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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 123, décembre 2018 > La vie en jaune

Strasbourg, samedi 1er décembre

8 décembre 2018 Convergences Politique

Départ, 10 heures, Cour européenne des droits de l’Homme : environ 600 Gilets jaunes venant de toute l’Alsace, des Vosges et d’autres coins en Lorraine. Beaucoup disent qu’ils auraient aimé aller à Paris mais, faute d’argent et de temps, c’est la capitale de l’Alsace qu’ils ont rejointe. Certains sont montés à Paris, d’autres sur les différents barrages filtrants et opérations toute la journée aux quatre coins de l’Alsace.

Les Lorrains, les Vosgiens prennent la parole. Consignes pour une manif pacifiste et une action symbolique : tout le monde s’allonge devant le Palais des droits de l’Homme pour signifier le manque de respect des droits. Puis le cortège s’ébranle prenant les rues du quartier riche de la Robertsau, direction place de la République. Parmi les slogans :

  • « Gilets jaunes en colère, il y en a marre de la misère, augmentation des salaires »,
  • « Si tu veux que Macron dégage, frappe dans tes mains ; si tu veux que les riches dégagent, frappe dans tes mains » (très repris).

Et, de partout : « Macron démission ! », « Tous ensemble ! », « Macron, si tu savais, tes taxes, tes taxes, Macron, si tu savais, tes taxes où on se les met, au cul, au cul aucune hésitation, tu vas le cracher le pognon ! », « Macron rend le pognon ! », et la Marseillaise évidemment, etc.

Arrivés au pont, certains essaient de forcer le passage vers le centre-ville : les flics gazent fortement. Beaucoup de colère chez les manifestants. Cela a renforcé la détermination à continuer.

Place de la République, 13 heures . Les CRS barrent l’entrée vers le centre-ville où se trouve le marché de Noël. Un slogan est lancé : « Le centre-ville, il est à nous », très repris. Les « organisateurs » essaient de convaincre de s’arrêter là parce que la préfecture est à deux pas (grosse illusion sur le fait de demander je ne sais quoi au préfet...)

Échanges et discussion

Discussion plus qu’animée entre les organisateurs et une enseignante. Les premiers disent : « Qui tu es pour décider ? C’est nous les représentants… » Elle continue d’argumenter : « On n’est pas tous d’accord, il ne faut pas de division mais une discussion qui permette l’expression de tous les points de vue et de poser sur la table les modalités d’élection des représentants », « Si on décide tous ensemble de ce qu’on fait et qu’on se met d’accord, on fera les choses tous ensemble ». Pas mal de gens s’agglutinent, beaucoup approuvent ce qu’elle dit.

Retour de ceux qui étaient allés rejoindre la préfecture : « Le préfet n’est pas là », « c’est eux qui ont décidé de nous gazer pour rien. » Un gars lance l’initiative de se retrouver sur les marches du Palais du Rhin pour discuter et décider tous ensemble.

Assemblée générale

Tous finissent par se regrouper autour de ces marches et s’ouvre une sorte d’assemblée générale d’environ 400 personnes. Un des « organisateurs » se met en haut des marches pour dire qu’il est sur le front depuis un mois, qu’il n’a pas d’ordre à recevoir de ceux qui viennent juste d’arriver, mais il se fait vite huer  : « Pourquoi c’est toi, qui parle, t’es qui ? » Une enseignante lui demande si elle peut parler, mais il ne lui donne pas le mégaphone. Elle finit par prendre la parole à la voix : « Il faut qu’on discute de notre organisation. Je propose que ceux qui veulent être à la tribune montent et qu’on lève la main pour parler, que tout le monde puisse s’exprimer. »

La parole commence à circuler

Intervention applaudie, des gens montent et la parole commence à circuler.

Des interventions allant un peu dans tous les sens sur les revendications, les modes d’organisation… Le débat finit par se cristalliser sur quoi faire par rapport à la manif de la CGT. Un groupe d’une dizaine se regroupe en disant « il faut y aller ». Les « organisateurs » prennent l’enseignante à partie : « Toi, t’es à la CGT, on veut pas des syndicats »… L’organisateur qui avait pris la parole au début la reprend : « On ne va pas à la manif CGT, ceux qui veulent peuvent le faire, mais on n’a rien à voir avec eux, et puis ceux qu’on voit arriver comme ça alors qu’ils ne sont pas dans le mouvement depuis le début, c’est bien gentil, mais c’est pas à eux de décider. » L’enseignante reprend la parole en essayant de transmettre ce que tous les gens autour disent : « Tout d’abord, il n’y a pas de prime à l’ancienneté, on fait tous partie du même mouvement, il va falloir en chercher d’autres. Martinez, c’est pas mon ami, mais, derrière les gilets rouges, il y a un citoyen, derrière les gilets jaunes, il y a un « citoyen » et on est tous dans la même galère. Les syndiqués ce ne sont pas que les dirigeants il y a aussi des syndiqués de base qui sont comme vous et moi, c’est aussi eux qui font la grève comme à la SNCF, ou dans l’Éducation, il faut les emmener avec nous pour construire une grève générale » (tonnerre d’applaudissements). Je propose un vote pour savoir si on part les rejoindre…  ». Un homme monte pour faire passer la proposition au vote. Approuvée par les deux tiers de l’assemblée.

Un cortège d’environ 200 à 300 Gilets jaunes part en manif pour rejoindre le point de départ de celle de la CGT (beaucoup de gens viennent taper dans le dos de l’enseignante en disant que c’était super ce qu’elle avait dit, puis, tout au long de la manif, demandent des avis pour prendre les décisions de parcours). Très dynamique, le mot « Révolution » résonne faiblement par endroit.

Arrivée place de la Bourse : « Tous ensemble ! »

Le cortège Gilets jaunes arrive aux cris de « Tous ensemble ! » Quelques 250 syndicalistes, et un peu moins de 100 étudiants, le même milieu qui s’était mobilisé contre ParcourSup, et aussi des étudiants étrangers dont certains s’adressent aux Gilets jaunes. Réactions mitigées du côté de la CGT, avec des discours des représentants dans un esprit « Soyons tous ensemble, mais on n’a pas les mêmes méthodes, les mêmes revendications… » Un jeune étudiant étranger explique pourquoi ils sont là et le lien politique entre ce que revendiquent les Gilets jaunes et les étudiants. Le chef de l’Union départementale CGT 67 tente un discours, vite couvert par les « Tous ensemble ! » des Gilets jaunes. Ces derniers rejoignent le cortège de la CGT (information largement reprise par France 3 Alsace dans le JT du soir).

Deux heures de déambulation dans un marché de Noël surchargé de monde. « Le centre-ville, il est à nous ! ». « Si tu veux que Macron dégage, frappe dans tes mains ». Sur les côtés des gens frappent dans les mains avec les manifestants. La Marseillaise résonne, mais l’Internationale est entonnée par endroits !

17 heures, fin de la manifestation : des personnes échangent leur numéro, pour être informés de ce qui se passera le lendemain. Un travailleur envoie un message avec des vidéos et dit qu’il faudrait des assemblées générales régulières sur la place de la République… 

Correspondants

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