États-Unis
Les étudiants diplômés employés par l’université de Californie lancent une grève à l’échelle de l’État
(Photo : grève à l’UC Berkeley, lundi 14 novembre 2022. Source : @uaw2865/Twitter)
Traduction de l’article en ligne de nos camarades de Speak Out Now du 15 novembre 2022
Quelque 4 000 étudiants diplômés travaillant pour l’institution ont fait grève à l’université de Californie de Berkeley (UC Berkeley) [1] lundi 14 novembre 2022, premier jour d’une grève sur tout le secteur en Californie. Ce jour-là, environ 48 000 de ces travailleurs universitaires syndiqués des dix campus de l’université de Californie se sont mis en grève. Ces universitaires, organisés à la fois dans le syndicat United Auto Workers (UAW) [2] et dans le syndicat Student Researchers Union (SRU), ont entamé cette grève sur différentes revendications visant à améliorer leur niveau de vie face à la hausse des coûts des loyers et à l’inflation.
En plus d’une augmentation de salaire, ces étudiants demandent des subventions pour la garde d’enfants afin d’alléger le fardeau que représente le fait d’avoir des enfants pendant les études supérieures, de meilleures prestations de soins de santé pour les personnes à charge, des politiques de congé familial plus longues, des cartes de transport en commun, une réduction des frais de scolarité, ainsi qu’un soutien accru aux étudiants internationaux qui s’orientent vers le processus d’immigration pour vivre aux États-Unis. Sans oublier d’autres revendications comme l’amélioration des clauses contre l’intimidation et le harcèlement dans leur contrat pour protéger les étudiants travailleurs contre les professeurs et les superviseurs qui créent un environnement de travail hostile.
Bien que l’essentiel de leur travail consiste à enseigner aux étudiants et à corriger les examens, et qu’ils jouent un rôle important dans l’organisation de la recherche au sein de l’UC, la plupart de ces 48 000 étudiants diplômés syndiqués sont souvent contraints à une existence précaire, vu leur faible rémunération. Le salaire de base moyen actuel des travailleurs étudiants est d’environ 24 000 dollars par an. Les étudiants en grève demandent que le salaire de base moyen soit porté à 54 000 dollars par an, de quoi s’en sortir un peu plus facilement.
Lors d’une enquête menée avant d’entamer les négociations avec la direction de l’UC, le syndicat de l’automobile UAW auquel les étudiants sont affiliés, a constaté que les travailleurs diplômés de l’ensemble de l’UC consacrent en moyenne 52 % de leur revenu mensuel au loyer.
Face à cela, l’institution universitaire et les élites politiques de Californie prétendent qu’ils n’ont pas l’argent nécessaire pour répondre aux demandes des étudiants travailleurs, en ajoutant que leurs propositions salariales jusqu’à présent valent plutôt mieux que celles des universités privées d’élite telles que Harvard et le MIT.
Lorsque l’on considère la richesse et le pouvoir qui existent en Californie, on constate que l’argent disponible existe. Par exemple, l’UC gère actuellement un portefeuille d’actifs d’une valeur d’environ 152 milliards de dollars, après avoir augmenté ses actifs de plus de 100 milliards de dollars en raison des investissements financiers réalisés pendant la pandémie de Covid-19. En outre, la Californie abrite certaines des entreprises les plus riches du monde, qui pourraient être taxées à des taux plus élevés et les sommes récupérées être réinvesties dans des secteurs tels que l’éducation.
La richesse existe pour répondre aux demandes des étudiants diplômés, mais ce n’est pas une priorité pour les riches et les puissants. Ces étudiants travaillant pour l’université n’ont pas choisi de faire grève à la légère. Ils savaient l’impact que leur grève pouvait avoir sur les étudiants, sur leur propre travail, sur leurs recherches et sur l’ensemble de leur carrière universitaire. Mais l’université les a poussés à bout en refusant d’accepter la plupart de leurs revendications. Reste que ces étudiants ont un avantage : le travail de l’université ne peut pas fonctionner sans eux.
Pour en savoir plus, lire aussi :
- « États-Unis : 48 000 salariés des universités en grève en Californie », Dan La Botz, L’Anticapitaliste, no 638, 24 novembre 2022,
- et sur le site de Mediapart, le blog de Victor Watson du 17 novembre 2022, « Grève historique à l’université de Californie ».
[1] L’UC de Berkeley – University of California, Berkeley – dans la baie de San Francisco, le premier des dix campus de l’État de Californie. C’est l’une des universités publiques les plus prestigieuses des États-Unis, rivalisant avec les universités privées américaines comme Standord (dans la Silicon Valley, au sud de San Francisco) ou Harvard et le MIT (sur la côte Est, dans le Massachusetts). Dans les années 1960, l’UC Berkeley fut au cœur de la contestation étudiante, entre autres pour les droits civiques et contre la guerre du Vietnam, violemment réprimée et occupée militairement par la garde nationale en 1966. Depuis, l’ambiance a bien changé, et le recrutement y est particulièrement élitiste.
[2] L’UAW (l’United Auto Workers, syndicat des travailleurs de l’automobile). Comme le précise Dan La Botz dans son article sur le même sujet dans L’Anticapitaliste du 24 novembre dernier, « … aux États-Unis, à mesure que les effectifs de l’industrie ont rétréci, divers syndicats industriels ont commencé à organiser les employéEs académiques des universités du pays… »
Mots-clés : Université