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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 106, juin-juillet-août 2016

À l’assaut des salaires du patronat… retenez–moi !

On croyait l’idée enterrée mais Valls l’a ressortie : limiter les rémunérations du patronat à cent fois le smic ! Quelle audace. Rapidement évoquée en juillet 2012 après la campagne de Hollande, la proposition avait été abordée en 2013 pour être tout aussi rapidement abandonnée. Aujourd’hui, en plein mouvement contre la loi Travail, quarante « personnalités », parmi lesquelles Thomas Piketty, Pierre Rosanvallon, Laurent Berger (CFDT), Philippe Martinez (CGT), Jean Lassalle (Modem) ou le « frondeur » Arnaud Montebourg, viennent à la rescousse du Premier ministre en signant un « Appel des 40 au CAC40 » remettant l’idée sur la table. Valls en appelle à légiférer, ce qui reviendrait à inscrire sur le marbre de la loi que le salaire du patron vaut cent fois celui d’un ouvrier. « Liberté, égalité, fraternité », avez-vous dit ? Le 26 mai dernier, dès la première lecture du projet, l’Assemblée nationale à majorité PS remballe le projet sans plus de ménagement. Ouf, on a évité la révolution…

Salaires, jetons de présence, actions gratuites, dividendes…

Revenons sur les prétendus salaires. Chaque année voit son lot de statistiques sur l’écart des salaires entre les patrons des grandes entreprises, les journaux économiques établissent même des classements des patrons les mieux payés. Tout cela n’est en fait qu’une fiction. La rémunération des grands patrons est divisée en part fixe, part variable, jetons de présence, actions gratuites… ainsi qu’en dividendes qui constituent la majorité de ce qu’ils touchent, et dont le montant, très au-delà du « salaire », n’est pas forcément révélé. Pour s’imaginer ce que cela peut représenter, les deux patrons des plus gros fonds spéculatifs américains ont ainsi touché la bagatelle de 1,7 milliard d’euros chacun pour l’exercice 2015 [1]. Ce n’est plus cent fois le smic, mais plus d’un million de fois. Vite ! Une pétition…

C’est que la grande bourgeoisie investit tous les champs du pouvoir et se répartit les places. On ne place plus ses fils à la Cour, dans l’Église ou à l’armée comme au xviiie siècle, mais à la tête d’un service public ou d’une multinationale, en réservant le gouvernement aux moins talentueux. Actionnaires et grands patrons forment la même classe sociale, et ont les mêmes intérêts dans l’exploitation des travailleurs. Il suffit de lire la liste des patrons du CAC40 : Bernard Arnault (LVMH), Martin Bouygues, Arnaud Lagardère, François Pinault (Kering) ou Lakshmi Mittal (ArcelorMittal) sont parmi les plus grosses fortunes mondiales. De la même manière, comment des politiques qui viennent du même milieu et qui fréquentent assidûment ces grands bourgeois pourraient-ils sérieusement proposer une régulation des revenus patronaux ? Imaginez Nicolas Sarkozy expliquer à son frère Guillaume, président du syndicat patronal Union des industries textiles, que son salaire sera désormais encadré. Ou Arnaud Montebourg faire de même au conseil d’administration de l’entreprise Habitat qui l’emploie.

Curieusement, aucun membre du gouvernement ne s’est hasardé à évoquer le 49-3 pour faire passer le projet de Valls. Nul doute que « la volonté du gouvernement d’aller jusqu’au bout » n’était pas à l’ordre du jour dans cette affaire. Songeons un instant à ce que pourrait être un 49-3 du monde du travail : cela s’appellerait tout bonnement « expropriation », les travailleurs au pouvoir et les patrons, sinon à la chaîne, du moins au musée. La question de l’encadrement des rémunérations sera alors toute réglée !

Simon COSTES


Hollande vient d’inventer le plébiscite actionnarial

Après la pétition, le gouvernement a dégainé sa deuxième arme, une mesure votée le 20 mai par les députés : c’est désormais l’assemblée des actionnaires qui fixe le montant des rémunérations et non plus le conseil d’administration.

Patrons, prenez garde ! « Une société de conseil aux actionnaires, Proxinvest », rapporte Le Canard enchaîné, « a eu l’idée d’étudier les décisions prises en 2015 par 327 assemblées générales de boîtes françaises cotées en Bourse. Pas une seule n’a rejeté la rémunération de ses dirigeants. Et le taux d’approbation a même été quasi stalinien : 89 %, en moyenne, de votes favorables ». [2]


[1« De la relativité de la richesse », Le Monde, 24 mai 2016.

[2« Hollande fait confiance aux actionnaires », Le Canard enchaîné, 1er juin 2016

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