Blanc autour, une BD de Wilfrid Lupano et Stéphane Fert
Dargaud, 2020, 144 p., 19,99 €
Quand la première école pour jeunes filles noires ouvrait dans l’Amérique esclavagiste…
L’histoire de Blanc autour traite de la création de la première école pour jeunes filles noires, près de Boston aux États-Unis en 1832. Elle est inspirée de l’histoire vraie de Prudence Crandall, l’institutrice qui fonda l’école, et de son combat pour imposer le droit à l’éducation pour tous à une époque où l’esclavage était encore en vigueur.
Dès la première planche, les auteurs donnent le ton en plaçant dans la bouche de l’un des personnages des extraits authentiques du journal de Nat Turner, l’esclave qui mena une révolte explosive à peine une année plus tôt. Présentés comme des bourreaux sanguinaires, Nat Turner et les siens, qui étaient allés jusqu’à égorger plusieurs propriétaires d’esclaves, hantaient encore les cauchemars des propriétaires d’esclaves et des riches bourgeois de l’époque. C’est dans ce contexte que Prudence Crandall décide à la rentrée scolaire de 1832 d’accueillir pour la première fois dans sa classe celle qui jusqu’alors ne s’occupait que du nettoyage de l’école, pour en faire sa première écolière noire.
La réaction est immédiate : l’ensemble des parents d’élèves, avec l’appui de toute la société, décide de retirer leurs enfants de l’école. Celle-ci n’accueillera plus alors que des jeunes filles noires. Une école « non-mixte » dirait-on aujourd’hui ? Certes, mais bien malgré elle. Car c’est toute l’Amérique bourgeoise et raciste de l’époque qui l’a voulue comme telle. Petite piqûre de rappel bien à propos à l’heure où les sénateurs français, presque tous riches, âgés et blancs, votaient dernièrement pour pouvoir dissoudre les organisations organisant des réunions non-mixtes.
Le combat de Prudence Crandall et des écolières ne fait alors que commencer… La plongée dans cette bande dessinée, à réaliser sans hésitation, vous dira la suite. Car le propos de fond est servi par des dessins magnifiques où chaque cartouche est un petit tableau sur lequel s’attarder, de longues secondes à chaque fois. Les écolières sont aussi toutes drôles et attachantes.
Quant au combat pour l’éducation pour tous et contre le racisme, il semble qu’il n’ait pas pris une ride depuis 1832…
Vladimir Akali
Mots-clés : Bande dessinée | Racisme | USA