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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 38, mars-avril 2005

Placement des chômeurs : le privé à l’affût

Le plan Borloo a officialisé l’ouverture à la concurrence du service public de l’emploi et la perte du monopole de l’ANPE pour le placement des chômeurs.

Déjà, en voyant les profits à faire, les divers acteurs privés se mettent sur les rangs et le délégué général du SETT (Syndicat professionnel des entreprises de travail temporaire) salue dans la réforme la « reconnaissance du métier d’agence de travail temporaire dans le domaine du placement ». Dans ce cadre l’ANPE devra chercher de plus en plus de partenaires extérieurs, transformant ainsi ses conseillers en commerciaux.

Si le plan Borloo représente un nouveau stade dans la casse organisée du service public, les Assedics et les cabinets privés n’ont pas attendu pour se placer. En 2003-2004, il y avait déjà eu « l’expérience Maatwerk » pilotée par l’Assedic sur les départements des Yvelines, des Hauts de Seine et du Val d’oise. L’opération consistait à sélectionner 150 chômeurs triés sur le volet, c’est-à-dire ceux considérés comme les plus « employables » et à les confier au cabinet privé Maatwerk. Les premiers chiffres ne sont d’ailleurs pas particulièrement probants puisque pour l’instant, seuls 67 chômeurs auraient retrouvé un CDI et 37 un CDD de six mois.

Pourtant les promoteurs de cette action remettent ça, et à plus grande échelle. En février 2005, c’est 6 000 chômeurs du Nord-Pas-de-Calais et de Haute-Normandie qui vont être choisis. Et c’est Ingeus, un cabinet australien, qui a été retenu pour ça. Ce cabinet touchera dès la prise en charge 2 800 euros pour un chômeur de moins de 50 ans et 3 000 euros pour un chômeur de plus de 50 ans, et respectivement 4 300 et 6 000 euros si le chômeur trouve au moins un CDD de 6 mois. Petit calcul : Ingeus va toucher près de 17 millions d’euros minimum (2 800 multiplié par 6 000) sur 2 ans sans aucune obligation de résultat !

Pour l’Unedic, la logique est claire : l’argent donné aux cabinets privés est un investissement qui permet à terme de faire des économies sur les allocations versées aux chômeurs...

Car un des buts principaux du plan Borloo, c’est bien de culpabiliser et sanctionner les chômeurs dans un contexte d’offensive patronale. Préoccupation que Chirac exprimait le 14 juillet dernier en ces termes : « On ne peut accepter qu’un chômeur refuse éternellement un emploi ». La proposition de « sanctionner les chômeurs dès lors qu’ils n’acceptent plus un emploi correspondant à leurs compétences » (peu importe si le salaire est moins élevé) est directement reprise de la « réforme » Schröder en Allemagne. Des « sanctions justes et graduées » pourront être appliquées. Autrement dit, obligation sera faite d’accepter un boulot soit payé au Smic même si on a une expérience de 10 ans dans le métier soit dans des secteurs qui n’arrivent pas à recruter (bâtiment, restauration...).

De plus le patronat réclame que le pouvoir de suspension des droits, jusque là du ressort de l’État, soit directement transféré à l’Assedic. Ainsi, après le Pare vendu aux « partenaires sociaux » avec l’argument de la fin de la dégressivité, vient s’ajouter un deuxième étage à la fusée. Et le poids déjà important de l’Assedic dans le service public de l’emploi (26 % du budget de l’ANPE !) va encore se renforcer puisque, financeur-décideur, il va pouvoir directement exclure les chômeurs récalcitrants.

Dans une situation de désengagement croissant de l’État et de renforcement de l’Unedic, le service public de l’emploi va être de plus en plus amené à jouer un rôle de contrôle. Pour employer une formule à la mode avec le débat sur la Sécu, on assiste à la mise en place d’une « nouvelle gouvernance » avec l’activité d’un service public piloté de plus en plus par les intérêts du patronat.

A. G., militant de la LCR

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