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La guerre en Afghanistan ... et en Palestine

26 octobre 2001

Les bombardements américains ne se contentent pas de faire des dommages collatéraux en Afghanistan. Ariel Sharon, le premier ministre israélien, justifie la guerre qu’il vient de relancer dans les territoires occupés par « la lutte contre le terrorisme international ». Avec le déploiement de blindés et l’occupation de six villes de Cisjordanie, dont Bethléem où les combats ont été les plus durs, il s’agit de l’opération militaire la plus importante dans les territoires occupés depuis des années. Les représailles israéliennes font suite à l’assassinat, le 17 octobre, du ministre démissionnaire israélien d’extrême droite Rehavam Zeevi par le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP). L’assassinat de ce Le Pen israélien, ministre du Tourisme, qui voulait expulser tous les Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie, était la réponse à l’exécution du leader du FPLP en septembre dernière par Tsahal, l’armée israélienne. Les représailles israéliennes ont fait 24 morts en cinq jours.

Bush, Sharon, à chacun son théâtre d’opérations

Pour Ariel Sharon, il s’agit d’exercer une pression supplémentaire sur Arafat et l’Autorité Palestinienne et surtout de contenter son extrême droite. De son côté, le gouvernement américain a demandé à son allié traditionnel une « riposte modérée » tout en invoquant la nécessité... d’un Etat palestinien. Il ne s’agit évidemment pas d’un retournement de la politique du gouvernement américain qui se fiche pas mal de la cause palestinienne. Mais les Etats Unis préfèreraient une certaine stabilité au Moyen Orient pour accomplir sans trop de remous leur « mission » en Afghanistan : montrer, fût-ce au prix de milliers de morts et de destructions sans nombre, qui commande dans ce monde.

Pour cela le gouvernement américain aimerait bien éviter d’affaiblir sa coalition et notamment le front des Etats du monde musulman qui lui sont inféodés. Tous ces régimes dictatoriaux se retrouvent en porte-à faux avec leurs populations en majorité hostiles à la présence et à l’intervention américaines. On ne peut parler de contestation majeure, ni même à ce jour de véritable mobilisation populaire contre l’intervention impérialiste en Afghanistan. Mais il y a un risque potentiel.

De ce point de vue, les initiatives de Sharon tombent mal en permettant aux intégristes islamistes du courant Ben Laden de se poser en défenseur de la cause palestinienne à peu de frais, tout en ravivant les tensions anti-américaines en Arabie Saoudite et ailleurs.

Du côté israélien, les travaillistes, membres du gouvernement de coalition, ont fait savoir avec la plus parfaite hypocrisie qu’ils démissionneraient en cas d’escalade incontrôlée. On se demande pourquoi ils ne l’ont pas déjà fait. Reste à savoir si la population israélienne elle-même est partante pour une nouvelle guerre prolongée.

Le gendarme du monde veut bombarder en paix

La naissance ou non d’un Etat Palestinien n’est pas un problème pour les Etats-Unis, ni même pour Israël, tant que le rapport des forces reste d’une façon écrasante en faveur de ce dernier. Le problème du gouvernement américain est de faire en sorte que cette région, avec ou sans Etat palestinien, soit stabilisée tout en restant sous contrôle israélien. Car l’impérialisme américain voudrait bien pouvoir mener ses propres représailles guerrières à grande échelle contre quiconque (ex allié ou agent stipendié) conteste son leadership... en toute tranquillité. Le conflit israélo-palestinien, en se pérennisant, cristallise les frustrations de centaines de millions de pauvres au-delà même du monde arabe, jusqu’en en Afrique noire et en Asie centrale, et les dressent encore un peu plus contre les Etats-Unis.

En réalité, il n’est pas si facile d’assumer le rôle de gendarme de la planète et l’on mesure en creux l’immense pouvoir potentiel des peuples contre les grandes puissances impérialistes et les dictateurs qui les représentent sur place. Le malheur, pour les peuples de la région et d’ailleurs, c’est que les nationalistes du type d’Arafat ou les islamistes à la Ben Laden n’ont rien à offrir aux populations que la misère dans des bantoustans ou cinq mille vierges dans l’au-delà. Le malheur, c’est qu’un sous-produit de la CIA tel que Ben Laden, puisse apparaître aujourd’hui, y compris auprès de la jeunesse palestinienne, comme le leader d’un parti international capable de tenir tête à l’impérialisme. Nasser, en son temps, dans un style plus laïque se disant progressiste, avait lui aussi cristallisé les espoirs de tout les peuples du monde arabe, avant de les décevoir. Un Ayatollah iranien sorti du moyen âge avait pris le relais dans le coeur des déshérités de la région, pour finalement vingt ans, plusieurs guerres et des millions de morts plus tard, laisser la place à un milliardaire saoudien. La faillite des leaders nationalistes a ouvert la voie à différentes formes de fascisme du tiers monde. Autant de preuves, par l’absurde, car il y a effectivement un grand vide à combler, de la nécessité objective d’un parti authentiquement internationaliste, représentant véritablement les intérêts des déshérités tout en combattant réellement l’impérialisme. Cela montre l’ampleur des tâches pour le mouvement ouvrier international à se présenter comme une alternative possible.

Tristan KATZ

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