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Cinéma

Séjour dans les monts Fuchun

12 juillet 2020 Article Culture

Ce film de Gu Xiaogang emprunte son titre à une célèbre peinture chinoise du xive siècle, un rouleau de plus de cinq mètres de long. Comme cette peinture, le film de deux heures trente se déroule lentement comme un long rouleau. Il a été filmé à Fuyang, la ville natale du réalisateur, une métropole en pleine mutation, située dans une boucle du fleuve Fuchun, à une cinquantaine de kilomètres en amont de Hangzhou, la capitale de la province du Zhejiang (province côtière chinoise, au sud de Shanghai). Le tournage s’est déroulé pendant deux ans au rythme des saisons, avec un petit budget et des acteurs amateurs.

Cette chronique familiale, sur fond de transformation incessante du pays, est celle de trois générations d’une famille modeste. La mère, âgée de 70 ans, a des soucis de santé et perd peu à peu la boule. Ses quatre fils, tous des « bras cassés » selon les mots d’une des personnages, se débattent avec des problèmes matériels sans fin. L’aîné tient un restaurant avec sa femme, travaille beaucoup mais a fait des investissements hasardeux. Sa femme et lui veulent marier leur fille unique à un bon parti. Le second est pêcheur, travaille très durement pour pas grand chose avec sa femme et se retrouve contraint de vivre dans sa barque pour assurer l’avenir de leur fils ouvrier, logé dans le dortoir de son usine. Le troisième, qui s’occupe seul (sa femme l’a quitté) d’un fils trisomique, joue… et doit de l’argent à la mafia. Quant au quatrième, âgé de 37 ans, c’est encore un grand enfant.

Les travaux, dans la perspective de Jeux olympiques en 2024, sont omniprésents. Ils doivent permettre la construction d’un métro qui reliera la ville à Hangzhou. Mais ils sont surtout le fait de promoteurs avec des projets de résidences et centres commerciaux modernes et luxueux… dont le prix exorbitant écarte les ouvriers ou enseignants comme on le voit dans le film.

La lutte pour la survie quotidienne est au cœur des préoccupations des différents personnages et les pousse à se déchirer : qui va prendre en charge la mère… qui doit de l’argent à qui, comment financer le mariage du fils et son appartement… La troisième génération est composée d’enfants uniques, un des seuls éléments de rappel de la politique chinoise de la fin du xxe siècle, le Parti communiste étant absent du film.

La religion est bien présente, elle, sous la forme de traditions essentiellement… dont certaines, comme l’autorité des parents, entre autres en matière de mariages arrangés, sont rejetées par les plus jeunes.

La chronique est livrée par petites touches, le spectateur passe d’un personnage à l’autre, c’est un peu perturbant au début mais il faut se laisser porter.

La beauté des images – celles de la nature comme celles des paysages urbains – est remarquable et contraste avec la dureté, voire le côté glauque, de la vie des personnages, de leurs mesquineries et égoïsmes. Mais ces personnages se révèlent peu à peu attachants… et on est heureux d’apprendre à la fin que le film est le premier volet d’un ensemble (une trilogie). À noter la maitrise technique du réalisateur (travellings, longs plans séquences, lumière).

Sorti en janvier 2020, le film est encore visible dans quelques cinémas, ce qui est préférable pour le découvrir… mais il est disponible en VOD et DVD.

Liliane Lafargue

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