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Coronavirus

Un mois de pandémie dans le sous-continent indien

20 avril 2020 Article Monde

Si les gouvernements de la région ont eu des postures et des politiques différentes par rapport à l’épidémie, ils ont le même rapport à la presse. Au-delà des images virales des réseaux sociaux, les informations manquent. Compliqué notamment d’appréhender l’ampleur d’émeutes de la faim déjà attestées dans des grandes villes pakistanaises.

En Inde, les travailleurs migrants cherchent encore à se déplacer pour rentrer chez eux et se rassemblent dans les gares pour réclamer ce droit. Une illustration de la précarité qui est la leur depuis bientôt un mois et de celle qu’ils et elles anticipent dans les semaines à venir. Les files sur le bord des routes ou à l’entrée des bus font écho aux kilomètres de queue devant les points de distribution de nourriture. La semaine dernière, une femme de 35 ans est morte dans une queue pour obtenir une ration de riz à Badaun en Uttar Pradesh. À l’inverse, les pèlerins hindouistes ont quitté Bénarès en bus de standing et Alvi, le président pakistanais, autorise les rassemblements dans les mosquées pour le ramadan.

Plus d’une centaine de morts sont identifiés comme dus au virus au Pakistan, cinq fois plus en Inde. Cela reste peu par rapport aux ravages de la diarrhée ou du paludisme. Mais au vu du nombre de tests effectués, ces chiffres n’ont aucune validité. Le gouvernement indien fait fuiter que seuls 270 districts sur 700 seraient touchés par le virus, dans le but de rouvrir de nombreux secteurs comme le bâtiment à partir du 20 avril, des usines ayant fermé devraient suivre. La pandémie n’est pas près d’être jugulée.

« À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles »

Vingt millions d’emplois seraient déjà supprimés au Pakistan. À la crise sociale dans le sous-continent, s’ajoute la diminution des fonds envoyés par les travailleurs expatriés. Les syndicats font également remonter de nombreuses plaintes relatives à des salaires impayés et des licenciements de salariés. Dans les mines indiennes restées ouvertes, les salaires ont été drastiquement réduits. Au Bangladesh, les ouvrières du textile ont manifesté pour réclamer leurs salaires impayés – et l’annulation des commandes des grandes firmes a déjà entraîné le licenciement d’un million d’entre elles.

Le gouvernement indien annonce vouloir modifier la législation de 1948, déjà amendée en 2016 et depuis longtemps dans le viseur des patrons. Cette loi limite l’activité d’un adulte à 48 heures de travail hebdomadaires, durée à partir de laquelle s’ajoutent des heures supplémentaires. Il faudrait passer à 12 heures par jour et 72 heures par semaine. Le but proclamé est de satisfaire les besoins en nourriture et en médicaments de la population ; il s’agit surtout de compenser les problèmes de main-d’œuvre de capitalistes de divers secteurs et d’aggraver l’exploitation.

« Le scénario génocidaire s’approche » [1]

L’extrême droite au pouvoir en Inde cherche à faire porter la responsabilité de l’épidémie aux musulmans du pays en exploitant des faits divers, notamment un rassemblement religieux antérieur au confinement. Dans la banlieue de Delhi, un hôpital privé soignant les cancers a annoncé n’accueillir des patients musulmans que s’ils étaient, eux-mêmes et leurs proches, testés négatifs. À Bharatpur, à 20 kilomètres du Taj Mahal, une femme musulmane sur le point d’accoucher n’a pas été admise à l’hôpital en raison de sa confession. Le nourrisson est mort.

Dans le même temps, les autorités s’apprêtent à tester massivement les vertus prophylactiques de l’hydroxychloroquine sur plusieurs dizaines de milliers d’habitants (« volontaires ») de bidonvilles de Bombay, d’où les habitants ne peuvent partir et où le virus fait des ravages. Le poids de l’industrie pharmaceutique indienne s’ajoute aux sympathies politiques des dirigeants des principales puissances, Trump ou Bolsonaro en tête, pour Modi. Les abjections ne sont pas dénoncées.

Chris Miclos

(Article à paraître dans l’Anticapitaliste no 519)


[1Arundhati Roy, The situation is approaching genocidal, 17 avril.

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