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Un essai réjouissant sur l’histoire des luttes féministes en France

Rage against the machisme, de Mathilde Larrère

Éditions du Détour, 224 pages, 18,9 €

28 juin 2021 Article Culture

Mathilde Larrère, historienne, spécialiste des révolutions du XIXe siècle, enseignante-chercheuse à l’université de Paris-Est-Marne-la-Vallée, dresse en 196 pages une histoire des luttes des femmes en France, à la fois complète et très accessible.

Le ton est donné dès l’introduction : l’autrice refuse de réduire ces luttes aux trois vagues dont il est souvent question : droit de vote pour la première, IVG pour la seconde et MeToo ou luttes contre les violences pour la troisième. En effet, cela évacue les combats pour le travail, comme les questions de classes sociales et de lutte des classes. . Pour sa part, Mathilde Larrère fait commencer les luttes des femmes à la Révolution française, tout en reconnaissant qu’il y en a eu auparavant.

Elle veut mettre en avant les femmes travailleuses, « racisées » et lesbiennes qui ont beaucoup apporté aux luttes féministes françaises mais sont oubliées et rendues invisibles dans l’histoire, y compris celle du féminisme.

L’ouvrage est organisé en onze chapitres thématiques, entremêlés de textes de slogans, discours ou affiches et complétés par une chronologie et une bibliographie très riches.

Mathilde Larrère se penche sur l’implication importante des femmes de milieux populaires, notamment dans les révolutions de 1789 à la Commune. Elle évoque les luttes de travailleuses comme celles des sardinières (ouvrières d’usines de sardines) de Douarnenez et Concarneau en 1905 et 1924.

Elle n’oublie pas la lutte pour le droit de vote bien sûr, avec pour conclure ce chapitre un «  florilège des raisons bien pourries opposées aux femmes qui voulaient voter ou être élues », par exemple « Si on donne le droit de vote aux femmes, après, les bœufs voudront voter », Le Figaro 1880…

Des sujets comme les femmes colonisées, la prostitution, le viol sont également abordés, toujours remis dans leur contexte et avec l’évolution qu’ils ont connue.

On apprend ainsi que les réunions de sociétés ou clubs de femmes en 1848 ou 1870 étaient des réunions non mixtes ! Que la masculinisation du langage a été dénoncée par des femmes dès la Révolution française et au XIXe siècle comme le montre cette citation de Hubertine Auclert en 1898 : « l’omission du féminin dans le dictionnaire contribue plus qu’on ne le croit à l’omission du féminin dans le droit. L’émancipation par le langage ne doit pas être dédaignée. (…) La féminisation de la langue est urgente, puisque pour exprimer la qualité que quelques droits conquis donnent à la femme, il n’y a pas de mots. (…) Quand on aura révisé le dictionnaire et féminisé la langue, chacun de ses mots sera, pour l’égoïsme mâle, un expressif rappel à l’ordre ».

On découvre que le soutien-gorge, jeté aux orties en signe de libération dans les années 1970, avait été créé justement pour libérer les femmes de l’oppression du corset !

L’ouvrage, très bien documenté, est d’une lecture facile et très agréable grâce au ton direct, engagé et combattif de l’autrice et à son humour, parfois acerbe.

Un ouvrage nécessaire et utile pour connaître et comprendre l’histoire des luttes des femmes pour leur émancipation en France depuis deux siècles.

Liliane Lafargue

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