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Le congrès CFDT : un franc succès bureaucratique

jeudi 1er avril 1999

La CFDT vient, avec son 44e congrès, d’asseoir solidement l’autorité de la direction confédérale autour de Nicole Notat. Pourtant son bilan depuis le congrès de 1995 est salé.

La CFDT a approuvé le plan Juppé contre la Sécu à l’automne 1995, combattu frontalement le mouvement de l’hiver 95. C’est sous la présidence de Notat (élue avec les voix patronales) que l’UNEDIC a mené de lourdes attaques contre les chômeurs : généralisation de la dégressivité des allocations, allongement des durées de cotisations ouvrant droit à allocation, flicage systématique des chômeurs. Le résultat en a été le grand mouvement des chômeurs de l’hiver 1997. Dans la foulée, derrière le drapeau trompeur de la lutte pour l’emploi et les 35 heures, la CFDT a signé des centaines d’accords loi De Robien puis loi Aubry généralisant la flexibilité. Malgré cette politique pro-patronale sans pudeur, la CFDT a été sans doute la confédération qui s’est le plus développée ces dernières années, principalement dans les secteurs à faible implantation syndicale, peu marqués par les luttes d’envergure, à l’exception notable des routiers.

De 1995 à 1998, l’opposition interne, Tous Ensemble, s’appuyant sur des responsables de fédérations, notamment la Fédération des transports et de l’ANPE et de forts points d’appuis locaux et régionaux (Basse Normandie) est clairement apparue en opposition à la ligne de Notat.

La bureaucratie confédérale est parvenue à laminer politiquement cette opposition qui l’avait mise en minorité au dernier congrès confédéral, même si finalement son poids numérique dans le congrès était stable (autour de 7000 mandats, représentant 15 000 adhérents). Un savant travail de laminage et d’isolement contre l’opposition pendant deux ans, un ratissage systématique des mandats favorables à la direction pour le congrès, ont produit leur effet : de 18 500 mandats en 1995 à 27 100 en 1998 !

L’effondrement de l’opposition

Mais au-delà des manœuvres bureaucratiques, le courant Tous Ensemble a été traversé par une crise. Après novembre décembre 95, beaucoup de militants CFDT se prononçaient pour un départ de la CFDT. Les dirigeants de Tous Ensemble s’y opposèrent, mettant en avant la bataille pour un congrès extraordinaire et faisant miroiter la possibilité d’obtenir la démission de Notat, sur la base d’un accord avec les syndicats dits du « centre » (UD Loire Atlantique et Rhône, Habillement Cuirs Textile, notamment). Plusieurs milliers de militants quittèrent alors la CFDT, le plus souvent pour fonder des syndicats SUD, notamment chez les cheminots et les enseignants.

La direction de la CFDT fut assez habile pour étouffer l’opposition plutôt que l’exclure. Mieux, quelques mois avant le congrès, Notat sut mettre au placard ses discours les plus provocateurs et annoncer en grande pompe sa volonté unitaire vis-à-vis de la CGT. Ces petits changements verbaux, auxquels s’est ajouté le soutien aux mesures du gouvernement de gauche, ainsi que les succès électoraux de la CFDT, ont affaibli les volontés de contestation de ces syndicats dits du centre. Les militants de Tous Ensemble qui avaient clairement refusé le chemin d’un départ massif, soit vers les SUD, soit vers la CGT, se sont trouvés sans aucune perspective. Cela s’est soldé par leur isolement au congrès, puis la décision de dissoudre leur association au début de 1999. Ce qui juge de la limite d’une démarche fondée sur un accord d’appareils plutôt que sur une orientation alternative à Notat.

Si beaucoup de militants CFDT ont été démoralisés, déboussolés par les positions de la confédération, il en reste évidemment de nombreux qui attendent autre chose d’un syndicat et qui vont se trouver encore plus démunis au sein de la CFDT avec l’allégeance du centre et la dissolution de Tous Ensemble. Le rapprochement bureaucratique CGT-CFDT ne va pas pour autant leur donner de nouvelles perspectives.

Une page est vraiment tournée dans la CFDT. Pourtant, même si les partisans de Notat verrouillent complètement les instances confédérales et fédérales, ils ne peuvent empêcher sur le terrain, dans les entreprises, les militants qui le souhaitent de maintenir un syndicalisme de lutte.

Loïc CHEVILLARD

Mots-clés CFDT , Politique , Syndicats