus faciles à battre que des républicains plus modérés lors des élections à la chambre basse.
Les enjeux sont importants et vont bien au-delà de ces élections ou ces auditions. Des forces d’extrême droite, riches, veulent imposer leur agenda social et politique. Jusqu’à présent, elles ont utilisé le fonctionnement normal du système pour y parvenir. Elles ont utilisé leurs politiciens de droite pour faire passer toutes sortes de lois restrictives, attaquant les droits que nous avons acquis au fil des décennies, comme le droit d’accès à l’avortement et à des soins, le droit de vote, les droits des personnes LGBTQ+, la liberté d’expression et de réunion, le choix des programmes scolaires, etc. Elles ont utilisé les tribunaux pour légaliser leurs décisions. Elles financent des organisations dans tout le pays pour recruter et mobiliser leurs membres – dont certains ont des idéologies d’extrême droite et fascistes – qui sont entrainés et se préparent à mener des coups de force.
Ces auditions ont mis en lumière certains des rouages de ce système et en ont révélé certaines manières de fonctionner de l’extrême droite. Les auditions du 6 janvier ont mis en lumière le fonctionnement d’un système et d’un gouvernement qui ne représentent pas nos intérêts. Il s’agit d’un système qui garantit les droits des riches à contrôler les richesses, c’est-à-dire les ressources naturelles et productives de la société. Les crises économiques, leurs guerres et maintenant l’impact de l’accélération du dérèglement climatique pèsent le plus lourdement sur les pauvres et les travailleurs. Et le gouvernement est un instrument de préservation des privilèges des plus riches.
Il est clair que nous ne pouvons pas compter sur les démocrates, les républicains ou les institutions gouvernementales pour faire face aux problèmes auxquels nous sommes confrontés. Les démocrates ne se compromettent pas ouvertement avec les organisations fascistes d’extrême droite, mais ils maintiennent le même système et les mêmes conditions qui contribuent à donner naissance à ces groupes extrémistes.
L’émeute du 6 janvier n’était pas une menace pour la démocratie américaine – l’épisode a rappelé qu’il ne s’agit pas d’une démocratie. C’était un petit aperçu du fonctionnement quotidien de ce système. Et elle a mis en évidence la violence qu’une partie de la classe dirigeante est prête à déchaîner pour protéger ses intérêts.
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