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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 27, mai-juin 2003

Belgique : Les sidérurgistes entre la rage et le désespoir

17 mai 2003 Convergences Monde

Les 17 et 25 avril, les métallurgistes liégeois de Cockerill-Sambre sont descendus exprimer leur rage devant le siège de la direction d’Arcelor à Luxembourg. Seuls, la première fois, ils étaient plus de 3 000 à manifester. Soutenus par des renforts de France, d’Allemagne et d’Espagne, à l’appel de la FEM (Fédération Européenne des Métallurgistes), 3 500 la seconde. Les deux manifestations, très violentes, se sont soldées à chaque fois par les arrestations d’une ou deux dizaines de travailleurs.

Les syndicats à reculons

Raisons de cette colère : 10 000 postes de travail vont disparaître dans les prochaines années, dans une région déjà durement touchée par le chômage, avec une moyenne régionale de 22 % et des pointes de 27 %. Or, jusqu’à présent, non seulement les actions syndicales étaient plutôt symboliques, malgré une manifestation à Seraing de 6 000 travailleurs en février et une seconde de 40 000 à Liège le 12 mars. Mais l’impression se fait de plus en plus forte que les directions syndicales cèdent le terrain sans combattre.

A l’annonce, le 24 janvier, de la fermeture, FGTB et CSC exigeaient le maintien de la phase à chaud et d’une sidérurgie intégrée à Liège. Mais après des négociations avec la direction d’Arcelor, et avec la Région Wallonne (ancien actionnaire majoritaire, mais qui ne détient plus aujourd’hui que 4,25 % des parts du premier trust mondial de l’acier), les responsables syndicaux ont fini par signer, à la veille même de la seconde manifestation à Luxembourg, un accord qui confirme la fermeture du « chaud », étalée de juin 2005 à 2009. Cet accord, sur le dos des travailleurs, s’est évidemment fait sans les consulter.

Pas étonnant que le lendemain à Luxembourg, deux hauts responsables de la Centrale des métallurgistes (FGTB) aient été pris à partie par les travailleurs. Non seulement ils avaient signé ces accords mais d’une façon patente ils organisaient la désorganisation : ils avaient promis d’amener 8 000 travailleurs d’Arcelor venus de toute l’Europe, il n’y en avait que 3 500, les syndicats luxembourgeois eux-mêmes ayant refusé de s’associer à cette deuxième manifestation sous prétexte des violences de la première. Et pour renforcer l’impression de beaucoup de travailleurs liégeois d’avoir été lâchés par les directions tant de la FEM que de la FGTB et la CSC, dès les premiers affrontements entre la police et les sidérurgistes liégeois, les syndicalistes allemands, espagnols et français se sont éclipsés.

Des réactions mais pas d’organisation

A l’heure actuelle, les travailleurs liégeois sont partagés entre la rage et le désespoir. Ce n’est pas la combativité qui manque. Entre les deux manifestations, des travailleurs de la coulée continue ont spontanément débrayé pour aller trouver leurs camarades de l’aciérie et des laminoirs et sont allés bloquer une partie de l’aéroport régional de Liège. Une action spontanée, tout de suite condamnée par l’ensemble de la structure syndicale, et qui se voulait une réponse au projet des politiciens wallons de transférer une partie des sidérurgistes… vers l’entreprise de courrier express TNT, qui emploie principalement des intérimaires et CDD sur la tranche horaire 23h/5h du matin ! Pensez d’une perspective pour les futurs licenciés !

D’autres réactions ont eu lieu après un nouvel accident survenu ce début mai à l’aciérie de Chertal lorsqu’un travailleur a été brûlé au second degré. Avec une fermeture étalée sur 4 ans, on imagine en effet ce qu’il va advenir des investissements promis pour le maintien, l’entretien et la sécurité des outils de production. Et ici tout le monde a encore en mémoire la terrible explosion de la cokerie de Seraing en octobre 2002 qui avait fait 3 morts et 29 blessés graves.

Peut-être dans ce contexte de mélange de rage et de combativité, suffirait-il d’un petit noyau de militants qui proposeraient une véritable politique de défense des intérêts des travailleurs, qui refuseraient tout licenciement, toute perte d’emplois et toute fermeture, pour mettre sur pied l’organisation susceptible de donner des perspectives qui manque aux sidérurgistes qui veulent en découdre. Elle pourrait trouver un relais parmi les travailleurs des sociétés sous-traitantes de Cockerill, mais aussi parmi tous ceux qui dans la région sont ou vont être touchés par les licenciements : de la SNCB à Belgacom, de la Poste à Philips ou l’aéronautique… Sans même parler de la solidarité à établir avec les autres travailleurs du groupe Arcelor, en France, au Luxembourg, en Allemagne ou en Espagne. Mais pour cela il faudrait à ce noyau la volonté et la détermination de déborder les appareils syndicaux, ceux-là mêmes qui se sont déjà occupés de la fermeture de Renault Vilvoorde en 1997, qui ont liquidé la délégation syndicale combative des Forges de Clabecq en 1999 et accepté la disparition de 17 000 emplois à la Sabena en 2001.

9 mai 2003

Henri VAN KERCHOVE

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