Une reprise économique sur le dos des travailleurs
13 septembre 2021 Éditorial des bulletins L’Étincelle Politique
Une note de conjoncture publiée par l’Insee mardi 7 septembre a confirmé la poursuite de la reprise économique. De quoi enthousiasmer Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, qui prévoit d’ailleurs 6 % de croissance cette année, espérant voir l’économie se rapprocher du niveau d’avant la crise.
En tout cas, pour les plus grandes entreprises et leurs actionnaires, ce niveau d’avant la crise a largement été dépassé : la fortune des milliardaires français a augmenté de 40 %, tandis que les bénéfices des entreprises du CAC 40 ont atteint 60 milliards d’euros, soit 41 % de plus qu’en 2019 !
La recette du succès patronal
Il faut dire que l’État a bien mouillé la chemise pour maintenir coûte que coûte les profits, avec plus de 80 milliards d’euros directement versés aux entreprises, sans parler des 140 milliards de prêts garantis. Des subventions qui ont avant tout servi au patronat pour restructurer tous azimuts.
Des dizaines de milliers de suppressions de postes ont eu lieu ou sont prévues chez Renault ou Airbus, mais aussi à la SNCF, sans parler des hôpitaux où il est pourtant urgent d’en créer. Certaines entreprises, comme le sous-traitant d’Airbus toulousain Derichebourg, ont fait signer des accords de performance collective pour augmenter le temps de travail sans que les salaires suivent. Enfin le télétravail s’est généralisé, entraînant des économies pour les entreprises voire des perspectives de juteuses opérations immobilières comme chez Stellantis (ex-PSA) qui prévoit de se débarrasser de la majorité de son site R&D de Vélizy.
Tous les moyens sont bons pour augmenter la pression sur les travailleurs, développer la flexibilité ou diminuer la part des salaires.
Même pas des miettes en échange
Les travailleurs ne voient pas la couleur du rétablissement des profits. 15 % des entreprises ont gelé les salaires en 2021 quand, dans les autres, l’augmentation moyenne n’a été que de 1,45 %, parmi les plus faibles depuis dix ans. Une augmentation qui sera bien vite rognée par la hausse des prix prévue à plus de 2 % sur un an en octobre.
Comble du cynisme, les sphères patronales se plaignent de difficultés pour recruter notamment dans les « secteurs essentiels ». Ça les étonne que personne ne se précipite sur des boulots mal payés, avec des conditions de travail dégradées, une flexibilité à outrance ?
Le gouvernement orchestre les attaques contre nous
Quand Bruno Le Maire fait mine d’en appeler à « une meilleure rémunération de ceux qui ont les rémunérations les plus faibles », lui-même n’est pas prêt à aller au-delà de l’augmentation automatique du Smic !
Par contre, quand il annonce la fin du « quoi qu’il en coûte », cela ne concerne pas les entreprises, pour lesquelles un plan de soutien de 30 milliards d’euros est prévu, mais vise les quelques mesures sociales prises au début de la pandémie. Et il prépare le terrain à l’application de la réforme de l’assurance chômage, qui pénaliserait des centaines de milliers de chômeurs, et au retour de la réforme des retraites : de quoi essayer de contraindre les salariés à accepter les conditions de travail les plus dures.
La partie n’est pas jouée…
Un gros du transport, Transdev, a lancé une attaque-test à l’occasion de l’ouverture à la concurrence du réseau de bus interurbain en région parisienne : temps d’attente aux dépôts rallongés et non rémunérés (parfois jusqu’à 45 heures passées au travail… payées 35), et on en passe. Sauf que Transdev est tombé sur un os avec une grève à 100 % de plusieurs dépôts, grève qui menace de faire tache d’huile. Une situation qui est scrutée par toutes les entreprises de transport, mais aussi par tout le patronat et le gouvernement qui savent bien que leurs attaques ont suscité une colère dont ils craignent qu’elle explose.
Il est donc important que cette colère ne reste pas cantonnée à quelques entreprises mais s’exprime massivement. La journée de grève du 5 octobre peut être l’occasion de la montrer tous ensemble.