Lundi 18 janvier :
Réprimée rapidement, la manifestation à l’appel d’antifascistes n’a rassemblé que 300 à 400 personnes et n’a pas pu atteindre l’avenue Habib Bourguiba – grande avenue du centre de Tunis – vers laquelle elle se dirigeait. Dans le même temps, le chef du gouvernement Hichem Al-Mechichi se rendait dans un quartier populaire de Mnihla (commune de l’agglomération de Tunis) pour aller affirmer aux jeunes que « le droit de protester ne doit pas être transformé en droit de vol, de pillage » en soulignant que cette « violence inacceptable » devra faire face à « la force de la loi ».
Pour bien faire comprendre le message, le ministère de l’Intérieur annonçait déjà 632 arrestations. Dans la journée, l’armée était déployée dans les gouvernorats de Sousse, Kasserine, Bizerte et Siliana et le soir même les blindés de la garde nationale patrouillaient dans les rues de Hay Tadhamon, l’un des plus grands quartiers populaires de la banlieue de Tunis. La rumeur courait que le mouvement de nuit allait s’amplifier, même dans les quartiers riches ! Si quelques heurts ont à nouveau eu lieu, notamment dans le gouvernorat de Monastir, ou à Nabeul dans le nord-est, les dispositifs répressifs et les arrestations de la journée ont sans doute dissuadé de nombreux jeunes, souvent très jeunes, de sortir cette nuit-là.
Mardi 19 janvier :
À Sfax, un rassemblement s’est tenu devant l’hôtel de la municipalité pour dénoncer la situation sociale et économique et la répression brutale à l’encontre de la jeunesse. À Tunis, après l’échec de la veille, une marche pour la libération des interpellés des émeutes nocturnes a fait irruption sur l’avenue Habib Bourguiba.
Ghannouchi, dirigeant du mouvement Ennahdha (islamiste) et chef de l’ARP (Assemblée des représentants du peuple), affirme qu’il comprend les jeunes mais leur rappelle que « brûler des voitures ne fournit ni un travail, ni une vie décente », en exhortant les protestataires à se rassembler pour « sauver le pays ». Les médias sortent des articles du type : « Le coût exorbitant des protestations… Qui les finance ? » Le président Kaïs Saïed a fait une déclaration officielle vers 20 heures 30 en ressortant – outre une digression sur les juifs qui pillent le pays – le « je vous ai compris » que Ben Ali avait déjà sorti dans sa dernière intervention publique, juste avant de prendre la fuite le 14 janvier 2011 direction l’Arabie saoudite.
Le soir même, des émeutes se sont renouvelées dans le gouvernorat de Monastir ou de Sidi Bouzid, le quartier Al-Nour à Kasserine ou d’Al-Tadamon à Tunis, et à Sidi Hussein à proximité de Tunis.
Nora Debs
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