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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 44, mars-avril 2006 > DOSSIER : L’immigration, cible des démagogues

DOM-TOM : Tristes tropiques !

En septembre 2005, le ministre de l’Outre-Mer, François Baroin, dénonçait l’immigration dans certains DOM et TOM. En pointant en particulier les femmes qui viennent accoucher sur le territoire français, il préconisait une législation exceptionnelle pour y limiter le « droit du sol ». Proposition depuis abandonnée, mais le but recherché était atteint : insister sur l’immigration comme cause de tous les maux, y compris dans l’outre-mer.

Les possessions françaises se trouvent au milieu de zones où la misère est la règle. Haïti, un des pays des plus pauvres de la planète, est à portée de bateau de la Guadeloupe. La Guyane partage sa forêt avec le Brésil, le Surinam. L’île de Mayotte, demeurée « française », n’est qu’à quelques dizaines de kilomètres des autres îles de l’archipel des Comores indépendantes depuis 1975. Et, si ces DOM ou TOM sont souvent marqués par la pauvreté, le chômage, le manque d’infrastructures, ils demeurent plus développés que leurs voisins. Ainsi, des Anjouanais entreprennent la traversée pour atteindre Mayotte, pour avoir accès à des soins ou pour travailler comme domestique chez des fonctionnaires ou des riches Mahorais, dans les champs ou les chantiers du bâtiment. Payés au noir bien au-dessous du minimum local (qui n’est que de 552 €... à Mayotte), ils logent dans des taudis. Une traversée pourtant risquée : ce sont plus de 1 000 Comoriens qui sont morts dans des naufrages ces dix dernières années.

Alors que les Anjouanais et les Mahorais partagent culture et langue, lorsqu’ils ne sont pas parents, l’État français considère les uns comme ses ressortissants (même de seconde zone...), et les autres comme des « étrangers ». La politique policière y est violente : rafle, détentions dans des conditions indignes, expulsions par charters : on a compté plus de 6 000 expulsions de Mayotte pour l’année 2005, et Sarkozy voudrait doubler les chiffres pour 2006.

L’État traite aussi sans ménagement les Haïtiens qui travaillent dans les plantations et les chantiers des Petites Antilles. En janvier 2004, en Guadeloupe, un homme de 60 ans a été arrêté à un barrage, menotté et roué de coups par les gendarmes... qui croyaient avoir affaire à un Haïtien clandestin.

La démagogie de Baroin a malheureusement de l’écho dans les DOM-TOM. Ses déclarations contribuent à légitimer les discours de politiciens xénophobes. Contre les Haïtiens aux Antilles, contre les Anjouanais à Mayotte, ou contre les Comoriens (Mahorais compris... malgré la nationalité française) à la Réunion.

À Mayotte, des municipalités ont exclu des enfants des écoles, et des véritables chasses à l’homme ont été organisées, mettant à feu des paillotes d’« étrangers ». Une pétition xénophobe a circulé aux Antilles, promue par la station Radio Contact au discours particulièrement nauséabond. Le vice-président du Conseil général réunionnais a proposé la mise en place de tests ADN pour lutter contre les prétendues reconnaissances frauduleuses de paternité : cela a heureusement provoqué l’indignation et 200 manifestants sont venus le prendre à partie pour qu’il présente ses excuses.

Le nouveau projet de loi de Villepin et Sarkozy prévoit, entre autres, d’accélérer les procédures d’expulsion en limitant les recours, favorisant ainsi les exactions et multipliant les brimades à l’égard des « étrangers » des DOM-TOM.

Michel CHARVET

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