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Editorial

Hollande et Valls chassent les migrants d’une jungle à l’autre...

jeudi 10 novembre 2016

Comme l’avouent aujourd’hui des journalistes, le gouvernement a voulu leur faire raconter une belle histoire [1]. Celle d’un bidonville géant de 10 000 personnes que par humanitarisme il aurait décidé de faire gentiment évacuer. Celle de milliers de migrants, hommes surtout mais aussi femmes et enfants, auquel il aurait trouvé un toit ailleurs en France. La « com’ », comme le crime, était presque parfaite !

En fait les Hollande-Valls-Cazeneuve ont lancé le lundi matin 24 octobre aux aurores leur vaste opération de démantèlement, en fait de destruction, avec la même brutalité qu’ils avaient mise dans la traque contre les migrants qui a conduit à cette « jungle » de Calais. Une chasse à l’homme menée depuis des années par les gouvernements français successifs, épaulant les gouvernements anglais qui fermaient leur frontière ! C’était un cloaque ? Indigne de l’humanité ? Un lieu invivable qu’il fallait « démanteler » – en fait incendier et raser ? Mais à qui la faute si ce n’est à ces gouvernements qui ont laissé errer et zoner dans le froid et la boue l’équivalent en nombre de la population d’une vraie ville ! Le plus scandaleux étant que ces migrants venus d’Afghanistan, de Syrie, d’Irak, d’Érythrée et autres pays d’Afrique, fuyaient la misère et les terribles guerres que ces mêmes gouvernements français ont contribué à déclencher et attiser dans ces pays et régions ces dernières vingt années.

Hollande et Cie ont fait mine de jouer les bons samaritains, mais la mise en scène des beaux « voyages organisés » en bus, de Calais aux quatre coins de la France, a vite tourné en eau de boudin. Tous les migrants n’avaient pas envie de partir, tous n’étaient pas convaincus – loin de là – que le point d’arrivée serait un eldorado stable. Et ces hommes et ces femmes avaient formé dans la prétendue « jungle » de Calais une communauté dans l’adversité ; les migrants et les multiples associations et personnes venues à leur aide avaient créé des moyens inouïs de survie communautaire (cafés, restos, centres associatifs de santé, alphabétisation, spectacles...). En échange, le gouvernement fournit à quelques milliers des places en CAO, « Centres d’accueil et d’orientation », soit un toit, un peu de nourriture correcte voire un maigre pécule au fin fond de la Bretagne ou de l’Aquitaine mais pour combien de temps ? Beaucoup de ces structures d’accueil, de qualité bien diverses, sont déjà pleines et une circulaire du ministère de l’Intérieur invite les préfets à les vider par des expulsions en nombre, voire par quelques « aides » financières au retour.

Bref au mieux du précaire et du provisoire, rien d’autre.

Le résultat, c’est qu’après trois jours pendant lesquels le gouvernement a prétendu que tout baignait à Calais, qu’on pouvait évacuer le problème avec le bidonville, la situation tourne déjà vinaigre. Des centaines, voire des milliers de migrants n’ont pas voulu prendre les bus, ou sont partis par leurs propres moyens et leurs propres destinations, en particulier Paris où à nouveau grossit le campement dans le quartier de Stalingrad proche de la gare du Nord. Plus d’un millier de personnes y sont arrivées en quelques jours et à Calais ou Dunkerque, de nouvelles poches de migrants se créent... La même errance liée à la poursuite de la politique crasse des autorités françaises.

L’objectif du gouvernement n’est pas d’accueillir les migrants. Il est de les disperser, de les rendre invisibles ou de le tenter, en particulier pour céder à l’électorat le plus réactionnaire, à tous ceux qui pensent que ces migrants viendraient manger notre pain et voler nos boulots ! Un peu partout où des réfugiés sont arrivés ces tout derniers temps, des manifestations de mauvais coucheurs du FN ou autres xénophobes ont eu lieu et ont été relayées par les médias... Oui, de quoi avoir honte, de quoi en avoir la nausée. Mais des contre-manifestations bien plus nombreuses ont eu lieu aussi, dans de nombreuses villes de tailles diverses. Des initiatives qui expriment de la chaleur humaine, de l’espoir... Partout où c’est possible, il faut en être, il faut le permettre. À qui pourrait-on faire croire que 10 000 personnes de plus ne pourraient trouver place dans un pays qui compte 65 millions d’habitants ? Certes dans des conditions parfois elles aussi discutables, l’Allemagne en a accueilli un million !

Les travailleurs doivent se dresser contre cette politique nauséabonde du gouvernement français, de refoulement meurtrier des migrants (les médias donnent aujourd’hui le total de 3 800 personnes mortes en Méditerranée depuis janvier 2016, et ils ne comptent pas, et pour cause, tous ceux dont la mer ne rendra jamais les corps). Ils doivent montrer leur solidarité à l’égard de réfugiés avec lesquels ils ont incomparablement plus en commun qu’avec les patrons et les dirigeants politiques à leur service. Les travailleurs ont tout à craindre de ces derniers qui leur volent leurs emplois à coups de dizaines de milliers de licenciements et de suppressions de postes. Elle a en revanche tout à espérer des migrants, nouveaux venus qui seront des alliés dans les prochaines luttes tous ensemble.

31 octobre 2016


[1Voir le « Billet » de Maryline Baumard, en page 10 du Monde des 30 et 31 octobre.

Mots-clés Calais , Migrants , Politique , Réfugiés
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