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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 56, mars-avril 2008

Altis (Corbeil–Essonne) : un chantage à la fermeture qui n’a pas trouvé d’opposition

Mis en ligne le 21 mars 2008 Convergences Entreprises

Depuis l’annonce du retrait des actionnaires IBM et Infineon en avril 2006, les 1700 salariés de l’usine Altis basée à Corbeil (Essonne) sont toujours en attente du rachat de leur usine par un hypothétique investisseur. Cependant, la direction a mis à profit ces 18 mois d’incertitude pour supprimer plus de 300 postes et obtenir l’agrément syndical qui devrait permettre d’appliquer des horaires continus à base de factions de 12 heures en production.

Altis est une usine de semi-conducteurs qui fabrique des circuits intégrés pour les cartes à puces et la téléphonie mobile. Lors de l’annonce des suppressions de postes et de la mise en place des nouveaux horaires, les salariés du site, réunis en assemblée générale, avaient voté une motion prévoyant de faire grève si la direction maintenait ses projets. Mais les syndicats eurent tôt fait d’oublier cette perspective et se sont bien gardés de convoquer de nouvelles assemblées générales.

Au début de l’année 2007, la CFDT restait « défavorable » aux horaires en équipes de 12 heures et insistait sur le fait que les départs devraient se faire « au volontariat ». Mais qu’est-ce qu’un départ volontaire lorsque la direction menace de fermer l’usine et, à courte échéance, d’imposer un horaire dément à ceux qui resteront ?

Au cours du mois de janvier 2007, la tension sur le site était palpable. La CFDT proclamait la rupture « définitive » des négociations… pour les reprendre quelques jours plus tard. Entre-temps, la direction de l’usine montait les salariés des bureaux contre ceux de la production, qu’elle rendait responsables de la fermeture du site s’ils n’acceptaient pas les factions de douze heures. Le résultat de chaque séance de négociations était attendu avec appréhension par les opérateurs. Durant ces semaines décisives, aucun syndicat n’a proposé de mobilisation. À la fin du mois, la direction profitait de ce vide pour organiser une « marche silencieuse » en vue d’interrompre une séance du CHS-CT et demander aux syndicats de signer l’accord global reliant les nouveaux horaires à l’arrivée du repreneur. Quelques opérateurs, inquiets pour l’avenir et qui avaient été convaincus de quitter les lignes de production pour participer à ce mouvement, ne se sont rendus compte qu’à l’arrivée que la direction manoeuvrait pour les monter contre les syndicats.

La direction a été la seule à organiser une mobilisation sur le terrain. La CFDT à justifié ainsi sa stratégie : «  nous avons choisi la difficile négociation car si les partenaires sociaux capables de négocier n’aboutissent pas, la Direction risque d’aggraver sensiblement les dégâts sociaux  ». Reprenant le chantage à la fermeture, et prétextant adopter une attitude responsable, CFDT et CGC préparaient en réalité leur signature. Pour se prémunir contre la critique, la CFDT réclamait l’organisation d’un référendum.

Un vote qui exprime le manque de perspectives

Avant le vote, les syndicats signataires ont amplifié la division en mettant en avant que la validation de l’accord permettrait d’ouvrir le « livre III » du PSE [1], qui détermine les primes de départs. Les signataires prétendaient que les salariés en attente de partir auraient eu intérêt à valider l’accord au plus vite. Dans ces conditions le « oui » a été approuvé par 53% des 1150 salariés en production.

Aux quelque 500 personnes qui avaient voté « non », les syndicats non signataires se sont bornés à la promesse de dénoncer l’accord en cas de victoire aux élections professionnelles à venir. Les syndicats signataires, forts d’un nouveau succès électoral, reprenaient à leur compte les paroles du représentant du ministère chargé de suivre l’affaire Altis : « L’existence de cet accord d’entreprise est un signal important pour un éventuel repreneur ».

Le gâteau Altis, même décoré de la promesse d’un horaire de production parmi les pires qui se pratiquent en France, n’a toujours pas été racheté un an plus tard par le repreneur russe qui s’est signalé il y a six mois.

Après avoir obtenu le départ de ceux qui fuyaient les factions de 12 heures, la direction a lancé une campagne de recrutement. Les CDD qui viennent de se faire embaucher sont parfois eux-mêmes surpris d’avoir été recrutés après un plan social. Ils ne s’en rendent compte qu’au moment où on leur demande subrepticement… s’ils seraient prêts à faire les 12 heures.

Quant à l’opposition municipale…

À Corbeil, le programme de la liste de gauche qui rassemblait au premier tour le PC, les Verts et deux candidats de Lutte Ouvrière, n’a pas manqué de dénoncer les nombreuses subventions publiques reçues par Altis, sans préciser toutefois s’il convient ou non de cesser ces subventions, voire d’obliger à rendre ce qui a été distribué en pure perte puisque des emplois sont supprimés. Au second tour, le programme PC-PS-Verts et Lutte ouvrière appelait clairement à de nouvelles subventions du département, de la Région et de l’État pour les entreprises, au nom de la « nouvelle attractivité de Corbeil ».

Par ailleurs, la liste de gauche demandait pour Altis la mise en place d’un énième « comité de suivi »…

13 mars 2008

Laurent VASSIER


[1Le « Plan de Sauvegarde de l’Emploi » remplace depuis 2002 l’ancienne procédure du « plan social »

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