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Avec Folz, Ghosn et les autres : les voitures au foin et les travailleurs sur la paille

5 octobre 2006

Le Mondial de l’automobile s’est ouvert samedi 30 septembre. Comme au salon de l’agriculture, quelques ministres, Villepin en tête, se devaient d’y parader, d’y flatter le « patriotisme économique » et de tâter la croupe des voitures à l’essence de foin, la grande nouveauté du salon. Car cette année, les producteurs de biocarburants exposent et les constructeurs présentent leurs voitures hybrides. Ce qu’il en coûtera à nos porte-monnaie reste un mystère, tout au moins pour le prix du carburant ; car le moteur est plus coûteux. Quant à l’environnement, on parle déjà de la masse des engrais chimiques nécessaires pour la production massive d’éthanol et la détérioration des sols. Les gros betteraviers et céréaliers parlent, eux, de milliards d’hectares disponibles pour cette source « écologique » de profits. Nourrir les voitures est tout de même plus rentable que nourrir le tiers-monde !

Mais l’autre scoop du Mondial, c’est l’annonce faite quelques jours avant son ouverture par le Pdg du groupe PSA (Peugeot-Citroën) de 10 000 suppressions d’emplois en Europe occidentale (soit 7,5 % des effectifs), dont plus de 7 000 en France, et la soi-disant morosité du marché, brandie par tous les constructeurs pour justifier d’avance les grandes manoeuvres qu’ils préparent et les sacrifices qu’ils comptent imposer aux travailleurs.

D’abord il faut noter que si les chiffres des ventes automobiles du mois de septembre, que cite toute la presse, accusent une certaine récession par rapport à septembre 2005, ce n’est pas le cas pour toute l’année 2006. Au pire peut-on parler d’une stagnation, après des années de progression. En ce qui concerne PSA, les ventes de l’ensemble du groupe pour le premier semestre 2006 ont même continué à progresser : 10 000 véhicules de plus qu’au premier semestre 2005. Ces ventes n’ont baissé qu’en ce qui concerne l’Europe de l’Ouest, largement compensées par les augmentations ailleurs. Et cette baisse est presque insensible - 0,7 % -, alors que le groupe en prend prétexte pour annoncer une réduction d’effectifs dix fois plus grande. Autant dire qu’il ne s’agit que d’augmenter productivité et cadences pour accroître les profits.

Et ceux-ci se portent bien. Surtout si on ne se limite pas à leur évolution au niveau d’un seul mois, et qu’on regarde les profits engrangés. Au cours des sept dernières années, les ventes pour Renault et PSA ont augmenté de 50 %, ce qui rend ces deux producteurs maîtres actuellement de 10 % du marché mondial et a permis notamment à Renault d’augmenter de 250 % les dividendes versés aux actionnaires entre 2000 et 2005 (ils passent de 179 millions à 554 millions d’euros).

Même en ce qui concerne le premier semestre 2006, le groupe PSA qui pleure sur ses difficultés, a vu son chiffre d’affaires augmenter de 56 à 58 milliards d’euros par rapport à 2005. Et si le « résultat net », c’est-à-dire après déduction des charges, est annoncé à la baisse par rapport à 2005, ce n’est que parce que PSA en a déduit des charges d’un caractère tout spécial : 227 millions d’euros dépensés pour la fermeture de l’usine de Ryton, en Angleterre, avec plus de 2 000 licenciements, et 107 millions d’euros pour la restructuration de Faurécia (équipementier dont PSA est principal actionnaire) qui a fait plusieurs centaines de licenciements. C’est « l’investissement » de Foltz pour jeter des travailleurs à la rue et accroître les profits à venir des actionnaires. Quant à la dernière annonce des 10 000 suppressions d’emplois, elle vient d’être saluée à la bourse par une augmentation de l’action de 6 %.

Les déclarations des constructeurs automobiles faites à l’occasion du Mondial ne servent qu’à justifier les grandes manœuvres de restructuration qui sont à l’œuvre dans l’industrie automobile pour accroître les profits. Il s’agit de faire payer encore et exclusivement les salariés. Ce que les patrons appellent « réduire les coûts », « augmenter les marges opérationnelles ».

Idem pour les fiançailles envisagées entre Renault-Nissan et General Motors. Si elles ne tournent pas court, elles pourraient se traduire par des compressions d’effectifs entre les trois groupes. La direction de Volkswagen vient d’obtenir l’aval des syndicats allemands pour imposer une augmentation du temps de travail sans aucune augmentation de salaire, en leur promettant seulement de garantir en échange le maintien du même niveau de production et un prétendu système d’intéressement. En clair toujours le même chantage à l’emploi pour augmenter les horaires, baisser les salaires ou procéder aux deux.

Et quand on lit ici, sous la plume du syndicat CFTC, que la suppression de 10 000 postes par PSA serait « la moins pire des solutions », cela rappelle ce que l’on avait dit aux ouvriers de Vilvoorde en Belgique ou de Ryton en Angleterre, à chaque sacrifice imposé, en particulier à ces derniers la baisse de salaires de 20 %, le licenciement d’une partie du personnel avec la suppression de l’équipe de nuit, puis de l’équipe VSD, soit disant pour « sauvegarder l’emploi ». Jusqu’à ce qu’on ferme l’usine.

Les constructeurs automobiles annoncent des « bouleversements majeurs » en perspective, pour reprendre les termes du Pdg de Renault-Nissan, Carlos Ghosn. C’est d’une nouvelle offensive contre les travailleurs qu’ils parlent, dont le plan de PSA n’est peut-être qu’une première étape. L’heure n’est pas à un « grand débat » sur l’avenir de l’industrie automobile française, mais à se préparer au grand combat où les travailleurs rendront coup pour coup.

Léo Baserli

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