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Les accords d’Oslo : de la guerre des pierres au « processus de paix », et retour

jeudi 16 mai 2002

C’est la révolte de la population pauvre de Palestine qui a contraint Israël à discuter de la question d’un Etat palestinien, évoqué depuis longtemps et proclamé unilatéralement par l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) à Alger en 1988. L’Intifada dure depuis 5 ans quand la conférence de Madrid, en 1991, initie un cycle de négociations entre l’OLP et le gouvernement israélien. Tenues d’abord secrètes en Norvège, elles aboutissent aux accords d’Oslo (signés en fait à la Maison blanche, sous l’égide des Etats-unis, le 13 septembre 1993).

L’impossibilité pour l’Etat israélien de mâter la révolte palestinienne l’a poussé à ce compromis. Les nationalistes palestiniens crient victoire, la gauche israélienne se réjouit. Mais Israël entend bien ne faire que les concessions nécessaires pour calmer cette révolte.

Une « puissante force de police »

Les accords prévoient la création d’une Autorité palestinienne, pour une période intérimaire de 5 ans, sur une partie des territoires occupés. Sa nature, sa forme sont imposées sans discussion au peuple palestinien (même si, pour faire plaisir à l’ONU, des élections seront organisées pour choisir le Conseil palestinien). Surtout, l’Autorité palestinienne est bien loin d’avoir les prérogatives d’un Etat.

Bien sûr, comme le dit l’article VI des accords, l’administration militaire israélienne cède volontiers à l’Autorité « la compétence dans les domaines suivants : éducation et culture, santé, protection sociale... ». A elle désormais de gérer la pénurie sur ces questions. Elle aura aussi le droit de faire le sale boulot de lever des impôts sur la misère des camps de réfugiés. Et pourra même si elle le souhaite s’occuper d’environnement (article VII).

Mais le plus important vient ensuite : « le Conseil établira une puissante force de police tandis qu’Israël conservera la responsabilité de la défense contre les menaces extérieures ainsi que la sécurité globale des Israéliens » (article VIII). L’Autorité est donc d’abord une milice composée de Palestiniens, dont Israël espère qu’ils seront plus efficaces que les soldats de Tsahal, l’armée israélienne. Et celle-ci conserve le contrôle de la surveillance extérieure des camps : l’Autorité ne disposera pas d’armée. Par ailleurs, pour achever de lier les mains du monde arabe et s’assurer de la complicité de ses dictateurs, l’Autorité est placée sous surveillance égypto-jordanienne (article XII).

Une économie de camps

Et puis, il y a tout ce dont les accords ne traitent pas et dont dépend pourtant l’existence du peuple palestinien. L’économie des Territoires, à l’instar des pays arabes qui les entourent, est celle de pays du Tiers-monde, en pire peut-être. Le secteur agricole, qui représente 15 % du PNB palestinien, emploie 20 % de la population active. Pourtant, 6 % seulement des terres arables sont irriguées. Pour comparaison, en Israël 50 % de la surface cultivée est irriguée, ne contribuant pourtant qu’à 2 % de son économie. En fait Israël accapare 90 % de l’eau de Cisjordanie. A Gaza, les conséquences de cette expropriation de l’eau prennent les dimensions d’une catastrophe sanitaire. De cela, les accords d’Oslo ne disent mot.

De plus, ce que le langage diplomatique nomme les « dossiers épineux » (le statut des millions de réfugiés palestiniens dispersés dans les pays voisins, le cas des prisonniers politiques, la question de Jérusalem comme capitale, le tracé définitif des frontières) seront traités plus tard.

Le contenu des accords d’Oslo montre donc clairement les limites qu’Israël entend mettre à l’autonomie palestinienne, ce que symbolisait déjà le refus de parler d’un Etat pour se contenter de reconnaître une Autorité. Mais la politique ultérieure des gouvernants israéliens révèle qu’ils veulent revenir même sur les misérables concessions faites. Dès 1993 en effet l’implantation de colonies israéliennes dans les territoires palestiniens s’accélère. Les Israéliens, certains parmi les plus pauvres (souvent d’immigration récente), sont encouragés à s’y installer, au risque de leur vie, par des subventions au logement, des baisses d’impôts ou des prêts avantageux. Ainsi se développe un système de quasi apartheid, les accords d’Oslo ayant prévu que les citoyens israéliens des colonies continueraient à jouir de leurs droits propres et qu’ils seraient protégés directement par l’armée israélienne.

Dans le même temps le Conseil de sécurité de l’ONU (où siègent les parrains occidentaux des accords) continue bien sûr de voter des résolutions généreuses. Elles n’améliorent pas d’un iota les problèmes auxquels le peuple palestinien est confronté. Elles n’aident même pas l’Autorité palestinienne dont elles soulignent au contraire l’impuissance. Mais elles contribuent à la colère croissante de la population palestinienne poussée de plus en plus du côté de la mouvance islamiste ultra réactionnaire.

Alors que la situation se dégrade toujours, une nouvelle échéance est prévue en juillet 2000. L’échec des discussions de Camp David, puis de Taba, encourage la droite israélienne à tomber le masque dont la gauche essayait encore de se parer. Le 28 septembre 2000, Sharon met délibérément le feu aux poudres par sa visite provocatrice sur l’esplanade des Mosquées, un symbole de la Jérusalem palestinienne. Le lendemain commence la nouvelle Intifada.

Benoît MARCHAND

Mots-clés Israël , Monde , Palestine