La suite au prochain tour ?
13 mai 2002 Éditorial des bulletins L’Étincelle
C’est « au galop » que Raffarin, le nouveau premier ministre, va s’efforcer de remplir la « mission » de servir le projet de cette présidence Chirac deuxième époque.
Au menu une baisse immédiate des impôts sur le revenu – celui payé par les plus aisés – une diminution de l’impôt sur les bénéfices des sociétés et de nouvelles baisses de charges sociales pour les patrons. S’y ajoutera l’assouplissement des 35 heures pour permettre aux employeurs de profiter davantage de la flexibilité et de réduire encore les majorations pour heures supplémentaires. Quant aux retraites, ce sera la remise en question des taux et des durées de cotisation, l’égalisation par le bas du public sur le privé, l’instauration des « fonds de pension à la française », ces retraites par capitalisation style « Enron », c’est-à-dire transformables en fumée, mais réservés à ceux à qui il restera de quoi épargner sur leur salaire.
La « mesure choc », c’est la nomination d’un ministre de la sécurité. Mais l’insécurité n’a aucune chance de reculer avec une telle politique économique, favorisant encore et davantage le développement des îlots de misère. Et ce n’est sûrement pas la création de centres fermés pour les mineurs, ces sinistres maisons de correction qui n’ont jamais fabriqué que des récidivistes endurcis, qui arrangera quoi que ce soit !
Démagogie sécuritaire, persistance des cadeaux fiscaux au riches et au patronat, et nouvelles attaques contre les travailleurs, Chirac court après le programme de Le Pen.
Certes Le Pen, raciste et ancien tortionnaire, n’a pas obtenu les 30 % qu’il espérait au second tour. Encore heureux ! Reste qu’avec 5,5 millions de voix, cela fait encore beaucoup trop d’électeurs, parmi lesquels des travailleurs et des chômeurs, qui ont l’inconscience de se tourner vers ce nostalgique du fascisme ne rêvant que de mettre au pas l’ensemble des travailleurs. Fallait-il pour autant que Chirac soit élu avec la complicité des dirigeants de cette gauche qui se sont abaissés à faire voter pour lui ?
Avec l’addition des seules voix de la droite Chirac en aurait obtenu deux fois plus que Le Pen et était assuré d’être élu. Mais les dirigeants de la gauche, discrédités par leur politique au gouvernement, ont tenté de se refaire une virginité en faisant voter « escroc plutôt que facho », contribuant à fabriquer pour l’escroc une image de prétendu « sauveur de la République », le faisant passer pour le candidat du « barrage au fascisme ». Une escroquerie de plus mais Chirac, pouvant pour cinq ans encore éviter de passer devant les juges, n’en est plus à ça près ! Il cultive maintenant son image, et avec un zeste de tricolore et des trémolos dans la voix, il nous en a rechanté un air à l’occasion du dernier match de foot.
Reste qu’après l’intox du 2° tour de la présidentielle, une bonne part de ceux dont l’esprit avait été embrumé par cette drogue, se sont retrouvés le lendemain avec la gueule de bois : fort de 82 % des suffrages, Chirac veut mener une politique ressemblant à celle de son ex-concurrent.
Certes rien de fondamentalement différent de ce que nous promettait la gauche, qui elle courait après la droite, quand ce n’était pas aussi après l’extrême droite. Gauche et droite se succèdent au gouvernement et mènent, avec ou sans cohabitation, la même politique depuis 20 ans, faisant le lit de Le Pen. Ils nous demandent de voter une nouvelle fois pour eux aux prochaines législatives, la droite pour éviter la cohabitation, la gauche pour nous en promettre une nouvelle !
On prend les mêmes et on recommence ! Eh bien non ! Aux prochaines consultations nous devrons nous prononcer clairement pour ceux qui s’opposent à l’extrême droite, mais exigent aussi l’interdiction des licenciements, l’arrêt des cadeaux aux riches et aux patrons, préconisent qu’on utilise l’argent de l’Etat pour créer des emplois utiles dans les services publics, l’augmentation des salaires et des minima sociaux. Avec l’extrême gauche, affirmons notre volonté de défendre nos retraites, nos emplois et notre refus du démantèlement des services publics.
Que nous ayons ou pas voté Chirac au second tour, préparons-nous à nous retrouver, tous ensemble, dans la lutte pour ces objectifs vitaux, qu’aucune élection ne pourra nous apporter.