Allemagne
Le métal se réchauffe
Éditorial du RSO à Berlin, le 1er novembre 2022
Hier, 31 octobre, à minuit, des centaines de grévistes se sont rassemblés à Berlin devant le site de Mercedes-Benz. Dans l’industrie métallurgique et électronique, la soi-disant « obligation de paix » [1] est arrivée à terme. Le syndicat de la métallurgie IG Metall a directement appelé d’autres entreprises à la « grève d’avertissement » ce lundi : à 9 heures par exemple, la production a été paralysée pendant deux heures et demie chez BMW Moto (Berlin Spandau). Des collègues de l’entreprise de logistique Rhenus les avaient rejoints, ainsi que des sous-traitants d’Adecco et de Randstad qui travaillent sur le même site avec des contrats précaires, depuis des années.
Dans les négociations au niveau national, les patrons proposent des primes de 3000 euros, étalées sur 30 mois, mais concernant les grilles de salaire… rien. Aucune augmentation ! L’IG Metall revendique quant à elle 8 % d’augmentation sur un an. Est-ce suffisant ? Un collègue de BMW blague : « C’est 80 % qu’on revendique ! » En effet, un sondage sur ce site de BMW a montré que c’est 10 % qui seraient nécessaires : comme l’inflation ! Un autre collègue plaide lui aussi pour 10 % : « De toute façon, nous n’aurons que la moitié… ».
Le mardi matin, d’autres collègues ont fait grève dans le même secteur, entre autres chez Messgeräte Siemens. Mais cette fois, pour une heure et demie seulement. À 12 heures 15, c’est au tour d’Osram, fabricant d’ampoules. Que penser du fait qu’il n’y a jamais qu’un site qui est appelé à faire grève, et que c’est l’un après l’autre ? Les collègues de Siemensstadt [2] attendent des grèves communes : c’est comme ça qu’ils avaient bloqué la Nonnendammallee pendant une bonne heure pendant les derniers rounds de négociations, c’est comme ça qu’on réchauffera le climat !
Jusque-là, les patrons de la métallurgie et de l’industrie électronique s’autorisent à affronter les négociations avec arrogance, parce qu’ils ne sont encore confrontés qu’aux habituelles « grèves d’avertissement ». Pour décrocher ne serait-ce que les 8 %, il faudra faire grève sérieusement. Les actionnaires encaissent chaque année des milliards. Il s’agit de leur mettre un bâton dans les roues avec des grèves qui leur feront mal. Si 3,9 millions de salariés de l’industrie métallurgique et électronique faisaient grève ensemble, les choses ne tarderaient pas à bouger !
Éditorial du RSO à Berlin, le 1er novembre 2022 (Lien pour l’éditorial en allemand)
[1] En Allemagne, les conventions négociées imposent une trêve (« Friedenspflicht »), correspondant à la durée de validité du contenu des conventions, pendant laquelle on n’a pas le droit de faire grève sur les points négociés.
[2] Un énorme quartier industriel, site historique de Siemens, construit dans les années 1900.
Mots-clés : Allemagne