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Accueil > Éditos de bulletins > 2021 > mars > 15

Birmanie : solidarité avec les travailleurs en lutte contre les militaires putschistes !

Dimanche dernier l’armée a de nouveau tiré sur la foule des manifestants, faisant au moins 18 morts et des dizaines de blessés, et décrété la loi martiale dans les quartiers populaires de la capitale économique, Rangoun. Depuis leur putsch du 1er février dernier, les militaires ont déjà fait plus de 124 morts. Des centaines de milliers de personnes continuent pourtant avec courage à se rassembler dans des grèves et manifestations dans tout le pays, derrière des slogans tels que : « Libérez nos dirigeants » ou « Respectez nos votes ».

Le rejet du coup d’État

Depuis plus de soixante ans, en Birmanie (ou plutôt le Myanmar, son nom officiel depuis quelques décennies), l’armée exerce la réalité du pouvoir. Mais elle avait dû lâcher du lest devant les classes populaires qui n’en peuvent plus, en libérant en 2010 l’opposante Aung San Suu Kyi, qui a accédé au gouvernement en 2016. L’armée n’en conservait pas moins ses positions clés à la tête du pays et l’ancienne prix Nobel de la paix ne s’y est jamais franchement opposé. Elle a même couvert des massacres commis par l’armée birmane sur les Rohingyas, une minorité de religion musulmane du pays. Mais pour la population laborieuse, ce début d’évolution du régime était un espoir. C’est au succès de Aung San Suu Kyi aux élections législatives de novembre dernier que les chefs de l’armée ont voulu mettre un terme par leur putsch. Pour conserver leur mainmise totale non seulement sur le pouvoir politique mais aussi sur l’économie du pays. Le chef de la junte dirige deux des plus grands conglomérats économiques de Birmanie, dont les activités s’étendent à presque tous les secteurs : zones portuaires, mines de jade et de rubis, immobilier et construction.

Des entreprises françaises complices du pouvoir militaire

C’est avec ces groupes géants, contrôlés par les militaires, que les multinationales présentes en Birmanie font affaire. Le matériel du français Idemia, « leader de l’identité augmentée », a aidé à arrêter 1 700 opposants au coup d’État. Les mensonges de la chaîne d’État « Myanmar Radio and Television » continuent à être diffusés par une des filiales de Canal+ ! Accor, Lafarge ou Bouygues ont également d’importants intérêts dans le pays.

La part du lion revient au groupe Total, qui partage une bonne part des ressources pétrolières du pays avec le groupe américain Chevron et quelques autres. En 1995, Total était déjà mis en cause pour avoir fait construire son gazoduc à travers la jungle birmane en ayant recours au travail forcé, sous la surveillance de l’armée. Sans parler des pots-de-vin pour obtenir ses contrats.

À travers tout le pays, une grève générale

Ce sont précisément ces travailleurs, surexploités par les militaires comme par les multinationales occidentales, qui sont en première ligne dans la résistance au coup d’État. Dans le cadre d’un vaste mouvement dit de « désobéissance civile », de nombreux salariés ont complètement cessé le travail. Les écoles, les administrations, les hôpitaux et les banques sont fermés.

Les 600 000 femmes salariées des usines textiles s’organisent et participent à la lutte. Les employés des compagnies d’électricité et des chemins de fer sont aussi en grève. Leurs syndicats ont appelé avec succès le reste de la population à ravitailler les grévistes et à suspendre la perception des loyers du côté des propriétaires, pour ceux qui participent à la grève. Le 10 mars, les forces de sécurité ont lancé un raid contre les 800 cheminots grévistes de la gare de Rangoun, encerclé les immeubles où ils résident avec leurs familles et défoncé les portes des appartements.

La classe ouvrière, jeune, révoltée par l’exploitation et le manque de libertés, n’est pas la seule dans la rue. Mais ses aspirations à la liberté et aux droits démocratiques, à pouvoir s’organiser pour défendre ses propres exigences sociales et politiques comme celles de bien d’autres, fait d’elle une lourde menace pour la junte militaire. À ces travailleuses et travailleurs birmans va toute notre solidarité.

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