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La Rafle du Vel d’Hiv, dessins de Cabu présentés par Laurent Joly, avant-propos de Véronique Cabut

Tallandier, 2022, 56 p., 18 €

19 septembre 2022 Article Culture

Le dessinateur de presse Jean Cabut, dit Cabu, est mort tragiquement le 7 janvier 2015 lors de l’attaque islamiste contre Charlie Hebdo. Il était surtout connu pour avoir créé, dans des revues comme Pilote et des journaux satiriques comme Hara-Kiri, Charlie Hebdo et Le Canard enchaîné, des personnages comme le « Grand Duduche », l’éternel étudiant décalé, ou « Mon Beauf », français moyen à moustache, pétri de préjugés et de certitudes. Si son humour touchait juste, il n’était jamais méprisant à l’égard des gens qu’il ciblait. Caricaturiste hors pair, ses dessins de personnages de la politique et du show business étaient criants de vérité et nombre de ses confrères admettaient attendre que Cabu ait « croqué » un personnage qui faisait la une des médias avant de se lancer à leur tour. Mais ses dessins étaient généralement emprunts de bonne humeur.

C’est pourquoi la republication d’une quinzaine d’entre eux ayant pour thème la rafle du Vél’ d’Hiv des 16 et 17 juillet 1942, et publiés en 1967 dans plusieurs numéros d’un hebdomadaire de l’époque, Le Nouveau Candide, est un véritable choc. On y voit l’horreur de cette rafle, la détresse des victimes, la morgue des bourreaux qui y participent, la peur de ceux qui parviennent à s’échapper, etc.

Ils ont été réalisés à l’occasion de la sortie, cette année-là, d’un livre, La grande rafle du Vel d’Hiv, de Claude Lévy et Paul Tillard, qui était à l’époque l’ouvrage le plus complet jamais écrit sur la question. Le Nouveau Candide décida d’en publier des bonnes feuilles et demanda donc à Cabu de les illustrer.

Il se plongea alors dans la lecture de l’ouvrage qui le bouleversa et qui, selon ses propres termes, « me donnera des cauchemars en l’illustrant ». Il va alors se mettre au travail et produire quinze dessins coups de poing qui illustrent les différentes phases de cette rafle qui toucha plus de 14 000 Juifs et coûta la vie à 13 000 d’entre eux.

Le premier, par exemple, intitulé Les équipes d’arrestation, montre un gamin portant l’étoile jaune dans une rue déserte, faisant face à cinq hommes à l’aspect sinistre que l’on voit de dos et qui sont deux policiers en uniforme, un en civil, un militaire et un personnage au centre qui semble être un militant doriotiste. Un autre, Aux portes des victimes, nous fait découvrir là encore un policier, un militaire et un milicien frappant à la porte d’une famille juive qui s’enfuit par les toits, la mère tenant un bébé dans les bras, le père tirant une fillette. Et tous sont à l’avenant, qu’ils montrent les raflés entassés dans un autobus, les gens désespérés sur les gradins du Vél’ d’Hiv, une mère et sa fille s’enfuyant dans le métro après avoir décousu leur étoile, ou des policiers remplissant d’enfants un wagon à bestiaux pour les envoyer vers les camps de concentration du Loiret, dernière étape avant Auschwitz.

Bref, ce que Claude Lévy a appelé « La Saint-Barthélémy des Juifs de Paris » est illustrée avec une grande pudeur, une sensibilité à fleur de peau et une empathie certaine pour les victimes.

Ajoutons enfin qu’en regard de chaque dessin, un texte explicatif le replace dans son contexte, ce qui permet à ceux ne sont pas forcément familiers de cette tragédie d’en comprendre les rouages.

À mettre en toutes les mains.

Jean Lievin

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