Aller au contenu de la page

Attention : Votre navigateur web est trop ancien pour afficher correctement ce site internet.

Nous vous recommandons une mise à niveau ou d'utiliser un autre navigateur.

Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 68, mars-avril 2010 > DOSSIER : En Europe, comme aux Etats-Unis, les mêmes attaques

DOSSIER : En Europe, comme aux Etats-Unis, les mêmes attaques

Espagne : Crise et attaques gouvernementales

Mis en ligne le 11 avril 2010 Convergences Monde

L’Espagne a été un des pays européens les plus durement touchés par la crise. Le secteur immobilier d’abord, après un boom fondé sur la spéculation dans les années 2000, s’est effondré dès le début 2008 : 300 000 chômeurs de plus sur ce seul secteur. Puis, avec la crise financière mondiale de l’automne 2008, la crise a atteint tous les secteurs : licenciements et chômage partiel à la pelle. Il y a aujourd’hui officiellement quatre millions de chômeurs, soit un taux de presque 20 % (le deuxième d’Europe), alors qu’il était de 10 % en 2007. Les agences pour l’emploi sont débordées, dans certaines il faut faire la queue dès six heures du matin pour avoir une chance d’être reçu au guichet.

Face à la crise et ses conséquences sociales, le gouvernement n’a su qu’aider les banquiers, bien sûr, mais aussi les constructeurs automobiles : 250 millions d’aides à ce secteur en 2010, avec la plus grosse part pour Peugeot qui va toucher 34 millions d’euros, sans compter la mise en place d’une prime à la casse et d’autres aides indirectes à ce secteur... Gouvernement et régions ont aussi largement signé les autorisations que les patrons demandaient pour leurs plans de licenciement. Le gouvernement étant de gauche, il se devait d’annoncer quelques mesures sociales (comme une aide supplémentaire de 420 € mensuels pendant six mois maximum pour les chômeurs en fin de droit) et de jurer que jamais il ne céderait à la revendication patronale de plus de flexibilité dans les contrats de travail.

Mais les cadeaux nombreux au patronat et la baisse des rentrées dans les caisses de l’État ont mis en difficulté les finances publiques. Le déficit a atteint 11 % du PIB en 2009 et la dette publique augmente. Une situation qui a invité les spéculateurs de tout poil à s’attaquer à l’Espagne comme ils s’attaquaient à la Grèce. Et l’Espagne, qui tient aujourd’hui la présidence tournante de l’Union Européenne, a donné l’exemple d’un plan de mesures draconiennes.

Le taux de TVA va passer de 16 à 18 %. La réforme du contrat de travail arrive (que la droite et les patrons réclamaient depuis le début de la crise), qui devrait permettre plus de flexibilité (alors que la précarité touche déjà massivement les travailleurs en Espagne) et des licenciements moins coûteux. Si les détails seront précisés à l’issue d’une négociation sociale en cours, il est significatif que les premières annonces gouvernementales aient satisfait le syndicat patronal, la CEOE... autant que les principales centrales syndicales, UGT et CCOO, heureuses d’être à la table des négociations. Réforme aussi des retraites, avec le recul annoncé de l’âge de 65 à 67 ans, ainsi qu’une refonte du calcul qui aboutirait à une réduction des retraites. Et, finalement, l’austérité dans la fonction publique : gel des salaires et retraites des fonctionnaires, et quasi-gel de l’embauche. Le gouvernement annonce que 7 % des effectifs de la fonction publique partiront à la retraite dans les trois prochaines années... et que ne sera remplacé qu’un poste vacant sur dix.

C’est à l’occasion de cette annonce d’une réforme des retraites que les deux principales centrales syndicales (UGT et CCOO) ont émis quelques critiques de la politique gouvernementale. Elles ont appelé à des manifestations le 23 février. Mais pas question d’aller vers une grève générale car, d’après le dirigeant des CCOO, « il n’y pas d’emplois dans une grève générale », « c’est l’activité économique qui les génère ». Un appel donc du bout des lèvres, qui a pourtant réuni quelques dizaines de milliers de manifestants dans les grandes villes.

Par ailleurs, les plans de licenciements suscitent des réactions ouvrières, avec des manifestations et des grèves plutôt visibles localement. Des réactions qui permettent parfois de gagner quelques indemnités en plus, ou des refus de validations de ces plans par les autorités régionales. Mais ces luttes demeurent largement isolées. Surtout que la politique des deux principales centrales syndicales face aux licenciements collectifs est de chercher à négocier de « meilleurs accords » avec le patron, pour obtenir ce qu’elles présentent comme des améliorations, et mettre leur signature au bas de ces plans (en organisant parfois des consultations de salariés comme à Opel pour leur faire entériner par un vote des plans prévoyant licenciements et gels de salaires).

Des travailleurs ont aussi lutté sur les salaires ces derniers temps, ou sur les conditions de travail. Une grève de la compagnie des chemins de fer Renfe à la veille des départs pour les vacances de Pâques, pourtant à l’appel du seul syndicat CGT, minoritaire, a significativement perturbé la circulation des trains. Des employés de sous-traitants privés de la ville de Jerez réclament... le paiement de leurs salaires en retard.

Si le gouvernement socialiste a pu bénéficier ces dernières années d’un certain abattement des travailleurs espagnols face à la dureté de la crise, ainsi que de la complicité active des principaux syndicats, il n’est pas dit que les attaques ouvertes de Zapatero contre le monde du travail restent sans réactions.

Michel CHARVET

Mots-clés :

Imprimer Imprimer cet article