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Jim Harrison : Dans les grands espaces, un géant de la littérature américaine

30 mars 2020 Article Culture

Confinement oblige, voilà qui donne envie de parler d’un écrivain américain des grands espaces : Jim Harrison. Surnommé le « Big Jim », mais aussi le « Pantagruel du Michigan » ou le « Gargantua yankee » en référence à l’écrivain du xvie siècle français Rabelais, Jim Harrison (né James Harrison en 1937 et décédé en 2016), est un écrivain, poète dont l’œuvre importante, quatorze romans, des recueils de poésie et des récits pour enfants, s’inscrit complètement dans les espaces naturels des États-Unis mais aussi dans leur histoire. Paradoxe que cet ancrage très américain pour un homme qui disait « se ‘fiche’ du nationalisme en littérature » et « croire en une littérature mondiale ».

Harrison est né dans une famille de fermiers d’origine suédoise, dans le Michigan Son enfance est marquée par un accident survenu alors qu’il a sept ans et qui le rend borgne, donc à moitié aveugle. La même année, il reçoit un manuel de survie où deux jeunes blancs apprennent à vivre dans la forêt pendant un mois, comme des Indiens. Il s’identifie à eux et développe deux passions qui ne vont plus le quitter : la première pour la « vie sauvage », la nature à laquelle il est attaché par les sens et par l’esprit ; la seconde pour la culture indienne. De nombreux personnages d’Indiens sont présents dans ses romans, dont Chien Brun (héros de plusieurs récits), et l’auteur dénonce inlassablement les crimes contre l’humanité qu’ont été les guerres indiennes (1770-1890). Il pointe le fait que son pays s’est construit dans le sang, par le massacre des Indiens, qu’il s’est fourvoyé au Vietnam et lui reproche de n’être obsédé que par l’argent : « un Disneyland propret et joli, sans excès, politiquement correct où l’on ne boit pas, ne fume pas. Un Disneyland fasciste ».

Jim Harrison entre en littérature par la poésie

Il cherche des trouvailles poétiques, et fait de nombreux petits boulots pour vivre. C’est par accident qu’il vient au roman (au sens strict car il est blessé et un ami écrivain lui conseille alors ce genre littéraire). Son premier roman, Wolf, est un succès et Hollywood recrute Harrison comme scénariste. Une expérience qu’il déteste, dont il garde un petit papier au-dessus de son bureau, avec la phrase lancée par un patron de studio « tu n’es rien qu’un écrivain »… Mais il en ressort avec suffisamment d’argent (qu’il n’a pas flambé en alcool et cocaïne) pour être libre, parcourir les États-Unis et écrire.

Ses romans ont pour cadre les grands espaces américains

C’est la nature dans ce qu’elle a encore de sauvage qu’il décrit avec lyrisme et avec réalisme. Ses personnages s’y réfugient pour chasser, pêcher, fuir leurs démons ; prennent la route et errent en quête d’eux-mêmes. Ce sont le plus souvent des marginaux, appartenant à des minorités (amérindiens), qui n’ont pas d’histoires particulières si ce n’est celles de leurs déchirures, de leur détresse, de leurs maladresses. Des personnages qui nous ressemblent. L’auteur disait d’ailleurs : « Il faut donner une voix aux gens qui n’en ont pas ; c’est la responsabilité de l’écrivain ».

Jim Harrison est aussi le peintre du désespoir, de la fatalité et de la nostalgie, qu’il traite aussi par le rire et une écriture truculente (voir le portrait de Chien Brun, son héros). Les jouissances de la vie sont à l’honneur dans son œuvre, dans les domaines de la nature, de la nourriture et du sexe.

Deux romans de Harrison se détachent, considérés comme des chefs-d’œuvre

Il s’agit de Dalva (1987) et de La route du retour (1998). Ils forment un ensemble où l’on retrouve les mêmes personnages. Il s’agit d’une odyssée familiale sur cinq générations américaines, où se rencontrent des immigrés d’Europe du Nord et des Amérindiens. Le récit balaye plus d’un siècle d’histoire des USA, de la fin de la Guerre civile et des guerres indiennes de la deuxième moitié du xixe siècle, aux années 1980, en passant par les guerres de Corée et du Vietnam. Une place importante est faite aux carnets de l’arrière grand-père, qui tourna le dos à la politique des dirigeants de son pays et à sa religion pour prendre fait et cause pour les Sioux.

Dalva, un beau portrait de femme libre et indépendante

Elle part à la recherche de son enfant perdu et revient vivre dans le domaine familial dans le Nebraska. Harrison joue sur les contrastes et les paradoxes, par une écriture à la fois sobre et truculente ; par un ton à la fois ironique et volontairement naïf ; par l’alternance de situations loufoques et dramatiques. C’est une quête de soi poétique mais extrêmement réaliste, avec toute la palette des relations humaines, dont amoureuses.

Toute l’œuvre de Jim Harrison est publiée en édition de poche…

Liliane Lafargue

(Illustration : image extraite d’un reportage de La grande librairie https://www.youtube.com/watch?v=3OH...)

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