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20 ans de réformes contre l’hôpital public

Manifestations du personnel de santé du 8 novembre

Dans bien des villes, l’expression de la colère

Mis en ligne le 8 décembre 2016 Convergences Entreprises

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2017, présenté par le gouvernement en septembre, le proclame haut et fort : il faudra faire « 4,1 milliards d’euros d’économies » dans l’assurance-maladie, dont 1,5 milliard pour les seuls hôpitaux ! Pour apprécier ce milliard et demi à sa juste valeur, on le comparera, par exemple, aux 53,5 milliards d’euros de profits du Cac 40 en 2015. Cette véritable casse sociale, qui dure depuis des années, vise avant tout le personnel, avec des vagues de suppressions de postes à la clé. Pas étonnant alors que les travailleurs et travailleuses de la santé voient rouge.

Ceci qui explique le petit succès de la mobilisation du 8 novembre contre la loi Santé et la casse de l’hôpital, appelée par l’intersyndicale FO-CGT-Sud et près d’une vingtaine d’organisations d’infirmiers salariés et libéraux.

La participation aux manifestations a été diverse (moins suivie à Paris) mais nombreuse et dynamique dans un certain nombre de villes de province où elle est apparue comme une occasion de montrer son ras-le-bol.

On a compté quelques 1 000 personnes à Toulouse, 1 000 à Bordeaux, 1 500 à Lyon, 2 000 à 3 000 à Marseille, et des rassemblements à Besançon, Metz, Grenoble, Rouen, Limoges, Quimper et bien d’autres villes. Parmi les manifestants, une majorité d’infirmières et infirmiers, mais aussi beaucoup d’aides-soignantes et d’autres salariés du secteur hospitalier. Bon nombre d’étudiantes infirmières, qui découvrent au cours de leurs stages la réalité de leur métier, sont aussi descendues dans la rue. Les infirmières libérales se sont aussi mobilisées, avec des revendications souvent spécifiques. Conséquence de cette majorité d’infirmières, la présence de slogans du type « Infirmières en colère, y’en a marre de la galère » à côté de ceux dénonçant les conditions de travail ou réclamant l’abrogation de la loi Santé.

À Lyon, par exemple, on a senti l’enthousiasme dans les cortèges, la jeunesse et l’envie d’exprimer un véritable ras-le-bol. Même si l’ambiance est à la convivialité, les réalités du monde du travail sont au cœur des discussions. Des manifestantes évoquent leur envie de quitter l’hôpital. D’autres, mobilisées sur leur journée de repos, racontent leurs CDD d’un à trois mois, renouvelés sur un an voire plus, pratique courante à l’hôpital. Certaines vivent leur première manif. Beaucoup garderont pourtant de cette journée une impression mitigée. Il est vrai que la grève est restée minoritaire. Ce qui, pour un début, n’a rien d’anormal. La hiérarchie assure la continuité des soins en assignant les grévistes, qui sont alors contraints de travailler – non sans afficher « en grève » sur leur blouse ! Ainsi, dans les Hospices civils de Lyon (selon les chiffres de la direction), les agents assignés représenteraient la moitié du total des grévistes !

À Limoges, autre exemple, après une heure de palabre syndicale, une manif s’est formée pour défiler dans le hall du CHU aux cris de « La santé n’a pas de prix », « Personnel, étudiants, usagers, tous ensemble pour le service public », « Ce ne sont pas des discours, c’est de l’embauche qu’il nous faut », « Embauche, embauche de tous les CDD », « Salariés épuisés, ça ne peut plus durer : embauchez ! » Puis la manifestation a traversé le CHU pour se rendre dans les nouveaux bureaux de la direction. Dans cet édifice flambant neuf, les manifestants se sont entassés dans les couloirs dans un brouhaha à la fois festif et revendicatif. Un adjoint du directeur est finalement sorti tout penaud pour promettre sous les quolibets qu’il y aura « concertation ». Une fille : « Des promesses, mais nous on crève ». Puis d’autres interventions fusent : « Ça fait trois fois en deux mois qu’on me rappelle pendant mes repos » ; « C’est plus possible, on doit toujours faire plus avec moins de personnel » ; « Pour faire votre boulot, vous avez du monde autour de vous, eh bien nous aussi on a besoin de monde » ; « Y’en a marre des changements d’horaires constants, on est épuisées, moralement et physiquement ». Finalement, sous l’insistance des syndicats, tout le monde repart aux cris de « On est bien ici, on reviendra, on restera. »

À Quimper  : avec la CGT et Sud Santé, les hospitalières et hospitaliers d’abord réunis devant l’hôpital Laënnec, ont reçu le renfort des comités d’usagers et du comité de défense des hôpitaux de proximité. Après les prises de parole, manif vers le conseil général et l’ARS. Les slogans étaient nets : « La santé n’est pas une marchandise, l’hôpital n’est pas une entreprise, c’est tous ensemble qu’il faut lutter, c’est tous ensemble qu’on va gagner ». Ou encore « C’est pas les hôpitaux qu’il faut fermer, c’est Marisol qu’il faut virer », puis « En route vers l’ARS : Agence de régression sociale ».

À Paris, par contre : après que les syndicats, les uns après les autres, eurent contribué à la démobilisation contre le plan de réforme des horaires à l’AP-HP il y a un an (plan qui passe aujourd’hui en application) la manifestation a pris un tour plus traditionnel sur le vote du budget au parlement, et a peu mobilisé.

Au lendemain de cette journée de manifestations, l’intersyndicale, tout en se félicitant de sa réussite, a appelé à une journée de grève et à une manifestation nationale pour le « premier trimestre » 2017. Cela fait bien loin… En tout cas, ce 8 novembre a été un bon coup de semonce contre la politique du gouvernement. À l’ensemble du personnel de santé de ne pas en rester là et de préparer la suite.

23 novembre 2016,

Aldino BATTAGLIA


À Paris : Clocher 

Malgré le relatif succès de la journée de manifestation de ce mardi, il y a eu quand même un petit quelque chose qui clochait dans le cortège de Paris, où étaient venus manifester plusieurs hôpitaux et Ifsi (Instituts de formations en soins infirmiers) de province. Tout le monde s’est retrouvé devant la gare Montparnasse. Le cortège syndical (avec essentiellement les hôpitaux parisiens) est parti de son côté. La seconde partie, animée plutôt par les organisations catégorielles d’infirmières, est restée sur place pour manifester en décalé. Alors que du côté des manifestants tout le monde se demandait « où sont les autres ? ».

Un sacré cafouillage qui semble plutôt tenir à l’esprit de clocher des organisateurs. La prochaine fois, fini le corporatisme, fini le catégoriel, ou le boutiquier, et on se débrouille nous-mêmes pour manifester tous ensemble.

Extrait du bulletin L’Étincelle de l’hôpital Avicenne du 9 novembre 2016

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