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Contre l’exclusion du syndicat CGT PSA Poissy ! Pour des syndicats démocratiques et de combat !

8 septembre 2022 Article Entreprises

La CGT PSA Poissy vient de lancer une pétition pour protester contre son assignation au tribunal par la Fédération de la métallurgie CGT. Depuis plusieurs mois, la Fédération CGT de la métallurgie et l’Union départementale du 78 (Yvelines) ont engagé une offensive contre le syndicat CGT PSA Poissy (la plus grande usine de région parisienne, avec 3 500 salariés et sous-traitants).

La Fédération a soutenu en décembre 2021 la création d’un deuxième syndicat CGT (la CGT Stellantis Poissy) concurrent sur la même usine, en violation des statuts de la CGT [1].

Elle a écrit à la direction de PSA pour dire qu’elle ne reconnaissait plus l’ancien syndicat, ce qui a permis au nouveau de reprendre tous les mandats désignatifs (délégués syndicaux, représentant syndical au CSE, membres de la CSSCT…) : ce qui va laisser sans protection des militants dont la direction de PSA rêve depuis des années de se débarrasser. Elle avait déjà tenté par exemple de licencier le secrétaire de la CGT, Farid Borsali pour ses activités syndicales.

La Fédération a destitué Jean-Pierre Mercier, membre de la CGT PSA Poissy (également porte-parole de Lutte ouvrière), de son mandat de délégué syndical central contre le vote ultra-majoritaire des syndicats CGT du groupe PSA, en s’asseyant là encore sur ses propres statuts [2] !

Aujourd’hui, la Fédération de la métallurgie CGT assigne le syndicat CGT PSA Poissy au tribunal de Bobigny pour lui interdire, sous peine de sanctions financières, d’afficher son affiliation à la CGT par son intitulé, son logo, etc., avec 1 000 euros d’amende par infraction constatée. Cela revient à demander son exclusion de la CGT… qu’en vertu des statuts de la CGT, seule la Confédération pourrait prononcer [3] (ce qu’elle a d’ailleurs refusé de faire pour le moment, aussi parce que la Fédération ne l’a pas saisie, préférant agir sans publicité, sans débat, et donc à moindre risque). La Fédération de la métallurgie a fait envoyer un huissier de justice au domicile de chaque militant pour lui remettre l’assignation à comparaître. Ce qui lui a coûté près de 5 000 euros, on ne lésine pas à la dépense pour tenter de faire taire des militants.

Des méthodes dont la direction de PSA doit se délecter, elle qui a plusieurs fois envoyé ses huissiers contre la CGT PSA Poissy et voit la Fédération de la métallurgie prendre le relais.

La Fédération CGT méprise la démocratie syndicale au plus grand profit de PSA

Les faits sont les suivants :

  • En novembre 2021, 193 syndiqués étaient présents (sur près de 300 syndiqués) au congrès du syndicat CGT PSA Poissy, contre 35 à peine pour le congrès de fondation de la CGT concurrente soutenue par la Fédération un mois plus tard. Depuis, et avec la guerre menée par la Fédération au syndicat CGT historique, un certain nombre de délégués ont préféré rejoindre la nouvelle CGT, mais ce n’est pas le cas des syndiqués : ce syndicat ne comptait que 54 adhérents en juin 2022 alors qu’il dispose désormais d’environ 25 délégués.
  • Début 2022, une pétition dans l’usine de plus de 1 000 signataires (bien au-delà des seuls syndiqués), soutenait la CGT historique de Farid Borsali et Jean-Pierre Mercier contre les manœuvres de la fédération.
  • Au niveau de l’ensemble du groupe PSA, le 13 mai 2022 un vote organisé par les syndicats CGT des sites PSA du groupe est sans appel : 223 des délégués et responsables CGT, soit 88 % des votants, soutiennent le maintien de Jean-Pierre Mercier au poste de délégué syndical central. Seules 31 voix se prononçaient pour le candidat de la Fédération). 15 syndicats et sections CGT du groupe PSA sur 17 se sont prononcés contre la nomination du candidat choisi par la Fédération [4].

