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Perspectives

23 mars 2001

Le deuxième tour des élections municipales n’a fait que confirmer le premier. Il s’agit bien davantage d’un affaiblissement de la coalition gouvernementale que d’une poussée conservatrice. C’est auprès des secteurs des classes moyennes et supérieures que la gauche plurielle, derrière Jospin, obtient ses plus larges succès, à Paris et Lyon. Ailleurs, l’abstention dans les quartiers populaires ne lui a pas permis de jouer sur son mot d’ordre favori, le vote utile, le « faire barrage à la droite ». Cela ne veut pas dire que les illusions dans le PS ou le PCF ont complètement disparu, mais en tout cas que le fossé entre cette gauche embourgeoisée et les travailleurs ne fait que se renforcer.

La gifle du second tour infligée au PS comme au PC dans les villes les plus ouvrières montre que les illusions électorales ne sont plus tout à fait ce qu’elles étaient. C’est une sanction de la politique gouvernementale, qui fait écho aux résultats de l’extrême gauche au premier tour.

Comme le dit si bien L’Humanité du lundi 19 mars, au lendemain du second tour, « Il est à noter que les listes d’extrême gauche... s’en sont prises directement à la politique du gouvernement et aux partis qui en partagent la responsabilité. Leurs scores, indiscutablement, constituent une sanction pour la gauche et un enseignement ». Reste donc à l’extrême gauche d’apprécier cette sanction à sa juste valeur, en tout cas au moins autant que le PCF lui-même !

Ceux qui attendent de l’extrême gauche ce qu’ils n’attendent plus du PCF

Pour l’heure, cette progression électorale locale de l’extrême gauche se fait parallèlement à un déclin marqué du PCF. Ce qui constituait son point fort dans les négociations avec le PS, le « municipalisme communiste », se réduit comme peau de chagrin. Ce déclin ne nous réjouit pas, mais il ne nous désarme pas non plus. Les résultats du premier tour montrent qu’une fraction significative du monde du travail attend désormais de l’extrême gauche ce qu’elle n’attend plus du PCF. Reste à relever ce défi politique, même si nos forces militantes sont loin, pour le moment, de correspondre à nos scores électoraux.

Cela signifie d’abord qu’il appartient à l’extrême gauche de tenter de se manifester à l’échelle nationale comme force politique d’opposition au gouvernement, en dehors même des échéances électorales. Et sur bon nombre de points, elle pourrait le faire unie, donc plus efficacement. Bien sûr, on est loin encore aujourd’hui, même à deux organisations révolutionnaires comme LO et la LCR, d’être le parti révolutionnaire des travailleurs. Et il n’est même pas question, à ce jour, de parler d’unification des révolutionnaires. D’ailleurs personne n’en parle. Les divergences sont réelles et profondes. Mais elles ne doivent pas écraser les convergences qui le sont tout autant.

Les occasions de campagnes politiques communes ne manqueront pas avant les prochaines législatives et présidentielles. Car les attaques du MEDEF et du gouvernement contre les salariés continuent de plus belle, sous toutes les formes, qu’il s’agisse des retraites, des salaires, de la flexibilité... ou du sabordage des services publics.

Il est encore trop tôt pour voir si les travailleurs contactés pendant la campagne feront le geste d’aller plus en avant. Il est possible, en dépit des efforts militants de nos organisations respectives, que ce geste n’aille pas au delà d’une sympathie réelle. En revanche, il nous semble nécessaire d’explorer par des campagnes de propagande, des actions locales ou nationales, mais aussi des campagnes de mobilisation s’adressant également aux appareils réformistes, sans parler des luttes quand elles ont lieu, la possibilité ou non d’entraîner ceux qui regardent dans notre direction.

Cette semaine par exemple, les syndicats, après avoir soigneusement attendu la fin des municipales, préparent des actions pour la fin mars. Le mécontentement est général dans la fonction publique, et c’est pour cela que les sept fédérations appellent le 22 mars à une journée de manifestations et de débrayages pour les salaires et les effectifs. Les syndicats de la SNCF appellent à une journée nationale le 29 mars. La CGT, FO et la CGC manifesteront le 31 mars pour les retraites. Les revendications sont identiques mais une fois de plus le mouvement ne sera pas unitaire. Et pourtant la formulation d’objectifs communs, la coordination de ces actions, l’organisation de leur convergence, l’union et non la dispersion des travailleurs, sont des tâches d’une brûlante actualité. Les révolutionnaires n’auraient-ils pas eu intérêt à s’exprimer nationalement de façon unitaire à ce propos ? Ce n’est qu’un exemple. Mais nous savons bien que d’autres situations du même type se représenteront dans les mois qui viennent.

Certes, il n’y a aucune garantie de succès. Et les obstacles sont nombreux. Mais il est possible de créer des opportunités, de marquer des points, de redonner du courage aux travailleurs, d’accroître notre crédit, de renforcer la confiance des militants. Autant d’aspects qui compteront lorsque le moment des grands affrontements sera venu. Comme il comptera d’avoir été capable, ce n’est là aussi qu’un exemple, d’avoir su organiser des rencontres militantes par secteurs, par branches, de confronter nos expériences, non pas pour juxtaposer nos différences, mais pour coordonner si c’est possible nos actions. En un mot de montrer notre volonté d’agir comme une force politique révolutionnaire. En tout cas, c’est ce qu’attendent de nous les 8, 10 ou 15 % et plus qui ont voté extrême gauche dans plus de trente villes de ce pays.

Tristan KATZ

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