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DOSSIER : Elargissement à 25, nouvelle constitution : l’Union européenne, une menace pour les travailleurs ?

Le mouvement ouvrier européen reste à construire

Mis en ligne le 14 mai 2004 Convergences Monde

Ces dernières années les « euromanifestations » rassemblant des milliers de syndicalistes de différents pays, ont semblé se multiplier : Porto en juin 2000, Nice en décembre de la même année, Bruxelles en décembre 2001, Barcelone en mars 2002, sans parler des rassemblement altermondialistes de Gênes ou de Florence où les syndicats formaient une bonne partie des participants. L’idée que le mouvement syndical a intérêt à s’unir et se montrer à l’échelle européenne est manifestement dans l’air comme d’ailleurs celle que les différents courants politiques se doivent de créer des partis européens, même si ceux-ci, à l’instar du Parti socialiste européen auquel adhère le PS français ou encore le Parti de la gauche européenne qu’a joint le PCF, n’ont pas d’existence réelle.

Lobby plus que syndicat

Ainsi après la récente adhésion de la CGT, les trois principales confédérations syndicales françaises sont officiellement regroupées dans la même CES, Confédération européenne des syndicats, un léger paradoxe puisqu’elles restent divisées à l’échelle nationale et quand on sait le peu d’empressement qu’elles mettent généralement à mettre sur pied des actions communes. L’Europe serait-elle plus bénéfique que la France pour l’unité du mouvement syndical ?

En fait la CES, malgré les quelques manifs qu’elle a organisées ou auxquelles elle a participé ces dernières années, ne conçoit guère son rôle que comme un lobby visant à faire pression, comme tous les autres lobbies, sur les décisions de la commission de Bruxelles. Ainsi déclare-t-elle vouloir « influencer les institutions européennes pour que l’Europe joue son rôle, sur la base du modèle social européen, dans la réalisation d’une mondialisation qui s’inspire de la justice sociale, des principes démocratiques et du développement durable », ajoutant que « l’Union Européenne peut constituer un antidote et un contrepoids face à une mondialisation débridée ».

L’accord pour seul but

S’adressant aux commissaires européens plutôt qu’aux travailleurs des différents pays, on comprend qu’elle préfère aux revendications claires des formules vagues, faites pour ouvrir des négociations (mais de ce point de vue, les confédérations nationales n’ont aucune raison d’être dépaysées). Par exemple, aucune revendication chiffrée concernant le salaire minimum européen (une question brûlante pourtant avec l’élargissement à 25) qui se retrouve inclus dans la liste des « droits fondamentaux », comme le « droit au travail », le « droit au logement », le « droit à des services publics efficaces », « le droit à une retraite »... Concernant les licenciements, la CES propose de « réconcilier la compétitivité et les objectifs sociaux », en incluant des dispositions « en faveur de la consultation des salariés ». Et face à la privatisation des services publics, sa revendication est « l’ouverture des marchés de manière contrôlée et durable »  !

Comme le résume Emilio Gabaglio, secrétaire général de la CES de 1991 à 2003 « la vraie percée de la CES est (...) dans les relations avec le patronat européen ». Et il se félicite d’avoir pu faire intégrer dans le traité de Maastricht la reconnaissance de « la capacité de la CES à négocier des accords cadres au nom des salariés européens » qui consacre ainsi la CES comme « un véritable instrument de négociation collective », pouvant négocier directement avec le patronat ! C’est dans ce cadre qu’ont été négociés trois accords conventionnels qui ont ensuite été avalisés par le Conseil européen, l’un sur le congé parental, l’autre sur le temps partiel et le troisième sur le « travail atypique » c’est-à-dire le travail précaire. Et Emilio Gabaglio de commenter : « dans cette culture du partenariat, le processus en lui-même, c’est-à-dire négocier des accords pour négocier des accords prévaut sur le contenu des accords. Pour s’affirmer et être reconnu comme acteur central, il faut produire des accords, à la limite quels qu’ils soient ».

Les courroies de transmission... de l’UE sur les syndicats

Les salariés auraient bien besoin d’organisations qui pensent leur action et visent à coordonner les revendications et les luttes à l’échelle européenne, et aident ainsi à extirper les idées chauvines qui divisent les travailleurs. Mieux vaut une CGT qui appelle à défiler avec les travailleurs allemands à Bruxelles que celle qui appelait jadis à « produire français ». Malheureusement la principale influence de la CES ne se fait pas sentir dans cette direction.

Elle se veut courroie de transmission entre les syndicats et les institutions européennes. Mais dans la pratique, sous le prétexte d’exercer une pression sur les institutions pour faire entendre la voix des syndicats ouvriers... elle exerce surtout une pression des institutions sur les syndicats. Ainsi l’adhésion de la CGT a coïncidé avec un tournant dans le discours de cette confédération en direction de la collaboration de classe.

En fait la construction d’un mouvement ouvrier européen sera inséparable d’un renouveau de la lutte des classes. Toute construction au sommet, nationale ou internationale, ne s’appuyant pas sur une activité militante à la base ne peut qu’être un instrument de plus de contrôle du mouvement ouvrier par les institutions qui se rajoute à tous les liens qu’a l’Etat et qui enchaînent déjà les organisations ouvrières.

Simone CANETTI

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