En ce mois de septembre, la Fédération continue sa purge, elle menace maintenant publiquement de démandater le DSC adjoint CGT du groupe PSA, Cédric Brun (secrétaire du syndicat CGT PSA Valenciennes), un militant combatif et populaire, en raison de sa solidarité avec Farid Borsali et Jean-Pierre Mercier.

À l’usine de Poissy, en 60 ans d’activité, le syndicat CGT Poissy, a mené la lutte contre les patrons de Simca-Chrysler, puis PSA Peugeot-Citroën et enfin Stellantis. Certains de la CGT PSA Poissy sont des anciens de PSA Aulnay qui avaient mené une grève de quatre mois contre la fermeture de leur site en 2013. Ce syndicat est pluraliste et organise démocratiquement les syndiqués, ses délégués et ses représentants, de manière indépendante de la direction, pour riposter à ses attaques. Il a pour tradition de faire voter les salariés en grève et de consulter régulièrement les ouvriers, qu’ils soient à la CGT ou non. Et de chercher le contact et l’unité d’action avec d’autres travailleurs en lutte de l’automobile ou d’autres branches (cheminots, travailleurs du nettoyage, des hôpitaux, etc.). Mais c’est précisément ce que la Fédération ne veut plus tolérer.

Nouveauté : prise de court, la Fédération qui a choisi de créer une deuxième CGT a osé ensuite affirmer que celle-ci existait « depuis 2016 » (!). De quoi inquiéter bien des militants CGT dans toute la métallurgie : y a-t-il d’autres CGT occultes créées par la Fédération dans d’autres usines contre les syndicats déjà existants ?

Une menace d’exclusion sur fond de restructurations du secteur automobile

Au-delà d’un déni flagrant de démocratie syndicale, le patronat de l’automobile annonce la fin du moteur thermique pour 2035 et menace de restructurations, de fermeture de sites et de centaines de milliers de suppressions d’emplois en France et dans le monde. C’est le moment que choisit la Fédération pour se débarrasser des syndicalistes les plus combatifs, ceux qui proposent de ne pas se laisser faire face aux attaques patronales.

Mais, face aux attaques, c’est bien un problème d’orientation qui se pose à la CGT.

Au printemps 2021, un certain nombre de sites de Renault, de PSA et de leurs sous-traitants étaient menacés de suppressions de postes ou de fermeture (dont ceux de Renault Flins, Renault Choisy, PSA Douvrin). C’était le cas notamment de la Fonderie de Bretagne et de MBF (fonderie à Saint-Claude dans le Jura), sous-traitants de Renault et PSA. À Renault Lardy, des travailleurs débrayaient et se rassemblaient à plusieurs centaines en assemblée générale, pour refuser les restructurations et le départ de salariés sous-traitants.

Ainsi, le 8 avril 2021, la CGT Renault Lardy avait appelé à un rassemblement devant le siège de Renault à Boulogne contre les fermetures de site et les suppressions de postes. Les travailleurs de la fonderie de Saint-Claude (MBF) s’étaient déplacés au rassemblement (comme ils l’avaient fait à PSA Sochaux quelques jours plus tôt), à plus de 150 et leurs familles. La Coordination CGT Renault (contrôlée par la Fédération métallurgie) avait boycotté le rendez-vous, ainsi que la CGT de la Fonderie de Bretagne, sur ordre de la Fédération. Pas question pour elle que les travailleurs s’unissent et se coordonnent.

Un mois plus tard, le 6 mai 2021, quand les syndicats CGT de PSA appelaient à manifester à PSA Douvrin, contre la menace de fermeture de sites (dont ce dernier), la Coordination CGT Renault proposait une autre manifestation au Mans pour les Renault le même jour. Histoire de ne pas être ensemble. Les deux démarches étaient de fait assumées par la Fédération de la métallurgie, mais au Mans, la Coordination CGT Renault empêchait les délégations de Renault Lardy, Flins et Cléon (venues en nombre car particulièrement concernées par les attaques) de prendre la parole. Certaines interventions de salariés de Renault, et d’autres, au rassemblement à PSA Douvrin, auraient-elles risqué de contrarier – ou seulement de discuter – la « ligne » de la direction de la Fédération ? C’est bien la justification que celle-ci donnera trois semaines plus tard en déclarant à une réunion que « L’exclusivité des prises de parole ne se décrète pas par la simple venue en délégation. Le contenu doit être dans le respect des orientations définies et élaborées collectivement lors des rencontres que nous avons. Le 6 mai était consacré à la présentation du projet industriel CGT Renault pour la cohérence du groupe. […] Notre projet industriel, […] est l’unique solution alternative pour le maintien et le développement de la cohésion de notre entreprise et des emplois. »

Un « projet industriel » plus que des luttes, tout un programme qui résume bien une orientation : nous ne pourrons nous défendre que site par site, en proposant de bons projets industriels, en négociant avec nos exploiteurs pour leur proposer une « meilleure » solution, Bref dans les limites de leurs intérêts.

