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Accueil > Les articles du site > USA : droit des femmes… 50 ans en arrière !

La Pologne, autre théâtre du recul du droit à l’IVG

Mis en ligne le 28 juin 2022 Article Monde

Ce qui menace le droit des femmes américaines à disposer librement de leur corps est un aspect seulement d’une dynamique réactionnaire qui dépasse de bien loin les seules frontières des États-Unis. Fin 2020, en pleine crise sanitaire qu’il n’a ni su ni voulu gérer convenablement, le PiS (Droit et justice), parti ultra-conservateur et catholique aux manettes du gouvernement polonais, faisait passer une loi qui interdit l’avortement même en cas de grave malformation du fœtus. C’est ce qui donne à la Pologne le triste titre de législation la plus restrictive d’Europe en matière d’avortement. Ce n’est d’ailleurs pas la seule attaque venant du gouvernement polonais ces dernières années, la pilule du lendemain ayant été interdite sans ordonnance à l’été 2017.

Cette loi a déjà des conséquences dramatiques sur la vie des femmes polonaises. Le 22 septembre dernier, une femme de 22 ans est décédée des suites du refus des médecins de pratiquer l’avortement tant que le cœur du fœtus n’avait pas cessé de battre [1], ce qui a provoqué des manifestations de dizaines de milliers de personnes dans le pays. Aujourd’hui, seules quelques centaines d’avortements sont pratiqués, et les femmes qui en ont les moyens se trouvent obligées de voyager dans les pays limitrophes. Mais les plus pauvres sont bien souvent réduites à se procurer des pilules abortives sur le marché noir, ou à recourir à des avortements clandestins souvent coûteux pour leur santé.

Cette loi immonde a fait l’objet de protestations et de manifestations massives fin 2020, lorsqu’elle était encore à l’état de projet, manifestations d’où a émergé le slogan « PiS hors de nos chattes ! », qui exprime de manière imagée le rejet de ces politiciens obscurantistes se mêlant vraiment de ce qui ne les regarde pas et mettant les femmes en danger. Le mouvement Strajk Kobiet (« la grève des femmes »), déjà mobilisé en 2016 lors des premières tentatives du PiS d’interdire l’avortement en cas de malformation du fœtus, a organisé dès octobre 2020 un mouvement rassemblant des centaines de milliers de manifestants, ce qui était impressionnant dans un contexte sanitaire compliqué. Lors de la grève nationale du 28 octobre, on a assisté à plus de 400 manifestations organisées dans tout le pays, même dans les zones les plus rurales, rassemblant des femmes souvent très jeunes. Celles-ci ont bien souvent dû faire face au groupe Falanga, une milice nationaliste qui a déployé ses 10 000 membres pour s’opposer violemment aux manifestations.

Aujourd’hui, alors que la loi est passée, cela n’entame pas la détermination de nombreux manifestants, révoltés par les conséquences meurtrières de la politique réactionnaire du PiS, qui ne peut être remise en cause par les inoffensives tractations parlementaires au sein de la Diète (Parlement polonais). Alors, comme le dit Bożena Przyłuska, l’une des organisatrices du mouvement féministe qui a déferlé sur Varsovie, Cracovie et de nombreuses autres villes du pays en 2020, ce n’est pas une protestation qui suffira à faire reculer ce PiS criminel, mais « une révolution ». On ne le lui fait pas dire !

M. E.


[1Samuel Ravier-Regnat, « Avortement : la Pologne sous le choc après la mort d’une femme à l’hôpital », Libération, 3 novembre 2021 (https://www.liberation.fr/internati...)

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