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DOSSIER : Gaz de schiste : dollars et dégâts

Voir plus loin que la « transition énergétique »

Mis en ligne le 24 septembre 2014 Convergences Société

Aux États-Unis, l’exploitation intense des gaz de schiste par fracturation hydraulique a immédiatement provoqué des conséquences néfastes sur l’environnement comme sur la santé de la population de ces régions et des travailleurs de cette industrie. Pourtant, à travers le monde, de nombreux défenseurs des intérêts capitalistes vantent cette révolution énergétique comme synonyme de cure de jouvence économique et de création d’emplois en nombre important. Et il est indéniable que son développement a créé des emplois, des chômeurs de tout le pays étant venus se faire embaucher dans les régions productrices. Du coup, sur fond de chômage et de crise, beaucoup de travailleurs peuvent penser, et pas seulement aux États-Unis, que cette industrie, en dépit des menaces pour leur sécurité et pour l’environnement, permettrait de relancer l’économie et de sortir de leurs difficultés au moins une partie de la population.

En France, malgré le tapage fait autour de ce nouvel eldorado et la discrétion autour de ses fâcheuses contreparties, les méfaits en ont été rendus publics, grâce notamment à la diffusion du film Gasland et d’autres films, livres et articles qui ont suivi. S’appuyant sur cette indignation légitime, des oppositions se sont organisées contre l’exploitation des gaz de schiste. Les réactions de la population contre les premiers forages ont permis la création de collectifs « STOP au gaz de schiste, ni ici ni ailleurs ». C’est cette mobilisation qui a contraint le gouvernement de l’époque à reculer en interdisant la fracturation hydraulique.

Une loi n’est pas une protection et la parole d’un Président pas une garantie

En juillet 2013, François Hollande a réaffirmé son opposition aux gaz de schiste. Mais son gouvernement n’a cessé de souffler le chaud et le froid. À la même époque, Arnaud Montebourg, alors ministre du Redressement productif, s’était déclaré favorable à une exploitation « écologique » ce qui avait provoqué (déjà !) quelques remous. Le Premier ministre (parti depuis…), Jean-Marc Ayrault, était intervenu pour dire qu’il n’y aurait pas d’exploitation. Depuis sa nomination comme ministre de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie, Ségolène Royal, qui était connue pour son opposition farouche, ne ferme plus la porte aux gaz de schiste.

Le gouvernement se donne ainsi le plus de latitude possible pour pouvoir revenir sur l’interdiction de leur exploitation, tout en ménageant les opposants. Il en va des énergies fossiles comme des énergies renouvelables : sa ligne directrice est de garantir le développement durable des profits des multinationales françaises. Tout dépendra donc, à terme, des intérêts de la classe capitaliste. C’est en fonction de ceux-ci que la « transition énergétique » sera plutôt énergies fossiles ou plutôt énergies renouvelables. Il peut d’ailleurs y avoir autant de profits à faire dans les unes que dans les autres. Ce sont en tout cas les mêmes groupes qui prospectent dans les deux directions…

Le projet de loi sur l’environnement, présenté fin juillet, se contente de miser sur la réduction de la consommation énergétique. La plupart des mesures concernent les particuliers qui devront isoler leur habitation, acheter une voiture électrique et toucheront des crédits d’impôt ou aides en contrepartie. Rien de contraignant pour les entreprises et pas un mot sur les gaz de schiste.

Les différents collectifs contre la fracturation hydraulique (seule manière que l’on ait trouvé jusqu’ici d’exploiter d’une façon rentable les gaz de schiste) dénoncent à juste titre ses conséquences désastreuses. Ils ont raison bien sûr de refuser les risques pour leur santé, leur mode de vie et l’environnement de leur région, pour les plus grands profits des capitalistes. Mais ils ne se contentent pas de prôner les énergies renouvelables comme la solution miracle. Comme le gouvernement, même si c’est plus sincèrement que lui, ils mettent le plus souvent en avant un problème de « surconsommation » (de qui et de quoi dans cette société ?) et en appellent à la sobriété de tous.. Du coup, leurs objectifs se limitent souvent à réclamer à un gouvernement au service des capitalistes de faire des choix conformes aux intérêts de la société.

Pour un développement durable… des luttes

Aujourd’hui comme hier, il est illusoire de penser pouvoir régler les problèmes liés à l’industrie de production d’énergie sans contester le pouvoir des capitalistes sur l’économie. Quels que soient les choix énergétiques qu’ils feront, ces choix, au moins dans le long terme, ne seront dictés que par la recherche du profit au mépris de l’environnement et de la santé des travailleurs et des populations comme des autres besoins de celles-ci, l’emploi par exemple. Même si des reculs momentanés peuvent leur être imposés, ces choix peuvent à tout moment changer. Rester dans ce cadre capitaliste ne peut qu’aboutir à prendre parti pour une « solution » contre une autre (les énergies renouvelables contre l’exploitation du gaz de schiste), un besoin contre un autre (protection de l’environnement et de la santé contre la nécessité de réduire le chômage), une partie des classes populaires contre une autre (en fonction des besoins immédiats et différents de celles-ci). Et par là de conforter le pouvoir des classes dirigeantes et de leur gouvernement de décider… contre tous. Il n’y a pas à choisir entre crever à cause de l’empoisonnement de la planète ou de misère à cause du chômage. Mais, pour cela, il faudra que les travailleurs et les classes populaires autour d’eux prennent le contrôle de toute l’économie. C’est aussi l’intérêt des travailleurs du secteur de l’énergie qu’il faut sans doute aujourd’hui convaincre en majorité mais qui sont aussi les premiers concernés par les risques industriels et subissent de plein fouet dans leurs conditions de travail la politique capitaliste du profit maximum. Ensemble, ils pourront décider, réellement librement car en connaissance de cause, de privilégier un moyen de production d’énergie plutôt qu’un autre ou une technique plutôt qu’une autre tout en garantissant l’intérêt de tous, l’emploi et le partage du travail entre tous par exemple.

Dans l’immédiat il faut cesser de prier les capitalistes de réaliser une hypothétique transition énergétique favorable à tous, mais plutôt rassembler toutes les luttes dans la perspective de priver ces capitalistes des moyens de décider pour l’ensemble de la société en leur enlevant le contrôle de l’économie, c’est-à-dire la propriété des moyens de production.

M.P.

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Numéro 95, septembre-octobre 2014