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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 98, mars-avril 2015

Parc Naturel Régional de Millevaches : Une usine d’engraissement de mille veaux en construction

Mis en ligne le 23 mars 2015 Convergences Société

L’inquiétude de la population grandit face à ce qu’on trouve dans nos assiettes. Derrière les déclarations lénifiantes du gouvernement sur la « qualité française » ou l’agro-écologie se cache la marche en avant forcée de l’agriculture entre les mains de firmes capitalistes. Une marche accompagnée par la FNSEA [1] qui, depuis des années, soutient toute politique visant à la disparition de la petite paysannerie. Son porte-parole, Xavier Beulin [2], a justifié les fermes-usines au Salon de l’Agriculture en prenant l’exemple de l’atelier d’engraissement de 1 000 jeunes bovins qui se construit en Creuse (Limousin) à Saint-Martial-le-Vieux (près de La Courtine), sur le territoire du Parc Naturel Régional de Millevaches.

La grande distribution et l’agroalimentaire pilotent le projet

La justification de ce projet est qu’il peut aider les éleveurs à engraisser les jeunes bovins sur place, dans cette zone de montagne, car le marché vers l’Italie où ils partaient traditionnellement se réduit. La SAS [3] « Alliance Millevaches » va regrouper 45 élevages actionnaires, qui fourniraient chacun 22 veaux pour un séjour de 250 jours dans l’atelier d’engraissement.

Qui retrouve-t-on pour monter et présenter le projet ? Entre autres, Pierre Chevalier (ex-président de la Chambre d’Agriculture de Corrèze, maintenant au ministère de l’Agriculture où il défend les intérêts d’Intermarché [4]. Or, c’est la Société Vitréenne d’abattage (SVA-Jean Rozé), filiale du groupe Intermarché, un des principaux opérateurs du marché de la viande en France qui s’engage à acheter la production et à la faire abattre à Ussel en Corrèze (mais jusqu’à quand, puisque Jean Rozé a racheté l’abattoir GAD en Bretagne ?).

Comment sont financés les bâtiments d’engraissement ? À 75 % par des fonds publics soit 1,1 million d’euros de subventions de l’État, de la région, du département et de la Communauté de communes des Sources de la Creuse, avec à la clé… trois emplois ! Par contre, la société Third Step loue les terrains et toitures en photovoltaïque, aménagements faits par la Communauté de communes qui couvrent tout juste ses frais d’emprunt avec la location. Et un projet de méthanisation des 15 000 tonnes de déjections bénéficiera à la société privée qui gérera la production d’électricité. Par contre, les revenus des éleveurs seront dépendants de la SVA-Jean Rozé qui s’engagerait sur six ans à commercialiser toute la production destinée « à des marchés du pourtour méditerranéen ».

La mobilisation des 1 000 voix paysannes contre le projet

Les agriculteurs de la Confédération paysanne [5] du Limousin pensent qu’il faut « installer et maintenir des agriculteurs-éleveurs répartis sur le territoire, sur des fermes à taille humaine, avec relance de la production locale de protéines fourragères et aide à l’engraissement sur la ferme ou en petits ateliers collectifs ».

Avec eux, les membres du collectif « 1 000 voix – Novissen [6] Creuse » dénoncent la concentration d’animaux qui entraînera l’utilisation importante de médicaments antibiotiques ou anti-infectieux qu’on retrouvera dans la viande et les déjections. Le montage de cette production « hors sol » va générer des aménagements publics coûteux (forages pour fournir 40 mètres-cubes d’eau par jour, etc.).

Dans cette histoire d’atelier d’engraissage, l’offre de débouchés pour l’élevage local n’est mise en avant que pour favoriser un projet industriel au bénéfice de firmes capitalistes. Et les éleveurs risquent de se retrouver piégés, comme les producteurs de lait ou les éleveurs de porcs, dans une course à la compétitivité et dans l’incapacité de contrôler leur revenu, pas plus que la qualité de leur production !

6 mars 2015, Élise MOUTIER


[1Fédération Nationale des Exploitants Agricoles

[2Aussi président du groupe agro-industriel Sofiprotéol, holding financier et opérateur industriel de la filière des oléoprotéagineux, des producteurs aux transformateurs, en passant par la recherche et la commercialisation. Parmi ses filiales on compte Lesieur, premier groupe français des huiles végétales, Diester Industrie, leader sur le biodiesel ou encore Glon Sander, lui aussi leader dans la nutrition des animaux d’élevage.

[3Société par Actions Simplifiées

[4En février 2014, il a accompagné la restructuration de la filière pêche à Boulogne, dont 80 % de la flotte française est gérée par Intermarché.

[5Voir la carte des fermes-usines sur le site : http://www.confederationpaysanne.fr...

[6Nos Villages Se Soucient de leur Environnement, ou « Nos vies saines » né en 2010 contre l’usine à lait des 1 000 vaches de la Somme.

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