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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 75, avril-mai 2011 > DOSSIER : Le nucléaire en question

Énergie et environnement : l’impasse du capitalisme

Derrière le débat sur la sortie du nucléaire, c’est, plus généralement, celui sur la production et la consommation d’énergie, et leur impact sur l’environnement et le climat, qui resurgit. La question du risque nucléaire ne peut être dissociée de celle des besoins énergétiques et des moyens d’y répondre.

Le nucléaire, une petite part du problème…

La consommation énergétique mondiale n’a cessé d’augmenter à une vitesse fulgurante durant les dernières décennies. Entre 1973 et 2008, elle est passée de 6,1 à 12,2 milliards de tonnes d’équivalent pétrole (TEP). [1] Dans la production d’énergie, dont un tiers dépend du pétrole, le nucléaire ne tient qu’une faible place (5,8 %). Pour la seule production électrique, cette part passe à 13,5 %, loin derrière le charbon (41 %) et après le gaz naturel (21,3 %). La situation française, avec plus de 77 % d’électricité d’origine nucléaire, est donc tout à fait atypique. Aux USA, premier producteur mondial d’électricité, la proportion se limite à 19,3 % contre 44,9 % pour le charbon. En Chine, où la production électrique a connu le développement le plus spectaculaire, le nucléaire ne pèse que 2 %, alors qu’elle reste à plus de 70 % basée sur le charbon. Plus généralement, la croissance de la production énergétique mondiale s’est même accompagnée d’une augmentation de la part du charbon dans la production d’électricité (de 38,3 % en 1973 à 41 % en 2008), avec les effets que l’on sait sur le réchauffement climatique.

… mais pas une solution

Si l’on se limite à la phase de production électrique, un réacteur nucléaire dégage bien moins de gaz à effet de serre qu’une centrale thermique. C’est d’ailleurs en s’appuyant sur ce faible impact climatique que les trusts du nucléaire, Areva et EDF en tête, développent une propagande présentant le nucléaire comme une « énergie d’avenir ». En l’état actuel des techniques de production, c’est simplement mensonger.

En premier lieu à cause des ressources en uranium qui, selon les estimations les plus optimistes, se mesurent en quelques dizaines d’années au niveau de la consommation actuelle. [2] Ensuite, le nucléaire pose bien d’autres problèmes qui ne trouvent, pour l’instant, pas de solution satisfaisante. En particulier celui des déchets : certains ont une durée de vie extrêmement longue et restent radioactifs à des doses dangereuses pendant des milliers d’années. Cela n’est pas absolument spécifique : la pollution aux métaux lourds (plomb, mercure, etc.) n’a, par exemple, pas de limite de durée. Ce qui n’enlève rien au problème que posent les déchets du nucléaire.

Pas un problème de technique, mais d’organisation sociale

Cela dit, le nucléaire n’est pas plus la réponse miracle aux problèmes énergétiques que la source de tous les maux de la planète. On aurait tort de considérer la technologie indépendamment de l’organisation sociale qui la met en œuvre, et d’envisager les problèmes environnementaux (comme leurs éventuelles solutions) indépendamment de la société qui se les pose, de la classe sociale qui organise la production.

Il est impossible au capitalisme de planifier la production en fonction des besoins humains, dont la préservation d’un environnement viable fait, ô combien, partie. Même débarrassée des gaspillages du capitalisme, l’humanité aura des choix à faire et il faudra peser les risques immédiats comme différés que font courir les différents moyens de produire. Pour l’orientation générale de la production comme le fonctionnement quotidien des installations, ce n’est que par le contrôle constant, organisé et centralisé des travailleurs (au premier rang ceux des secteurs concernés) que de tels choix pourront se poser rationnellement. Il ne s’agit certes pas d’attendre d’en avoir fini avec le capitalisme pour se poser le problème. Mais envisager sa solution, c’est revendiquer dès aujourd’hui le contrôle ouvrier sur la production énergétique.

Yves LEFORT


Quel avenir énergétique ?

En l’absence de recyclage du combustible, le nucléaire comme source de production électrique, n’a pas plus d’avenir que les énergies fossiles – moins que le charbon en l’état des réserves connues. Mais des techniques de « surgénération » pourraient permettre ce recyclage, prolongeant considérablement les ressources… au prix toutefois des risques inhérents à l’industrie nucléaire. L’humanité pourra-t-elle se passer de tels risques pour répondre à ses besoins énergétiques ? Ce serait souhaitable mais la réponse en termes d’énergies véritablement renouvelables n’apparaît pas aujourd’hui assurée. S’il est donc indispensable d’encourager la recherche et le développement de ces solutions et d’y consacrer les budgets suffisants, le pari de principe d’un avenir sans nucléaire est plus discutable.

Surtout lorsqu’il s’oppose à des projets de recherche sur la fusion… uniquement parce que nucléaire ! Le but d’un projet comme Iter  [3] est de vérifier si ce procédé qui, dans son principe, utilise un combustible abondant sans produire quantité de déchets radioactifs à vie longue, est maîtrisable. Cela implique des investissements considérables, avec des enjeux étatiques au service d’intérêts financiers, mais aussi scientifiques – comme souvent en recherche.

Y. L.


[1Chiffres fournis par l’Agence Internationale de l’Énergie et tirés de l’édition 2010 des Key World Energy Statistics qu’elle publie. Les chiffres les plus récents, utilisés ici, concernent l’année 2008.

[2AIE : World Distribution of Uranium Deposits (UDEPO), Édition 2009.

[3International Thermonuclear Experimental Reactor.

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