Un débat d’orientation… tranché bureaucratiquement ?

Certes, chacun voit la « démocratie » à sa porte, mais là ce sont bel et bien deux démocraties qui s’opposent : celle des appareils bureaucratiques d’un côté et celle des syndiqués et des ouvriers de l’autre. Pour ces secrétaires généraux, les deux branches de l’alternative s’excluent : ou bien la négociation de « projets industriels », qui justifient toutes les réorganisations et fermetures, dans les strictes limites des intérêts patronaux et d’un capitalisme conquérant ; ou bien la lutte de tous les travailleurs menacés contre les fermetures de sites, suppressions de postes, et licenciements, quitte pour ce faire à se coordonner et à peser sur d’autres secteurs…

C’est un débat tout à fait naturel et acceptable dans une CGT pluraliste, mais la Fédération de la métallurgie l’a, quant à elle, déjà tranché : non pas démocratiquement, en laissant les syndiqués et syndicats défendre leurs luttes et orientations, mais bureaucratiquement par l’exclusion de syndicats qu’elle accuse de dissidence (fantasmée ou pas).

Dans le cadre des restructurations massives dans l’automobile, qui n’en sont qu’à leur début, il semble clair que la Fédération de la métallurgie se veut prête à négocier sur le terrain de « l’avenir industriel de la France » et ne veut plus de syndicats trop remuants, ni que le représentant de l’ensemble des syndicats CGT de PSA, celui à qui la presse tend le micro, soit un militant trop combatif, représentant de militants CGT qui veulent pour les luttes une tout autre politique. Le but de la Fédération est donc d’apparaître comme un syndicat responsable auprès des directions de groupes comme PSA-Stellantis ou Renault, et ne faire, au mieux, que négocier, usine par usine et site par site, les attaques contre les travailleurs. Mais laisser ainsi les travailleurs isolés les uns des autres, livrés à eux-mêmes, c’est les conduire à être plus facilement vaincus. De ce point de vue, l’exclusion de militants combatifs de la CGT est une menace pour bien d’autres militants de la CGT, du groupe PSA ou d’ailleurs, quelles que soient leurs sensibilités et opinions.

Soyons le plus nombreux possible

  • à signer la pétition contre l’exclusion de la CGT PSA Poissy, www.change.org/contre_exclusion_CGT_PSA_Poissy et
  • à venir soutenir ses militants au rassemblement de soutien organisé par la CGT PSA Poissy, le jeudi 20 octobre 2022, devant l’annexe du tribunal judiciaire de Bobigny (93), 1 promenade Jean-Rostand

Léo Baserli, le 8 septembre 2022


[1Article 8 des statuts confédéraux : « La création d’un syndicat ne doit pas venir concurrencer une implantation syndicale existante sur le même périmètre. »

[2Article 7bis des statuts fédéraux : la Fédération « est seule habilitée à désigner les représentants syndicaux nationaux et européens, après validation par les syndicats des entreprises et groupes, suite à la décision des syndiqués ». De façon ironique, cet article a été modifié au dernier congrès fédéral, début 2022, pour renforcer un fonctionnement démocratique (l’ancienne version mentionnait « choisis par les syndicats et syndiqués » sans autre précision).

[3Un syndicat CGT ne peut pas être exclu par une Fédération, mais seulement sur décision de la Commission exécutive confédérale, évidemment après avoir pu se défendre, et avec une possibilité de recours devant le congrès confédéral (article 25 des statuts de la CGT).

[4Voir la vidéo de l’assemblée générale des sections et syndicats CGT PSA à Montreuil : https://www.youtube.com/watch?v=S7dFJzTzCe0.

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