Bolloré ou Gargantua en Afrique
1er avril 2001 Convergences Monde
Du papier bible au condensateur à diélectrique, du sachet de thé au masque de chirurgie, Bolloré n’est encore au début des années 80 qu’un papetier breton diversifié.
Fort d’amitiés nombreuses dans le monde politico-patronal, Vincent Bolloré a mis la main depuis sur de vieilles maisons de l’exploitation coloniale : la SCAC et Delmas-Vieljeux, groupes de transport très présents sur le continent noir. A ces conquêtes, il ajoutera les dépouilles du groupe Rivaud, une nébuleuse de dizaines de holdings alliant plantations tropicales, compagnies aériennes, caisses noires gaullistes, industrie, etc… le tout basé aux îles Vanuatu (les comptes sont publiés en vatu, la monnaie locale).
Aujourd’hui présent dans 37 pays africains, Bolloré est devenu leader du transport maritime (il domine tous les ports ouest-africains), et de là il pénètre en amont dans la production au gré des privatisations – braderies. Il s’est déjà emparé du tabac (10 milliards de cigarettes par an via la société Coralma), de centaines de milliers d’hectares de plantations (café, cacao, cotons, hévéas, huile de palme…), de pans entiers du réseau ferré (Cameroun, Congo, Sénégal, Mali). Un copieux arrosage d’argent public (Agence Française du Développement et même Banque Mondiale) conforte la boulimie du groupe.
Main-basse sur la Côte d’Ivoire et le Congo-Brazzaville
Lorsque Bolloré manqua de peu d’absorber Bouygues en 1997, La lettre du Continent suggéra que le tandem Bouygues - Bolloré contrôlerait toute l’économie ivoirienne (eau, électricité, gaz, transports maritimes, tabac, plantations, construction d’ouvrages d’art) et ironisait en proposant de les admettre eu gouvernement (mais n’y sont-ils pas déjà ?). Cette mainmise du groupe en Côte d’Ivoire fut imposée sans lésiner sur les moyens : les sociétés de transport bolloréennes rançonnent les producteurs ivoiriens tandis que les banques françaises et internationales complices les asphyxient financièrement…
Au Congo Brazzaville, après avoir soutenu Sassou Nguesso, Bolloré s’empiffre : chemins de fer (avec le gracieux concours de la SNCF !) et port pétrolier de Pointe Noire sont sur le point de tomber dans son escarcelle.
Julien FORGEAT
Mots-clés : Afrique | Vincent Bolloré