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Accueil > Autres > Tribunes de la Fraction dans l’hebdomadaire Lutte ouvrière > 2002 > juin > 4

Protégez-nous de nos (FAUX) amis, et nos ennemis on s’en chargera

4 juin 2002

Après avoir fait au deuxième tour des présidentielles la campagne de Chirac sous prétexte de barrer la route à Le Pen, la gauche a retrouvé pour les élections législatives le sens du danger que représente la droite. Danger pour elle-même en tout cas. Car si la gauche dénonce la droite c’est surtout pour se plaindre d’avoir été trompée par elle.

Sans dignité

Selon l’éthique politique, voyez-vous, le candidat républicain Chirac n’aurait pas dû, une fois élu président, redevenir l’homme de droite Chirac ! Pour nous convaincre de voter pour lui, les mêmes, Parti communiste, Parti socialiste et Verts, nous assuraient pourtant que cela ne pouvait pas se produire. Chirac allait être noyé sous les voix de gauche. Eh bien, le noyé se porte bien ! Elu à 82% des voix, le candidat à la prison pour détournement de fonds a été blanchi et présenté comme le rempart de la République et le défenseur de la démocratie contre l’extrême droite. Pourquoi se gênerait-il maintenant pour se servir du marchepied que la gauche lui a si gentiment tendu pour faire élire une majorité de droite !

Ce sont en fait les partis de gauche qui apparaissent bel et bien noyés dans le bourbier qu’ils ont eux-mêmes créés. Il faut dire qu’il y a de quoi donner le tournis à ceux qui essaient de suivre leurs retournements et leurs volte-face. Premier épisode, la gauche monte à l’assaut de la droite et du siège présidentiel tenu par Chirac. Deuxième épisode, la gauche s’aligne sur la droite et appelle à voter Chirac. Troisième épisode, la droite est de nouveau dénoncée par la gauche comme l’ennemie capable de s’allier à l’extrême droite et d’utiliser abusivement les voix des anti-Le Pen que la gauche lui a apportées. Et au quatrième acte, la gauche se mord la queue et, dans le but de s’assurer des alliances au deuxième tour des législatives, implore la droite de l’aider à avoir des élus en lui renvoyant l’ascenseur en cas d’affrontement avec l’extrême droite.

Sans vergogne

Et les intérêts des travailleurs dans tout ça ? Hollande a certes eu des intonations pathétiques pour affirmer que la droite pourrait provoquer une crise sociale ! Mais c’était pour dire que cette crise sociale, c’est-à-dire en clair une réaction puissante et une contre-offensive du monde du travail, c’était ce qu’il fallait redouter par-dessus tout.

Même pour retrouver les voix des travailleurs dont des millions se sont détournés d’elle le 21 avril, la gauche se refuse à gauchir son discours. On ne sait jamais. Après ces cinq ans d’expérience de gouvernement de gauche il y a peu de chance, mais il ne faudrait tout de même pas que la classe ouvrière s’avise de prendre la gauche au mot. Là est, pour cette gauche, un danger autrement important que le retour de la droite.

Alors, elle se garde toujours d’opposer une politique de défense des intérêts des salariés aux attaques anti-sociales ou aux propos ultra-sécuritaires de ses adversaires supposés. Elle se garde d’affirmer qu’elle mènerait une autre politique face aux licenciements qui se multiplient ou aux attaques contre les immigrés présentés à nouveau, ouvertement ou non, comme des responsables de la situation.

Et si elle ne le fait pas ce n’est pas seulement parce qu’après le gouvernement Jospin ce ne serait guère crédible. Au pouvoir elle n’a pas levé le petit doigt pour s’opposer aux vagues de licenciements collectifs qui plongent des familles et des régions dans la misère. Elle n’a rien fait pour les cités de la misère. Rien non plus pour des dizaines de milliers de sans-papiers qui avaient pourtant cru en elle. Qui peut croire en effet qu’elle le ferait demain ?

Mais si elle répugne même maintenant à faire des promesses qui ne lui coûteraient rien, c’est surtout l’indication qu’elle brigue toujours les suffrages des salariés (l‘essentiel des électeurs de gauche) pour refaire la même politique, s’attaquer aux retraites, faire du sécuritaire sur le dos des jeunes des cités et des immigrés.

Aux prochaines élections législatives, les travailleurs n’ont donc pas plus intérêt à donner leur voix à cette gauche gouvernementale qu’à la droite ou l’extrême droite. Tous ces politiciens, de Le Pen à Hollande, sont leurs ennemis déclarés ou sournois. Le seul vote utile est celui pour une politique qui dise clairement qu’il faudra par la lutte imposer l’interdiction des licenciements, la défense des retraites, l’augmentation des salaires et des minima sociaux. Le 9 juin ils ont intérêt à voter pour les listes de Lutte Ouvrière soutenues par Arlette Laguiller. Et puis les élections passées à se préparer et s’organiser en vue des combats que nos soi-disant hommes de gauche redoutent autant que ceux de droite et d’extrême droite.

Robert PARIS

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