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Accueil > Éditos de bulletins > 2018 > octobre > 29

Où va le Brésil ?

Jair Bolsonaro a été élu président du Brésil, dimanche 28 octobre. Cet ancien officier, obscure médiocrité de la vie politique brésilienne pendant près de 30 ans, a brusquement connu une fulgurante ascension en quelques mois, malgré ses déclarations haineuses, racistes, homophobes et misogynes et grâce à un discours nationaliste et des promesses illusoires d’un retour à « l’ordre et la prospérité  ».

Son programme fourre-tout a d’abord séduit une large partie des classes moyennes, exaspérée par la fin de la croissance économique depuis 2008 et la corruption ambiante, imputée quasi-exclusivement aux dirigeants du PT, l’ancien parti de gauche au pouvoir. Déjà en 2016, c’est la mobilisation de ces classes moyennes dans la rue qui a favorisé un premier coup de force institutionnel de la droite, entraînant la destitution de la présidente Dilma Roussef.

La situation économique a continué à se dégrader, mais qu’importe ! Bolsonaro propose une liste infinie de boucs émissaires potentiels : militants de gauche ou écologistes, paysans sans-terre, journalistes, homosexuels, femmes, membres des minorités indiennes ou noires, etc.

Mais ce programme délirant attire aussi une partie des travailleurs. Y compris parmi les plus pauvres, ceux qui précisément auront le plus à perdre dans le nouveau pouvoir. Abandonnés depuis des années à la violence et la misère des favélas par le parti de Lula qui prétendait les défendre, ils sont laissés à la merci d’églises évangéliques ultra-conservatrices… qui appellent unanimement à voter Bolsonaro.

Terreur patronale

Et si les élites économiques, politiques et militaires, les profiteurs de tout poil, soutiennent Bolsonaro, c’est parce que toute une partie de son programme est faite pour eux. Le nouveau président a passé toute sa campagne à promettre qu’il allait écraser les « bandits rouges  ». Par ce terme, il désigne tous ceux qui s’opposent, ou simplement dénoncent, l’emprise du patronat et des grands propriétaires des campagnes. Ainsi Bolsonaro n’a cessé de promettre pendant sa campagne l’impunité totale aux policiers et militaires chargés de faire régner la « sécurité » dans les villes et d’appeler ouvertement à la constitution de milices de tueurs dans les campagnes au nom de la « liberté » de s’armer.

Autant dire qu’il s’agit pour lui de créer un climat de toute-puissance patronale visant à empêcher définitivement grèves et contestations dans un pays où la classe ouvrière est nombreuse et combative. Préfiguration inquiétante de ce nouveau pouvoir, les agressions et meurtres d’opposants politiques de la part de l’extrême droite se sont multipliés ces derniers temps, alors que les universités sont le théâtre de descentes de police.

Car Bolsonaro se réclame ouvertement de la dictature militaire, instaurée par un coup d’État en 1964, appuyé par la CIA, et qui a duré 20 ans (1964-1985). Il s’agissait, à l’époque, pour les milieux conservateurs brésiliens comme pour le grand patronat nord américain, dont les intérêts florissaient au Brésil, d’en finir avec les vagues de grèves qui avaient éclaté en 1963-1964 dans un pays où l’hyperinflation ruinait les classes populaires.

Fruit d’un capitalisme pourrissant

Au-delà de la situation brésilienne, la victoire de Bolsonaro prolonge celles d’une série d’autres représentants réactionnaires de la bourgeoisie de part le monde, de Trump à Poutine, en passant par Erdogan, Orban ou Salvini. Autant de démagogues prônant les idées d’extrême droite, en profitant du désarroi des populations face à l’explosion des inégalités et des trahisons répétées des soi-disant partis de gauche, comme le PT au Brésil qui a servi loyalement les intérêts capitalistes pendant 13 ans. Cela dit, le scrutin brésilien a aussi montré que la moitié de la population exècre ce nostalgique de la dictature. Et les manifestations massives des femmes à son encontre il y a quelques semaines montrent la conscience et les capacités de mobilisation de millions de gens… en dehors des élections. Plus que jamais la lutte de classe est à l’ordre du jour.

Au Brésil comme ailleurs, ce fléau ne peut être contré que si les travailleurs s’organisent, se défendent et font entendre leurs intérêts de classe. Rien n’est joué.

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